Algérie

La diplomatie et ses couacs


Alors qu'elle devait être immédiate et fulgurante, la protestation officielle algérienne à la décision américaine de soumettre les Algériens à des mesures particulières de contrôle à l'entrée et à la sortie des aéroports US n'a eu lieu qu'hier, c'est-à-dire une dizaine de jours après. Et, au jour d'aujourd'hui, la France n'a pas été destinataire de la même protestation alors qu'elle a emboîté le pas aux Américains. Pourquoi cette valse-hésitation de notre diplomatie alors qu'elle avait plusieurs arguments ' de poids ' à faire valoir à ces deux nations occidentales : le terrorisme en Algérie est terrassé et ses jours sont comptés. Les quelques poches qui subsistent encore dans le pays n'ont pas une grande capacité de nuisance. Et puis, toutes ces dernières années, les hauts dirigeants américains et français ont souvent « félicité » l'Algérie pour son implication franche dans la lutte antiterroriste menée à l'échelle mondiale et régionale. Enfin, depuis 1995, aucun Algérien n'a été impliqué dans des attentats menés sur le sol des Etats occidentaux, même si, çà et là, ont été arrêtés quelques- uns dans des réseaux dormants. Ce n'est pas le premier couac de la diplomatie algérienne. Là où le bât blesse, c'est dans sa façon de fonctionner. De par la Constitution, c'est le chef de l'Etat qui définit et conduit la diplomatie, mais le président Bouteflika, jaloux à l'extrême de cette prérogative en a fait un exercice strictement personnel. De grands diplomates ont été mis à l'écart pour des raisons politiques ou subjectives alors qu'ils pouvaient apporter beaucoup. Ceux qui sont en poste, à la Centrale ou dans les ambassades, ont une marge de man'uvre réduite lorsqu'ils ne sont pas livrés à eux-mêmes. Il n'y a plus de grands noms au poste de ministre des Affaires étrangères et la diplomatie est quasiment exclue de tout débat public, notamment au sein de la société civile, débat en mesure de l'enrichir et de l'adapter à la complexité des relations internationales.La conséquence directe de l'appauvrissement de notre diplomatie est son absence de réactivité aux grands événements. Il a fallu plusieurs semaines pour que l'Algérie s'implique directement et publiquement dans l'affaire Hasseni et dans celle des moines de Tibhirine après les propos du général à la retraite Buchwalter et les sous-entendus agressifs du président Sarkozy. Toute réaction diplomatique perd de son efficacité ou devient douteuse lorsqu'elle n'est pas immédiate et franche. Reste que dans le dossier de la lutte antiterroriste menée par l'Algérie, aussi positif soit-il, il y a une large faille qui a été exploitée par les Américains et les Français, celle de la réconciliation nationale. En contrepartie d'une large immunité, un grand nombre de terroristes ont, depuis le début des années 2000, déposé les armes. C'est son seul acquis, car, parallèlement, des milliers de repentis ont réinvesti la société, ouvrant ainsi la voie à la reconstitution du tissu intégriste installé par l'ex-FIS défait quelque temps après par les services de sécurité et la résistance populaire. Or, c'est établi, le terrorisme grandit dans le giron de l'intégrisme dans sa version salafiste. En disant récemment qu'il fallait maintenant s'attaquer au terreau intégriste, Yazid Zerhouni, le ministre de l'Intérieur, ne faisait que traduire cette réalité sans se rendre compte qu'il venait de faire une sorte de constat d'échec de la réconciliation nationale et de donner du grain à moudre aux Américains et aux Français.
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