Elle est professeur de mathématiques dans un CEM d'une ville de l'extrême ouest du pays. Un profil rigoureux d'une mathématicienne conformiste éloignée de l'idée répandue que l'on se fait sur l'enseignant d'aujourd'hui. Son raisonnement, sa tenue et son langage rappellent avec bonheur la droiture et la prestance des instituteurs et institutrices aux uniformes sous forme de blouses grises ou blanches immaculées des temps passés lointains quand l'éducation, le savoir et la connaissance avaient toutes les raisons d'être.Elle est en grève depuis plus d'un mois à l'image de ses semblables et ses réclamations sont à mille lieues des revendications salariales pour cogner contre la désuétude d'une école algérienne orpheline de tout ce qui faisait d'elle la plus noble des institutions. Elle parle du déshonneur qui l'étrangle quand elle observe dans sa classe ses élèves trembloter et tressaillir de froid par un chauffage éternellement manquant. Elle n'arrive plus à étouffer sa colère parce qu'elle sait que les gamins qu'elle gère la rendent seule coupable d'une suprême trahison. Le listing des déraisons et des injustices ternissant l'école pour qu'elle dégage des senteurs d'égouts est sans fin.
Mais alors par quoi et par qui faudrait-il attendre un retour à une bénéfique conscience pour que l'école retrouve ses repères salvateurs quand tout le monde sait qu'ils sont la sève première pour une société '
L'école, cependant, n'est pas un électron libre détaché du reste des importants attributs qui régissent la vie d'une société. Bien qu'elle soit la poulie essentielle de sa marche, elle est interdépendante de tous les instruments qui impriment la nature des gouvernances. Elle obéit elle aussi au rythme et à la cadence, bonne ou mauvaise, auxquels se plient les populations. Il n'est pas un hasard que la majorité des enseignants soient au c?ur du large mouvement de colère et de contestation qui semble embraser le pays.
La professeur de mathématiques n'est finalement que la comptable anonyme et désemparée des gestes et faits de toutes les forces vives de la société algérienne à la recherche de nouveaux repères pour s'adapter aux pressions multiples que l'ère moderne impose de plus en plus au monde entier. Les sous-entendus relatifs aux nécessaires adéquates conditions de travail et les réclamations salariales ne sont que le condensé et le résumé d'une incapacité générale à se conformer à la dictature de la modernité que les progrès technologiques et le dit art de vivre ont gravée.
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Posté Le : 20/05/2021
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Abdou BENABBOU
Source : www.lequotidien-oran.com