Algérie

La démesure



Aujourd'hui débute une présidentielle qui fera date dans la jeune histoire de l'Algérie pluraliste, sa particularité majeure étant que le vainqueur est connu d'avance, en l'occurence le président de la République en exercice. En poste depuis une décennie, celui-ci a décidé, il y a deux années, de s'octroyer un troisième mandat, recourant pour cela à un procédé qui a fait couler beaucoup d'encre, le remaniement de la Constitution. Comme il fallait préserver la façade démocratique, cinq adversaires lui furent alignés, la plupart d'illustres inconnus du champ politique, les leaders charismatiques de l'opposition ayant, eux, refusé de se présenter, avançant l'argument que le scrutin du 9 avril 2009 ne sera qu'une mascarade électorale, ne méritant que le boycott. Ces cinq prétendants à la magistrature suprême ont accepté de jouer le rôle peu valorisant de lièvre, qui cependant pouvait les rendre éligibles à diverses compensations politiques et matérielles, directes ou indirectes.Une exception cependant pour Louisa Hanoune, déjà candidate à la présidentielle en 2004, femme de caractère, à la tête d'un parti d'inspiration trotskyste, une rareté dans le monde arabo-islamique.Le souci, chez les autorités, de la « forme démocratique » s'arrête là, car au niveau des moyens, pour faire campagne, c'est la démesure la plus totale : si les cinq candidats doivent se contenter de la dotation financière légale et de l'accès réglementaire aux médias lourds, le président-candidat, quant à lui, a déjà bénéficié d'une exceptionnelle « promotion » garantie par l'État et des généreux donateurs de la sphère privée : portraits géants un peu partout dans les cités, bains de foule dans les wilayates, discours retransmis dans leur intégralité par l'audiovisuel public, annonce d'une batterie de mesures sociales (hausse des salaires, effacement des dettes des agriculteurs, revalorisation des bourses des étudiants).Ajoutant leur voix aux chefs des trois partis de la coalition présidentielle et de leurs organisations satellites, les ministres de la République n'ont eu de cesse de mettre en exergue les « réalisations » de Bouteflika. De gros moyens ont été mis en 'uvre pour pousser le citoyen à voter le 9 avril, manière de battre en brèche les appels au boycott de l'opposition et effacer auprès de la population l'idée que, les jeux étant faits, il était inutile d'aller aux urnes.La hantise du pouvoir politique réside précisément à ce niveau : dans une possible désertion des bureaux de vote, le jour J.Ce sera la gifle de trop, après celle de 1999 lorsque l'ensemble des candidats ont dû se retirer la veille du scrutin en signe de protestation contre le traitement privilégié réservé à Bouteflika et celle de 2004 quand le pouvoir a dû recourir à « la justice de nuit » et au « coup d'Etat scientifique » pour fragiliser Benflis, principal adversaire du président-candidat.


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