Coïncidence ou
bien continuité stratégique de la diplomatie française. Après avoir, reçu en
solo, les représentants de l'opposition du peuple libyen, Conseil National de
Transition, ce qui lui a valu une bouderie et la non adhésion des membres du G
8, à son initiative d'institution d'espace d'exclusion aérienne du territoire
libyen.
Et la permission
d'exécution de frappe au sol des installations militaires libyennes. Le
président de la République française semble avoir réussi à faire valoir et à
faire adopter une résolution, franco-britanico-libanaise du conseil de sécurité
de l'ONU, pour appliquer ce que ne voulaient pas lui accorder les pays riches
du club G8. Ils étaient 10 pays à voter pour la résolution 1973, et cinq autres
se sont abstenus, dont la Chine et la Russie, qui n'avaient pas utilisé leur
droit de veto.
Pourquoi cette
initiative française ?
Déjà le 14
février 2003, dans la même enceinte du conseil de sécurité de l'ONU, monsieur
Dominique de Villepin, alors ministre des affaires étrangères de la France,
avait pour essayer d'émousser, et faire barrage à l'attitude guerrière et
belliqueuse des Etats Unis, courageusement discouru. Il voulait les dissuader
d'intervenir en Irak, faute d'éléments probants sur la détention par les forces
irakiennes d'armes de destruction massive.
Il disait en ce
moment là, à l'adresse du général Colin Powell, secrétaire d'état US :
«Un usage de la
force serait si lourd de conséquences pour les hommes, pour la région et pour
la stabilité internationale».
Autistes les
Américains et leurs alliés, avaient malgré cette opposition, envahi l'Irak,
capturé Saddam Hossein, et l'avaient pendu un matin de Aïd-el-Adha. Ils
l'avaient sacrifié, sachant exactement quel résultat, ils voulaient atteindre.
Ils ont pour la symbolique réussi leur coup médiatique. La part de l'émotionnel
chez les peuples de culture arabe occupe une place prééminente dans l'imaginaire
culturel collectif. Elle détermine souvent l'agir et le fonctionnement
psychologique de ces peuples. Et les stratèges américains l'avaient depuis
longtemps compris, et ils nous traitent en fonction de tout cela. A y regarder
de très près, ils ont au final réussi.
Mais depuis leur
invasion de l'Irak, les hommes, la région, et le monde, sont ébranlés, excepté
une partie des américains : les faucons.
Les faucons
visionnaires, ne juraient que par l'existence en Irak d'armes de destruction
massive. Dans leur démarche ils illusionnèrent les Anglais et les deux,
ensemble partirent guerroyer en Mésopotamie, la terre entre les deux fleuves,
le Tigre et l'Euphrate. L'attrait essentiel, primordial et vital de cette
invasion, farouchement décriée, par messieurs Hans Blix, Mohamed el Baradeï et
Dominique de Villepin, fut et demeure la mainmise sur les réserves pétrolières
de l'Irak. Tony Blair tardivement, le reconnu, et il invoqua à sa décharge,
l'ignorance. Cela ne grandi, ni n'honore son homme, monsieur Blair. Le mal est
fait et continue de se reproduire, tous les jours dans l'Irak sous domination
US. Est-ce que cela, s'est-il arrêté aux atrocités et aux traitements inhumains
subis par des irakiens à la prison de Bou-Ghraïb ? L'histoire en jugera.
Les Américains
n'écoutent que leurs propres intérêts. Même leur invasion de l'Irak avait été
financée par les monarchies du golf. Après, pour durer et financer leur
agression, ils se rétribuent depuis, à la source et autant qu'ils veulent et le
voudront, en pétrole irakien.
Et le peuple
d'Irak dans tout cela ? Avant tout, ce peuple n'avait jamais demandé que les
troupes américaines et anglaises l'envahissent et le contraignent. Ensuite il
n'avait pareillement, jamais réclamé, que l'Irak soit divisé. Quant à la pseudo
institution de la démocratie sauce américaine, en terre d'Irak, cela demeure,
une lubie US qui ne peut prendre racine dans le terreau irakien. Les Irakiens,
ne sont ni les allemands, ni les japonais, d'après deuxième guerre mondiale. A
vouloir faire le bonheur des autres à leur place, et par effraction, les
faucons américains sont en Irak et ailleurs désavoués. Ils ont tout faux, mais
ils persistent. Quelle insolence et quelle effronterie, pour la mémoire de
Jefferson et Martin Luther King, indomptables américains, défenseurs des droits
de l'homme.
Huit ans après
l'Irak, la diplomatie française remet ça. Mais qu'est ce qui fait se mouvoir
cette attitude ? Peut-être la valeur que les Français accordent aux droits de
l'homme.
En effet, dans la
déclaration française des droits de l'homme et du citoyen, de 1789, il est
énoncé en préambule, ce motif qui pourrait partout, géographiquement demeurer
valable :
«Considérant que
l'ignorance, l'oubli ou le mépris des droits de l'homme sont les seules causes
des malheurs publics et la corruption des gouvernements…».
Les réminiscences
de telles raisons, ne peuvent ne pas, quelque part, à un moment ou à un autre
de la diplomatie française, ne pas resurgir et lui servir de ligne de conduite
et de fil rouge.
