Algérie

La famille de Louisa Hanoune



Les 23 et 24 septembre 2019 a eu lieu le procès de notre s'ur Louisa Hanoune. Des membres de notre famille y ont assisté jusqu'à ce que le verdict soit rendu le 25 septembre à 2h du matin. Par-delà les nombreuses et graves irrégularités soulevées par les avocats (procédure, nullité?), nous avons enregistré qu'aucune preuve matérielle, aucun témoin demandé par le tribunal militaire n'ont établi le bien-fondé des accusations portées contre notre s'ur (article 284 code militaire et 77/78 du code pénal). Bien au contraire, l'innocence de notre s'ur a été établie, elle n'a commis ni crime, ni délit, ni même une contravention.Nous attendions donc, comme verdict, sa relaxe à l'issue des délibérations du tribunal militaire, qu'elle rentre, avec nous, chez elle, qu'elle soit rendue à sa famille et à son parti, réhabilitée et innocentée. C'est-à-dire que nous nous attendions à ce que justice lui soit rendue, réparant un déni grave. Au lieu de cela, c'est un verdict extravagant, irréel qui a été prononcé, la condamnant à 15 ans de prison ferme. Ce verdict est une hérésie, du point de vue du droit, de la loi qui exige des preuves pour toute condamnation, du point de vue de la raison, de la logique, voire du simple bon sens. Mais pourquoi '
Quelles en sont les motivations politiques ' Car notre s'ur est une détenue politique et son affaire n'est ni sécuritaire ni portant sur quelque complot. Notre s'ur, et son dossier le prouve, n'a fait qu'exercer ses droits politiques constitutionnels en tant que responsable politique dont les positions sont connues de toutes et de tous depuis plusieurs décennies. Depuis quand la pratique politique est-elle devenue un crime '
Depuis quand le fait de dialoguer, d'exprimer et de défendre son point de vue est-il devenu un crime ' La très lourde, injuste et injustifiée condamnation dont notre s'ur est victime soulève moult interrogations. Notre s'ur dérangerait-elle au point que lui soit infligée une peine si infamante ' Et d'où émane la plainte contre elle ' Car c'est un mystère.
Notre s'ur n'a pas rencontré des militaires en exercice, elle n'a pas d'activité militaire, n'a aucun lien professionnel avec l'Armée nationale populaire (ANP), en général, et les formations qui la composent, en particulier. Elle n'a pas rencontré des trafiquants d'armes, des terroristes, des fauteurs de guerre ou des mercenaires. Elle a tout simplement accepté une invitation au dialogue que lui a adressée un haut responsable en poste, conseiller spécial de l'ex-président qui était en poste, pour discuter des mesures devant accompagner la démission de celui-ci.
Car, nous l'avons appris durant le procès, le président Bouteflika avait pris la décision de démissionner en date du 23 mars, c'est-à-dire 4 jours avant la rencontre, ce qui confirme qu'il n'y a pas complot. Notre s'ur a exposé sa vision, à savoir le départ du gouvernement et des 2 Chambres du Parlement, la restitution de la parole au peuple comme accompagnement de la démission de Bouteflika. Elle a donc exprimé un point de vue politique qu'elle défendait publiquement et que partageaient des millions d'Algériens. Par ailleurs, le tribunal militaire a abandonné l'accusation d'attentat (article 77 du code pénal). Comment expliquer alors sa condamnation '
En réalité, notre s'ur a agi, comme elle l'a toujours fait, en patriote, 'uvré pour la satisfaction des aspirations populaires, afin d'éviter à notre pays l'impasse politique dans laquelle il se débat. Alors, oui, nous sommes fondés, face à une telle dérive, à nous interroger sur les véritables desseins qui ont motivé la décision de la faire inculper le 9 mai dernier, alors qu'elle s'était présentée comme témoin, confiante car la conscience tranquille, pensant que son témoignage pouvait aider la justice militaire à faire la lumière sur une rencontre banale qui avait eu lieu un mois et demi auparavant.
Et d'où la plainte émane-t-elle ' En 1983/1984 déjà, notre s'ur avait été emprisonnée pour des accusations de la même gravité et de la même nature. Son crime ' Elle militait, dans la clandestinité, pour la démocratie, pour le départ du système oppressif de parti unique. Elle a été libérée, 6 mois plus tard, sans procès dans le cadre d'une grâce amnistiante. Pourtant, nous étions sous le système inique du parti unique.
En octobre 88 encore, elle a été enlevée de son lieu de travail par la Sécurité militaire, là aussi, elle a été libérée sans avoir été poursuivie et condamnée, par le tribunal militaire, alors qu'elle était accusée d'avoir fomenté le soulèvement de la jeunesse le 5 octobre !... Comment expliquer dès lors qu'en 2019, alors que les libertés démocratiques sont garanties par la Constitution, que les autorités nous promettent une justice réellement indépendante, notre s'ur fasse l'objet d'une telle injustice ' Le dialogue serait halal pour les uns et harem pour les autres '
Pourquoi un tel acharnement alors qu'en plus de son innocence prouvée elle souffre depuis début août d'un problème respiratoire qui l'épuise et qu'un des médecins spécialistes (prison militaire), qui l'a examinée, a diagnostiqué comme étant un déficit de ventilation des poumons. Et ce problème de santé, elle ne l'avait jamais eu avant son incarcération. Nous nous adressons à l'opinion publique : se taire devant une telle injustice contre notre s'ur, c'est permettre toutes les injustices contre toutes et tous.
C'est ouvrir la voie à toute forme d'arbitraire. Nous nous adressons à MM. Bensalah et Ahmed Gaïd Salah : mettez fin à cette injustice qui déshonore notre pays. Ainsi, à la veille du 1er Novembre, ordonnez la libération de Louisa Hanoune. C'est ainsi que s'exprimera la fidélité réelle aux martyrs de notre glorieuse révolution, car leur sacrifice pour l'indépendance nationale posait comme question centrale la liberté effective pour le peuple algérien, l'émancipation de l'homme algérien de toute forme d'oppression et de hogra.

La famille de Louisa Hanoune
Annaba, le 30 octobre 2019


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