Dans la même
Déclaration de 1789, l'article 4 dispose ceci :
«La liberté
consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui : ainsi l'exercice
des droits naturels de chaque homme n'a pas de bornes que celles qui assurent
aux autres Membre de la Société, la jouissance de ces mêmes droits. Ces bornes
ne peuvent être déterminées que par la loi».
Ce pourrait être
ce droit de l'hommisme, qui est le promoteur de cette diplomatie. Le tout
nouveau ministre des Affaires étrangères de la République française, dans son
discours d'avant vote, le 17 mars 2011, au conseil de sécurité, Alain Juppé
disait cela :
«prenons garde
d'arriver trop tard, ce sera l'honneur du Conseil de sécurité d'avoir fait
valoir la loi sur la force, la démocratie sur la dictature, la liberté sur
l'oppression».
Dans cette partie
du discours tout est dit. Il s'agit de la protection et de la sauvegarde de la
dignité du peuple libyen. Que demander de plus. Mais attendons pour voir. Car
des exemples antinomiques jalonnent le parcours récent de cette même diplomatie.
En 2003 le président français Jacques Chirac en visite en Tunisie sous le
régime policier de Ben Ali, déclarait, ce qui suit :
«Le premier des
droits de l'homme, c'est de manger, être soigné, recevoir une éducation et
avoir un habitat. De ce point de vue, il faut reconnaître que la Tunisie est en
avance sur beaucoup de pays».
La condamnation
de cette attitude fut acerbe en France, et en Tunisie elle reçut une fin de non
recevoir, par une grande partie de la population. D'ailleurs monsieur Chirac, suite
à la révolution tunisienne devrait très sérieusement revoir sa conception des
droits de l'homme. Effectivement son argumentaire supporte des droits de
l'homme que je qualifierais de premiers. Ils ne sont pas suffisants, même s'ils
sont nécessaires, sinon la révolution tunisienne, n'aurait jamais eu lieu. Cela
est la preuve de la vision étriquée de ces droits, par monsieur Chirac.
Pareillement à
chaque visite en Chine d'un président français, la diplomatie française prend
des gants pour aborder avec les responsables chinois la question des droits de
l'homme. Des euphémismes et des métaphores, enjolivent souvent le discours
diplomatique en ces circonstances. Monsieur Sarkozy, lors d'une de ces
différentes visites, avait dit en direction des ses homologues chinois :
«Nous pensons que
nulle région du monde n'a de leçons à donner à d'autres, mais nous pensons que
la dignité humaine n'est pas fonction de l'histoire et de la culture de chacune
d'elles, mais un droit pour chaque être humain sur la terre aujourd'hui».
Pour l'image et
l'allégorie, on n'en fait pas mieux, quant aux résultats, il va falloir
repasser plus tard en Chine.
Les vacances du
déshonneur de madame Alliot Marie, d'une part, alors ministre des Affaires
étrangères de France, en Tunisie à la veille de la révolution. Et d'une autre,
la gymnastique intellectuelle du communiqué du Quai d'Orsay, tentant de laver
de tous soupçons les vacances égyptiennes de monsieur François Fillon Premier
ministre de France en décembre 2010, dans l'Egypte et les avions gratuits de
Moubarak. Démontrent s'il en est, le déclassement et la disqualification de la
diplomatie française, dans les pays arabes surtout, et dans les autres régions
du monde, bien sûr. L'attitude française vis-à-vis du cas Ivoirien et sa crise,
donne également d'autres clés de lecture du repli et de la régression de sa
démarche diplomatique.
Alors pour se
rattraper et faire oublier tant de déconvenues, et d'autres échecs notamment à
la veille d'élection présidentielle, mai 2012. Il n'était pour l'actuel
président et potentiellement candidat à sa propre succession. De salut que le
repositionnement diplomatique pour la reconquête de zones d'influences perdues.
L'aboutissement de l'initiative française et sa validation par le Conseil de
sécurité de l'ONU, le 17 mars 2011, est un point de taille inscrit par la
France diplomatique. Et pour faire plus vrai que vrai, les forces françaises
ont été les premières à entrer en action en Libye, dès adoption de la
résolution 1973 du conseil de sécurité. La France initiatrice de la résolution,
part en ouvreur à tous les autres. Elle a engagé dans l'après midi du 19 mars
2011, une vingtaine d'avions pour bombarder et faire arrêter la progression des
forces libyennes restées fidèles au colonel Kadhafi, vers la ville de Benghazi,
fief de la révolte. La France y a mis cette fois-ci la forme, pour assurer son
repositionnement diplomatique. Au sommet du 19 mars à Paris, elle invita des
pays arabes et la Ligue des pays arabes. Et le Qatar, premier de sa classe, qui
héberge le centre du commandement des forces US au Proche et Moyen Orient s'est
dit prêt à intervenir militairement. Le redéploiement diplomatique français
aura commencé à partir de la terre libyenne. Réussira t-il ?
Ecoutons pour
cela, ce que nous dit monsieur Rony Brauman, membre fondateur et ex-président
de médecins sans frontière :
«Quand le
discours des droits de l'homme est tenu par le pouvoir, c'est un discours de
combat, une façon de se poser dans une compétition et de se donner des
avantages par rapport aux autres».
Affirmation à
méditer, comme début de réponse à la question de présentation.
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Posté Le : 24/03/2011
Posté par : sofiane
Ecrit par : Ahmed Abdeslem Radek
Source : www.lequotidien-oran.com