La culture du flou artistique

On excelle dans l'art de la désorganisation. Tout, et partout, le même constat rythme la vie des Algériens : un manque d'organisation devenu, par la force des choses, un mode de vie. La masse est presque envoûtée par l'anarchie, et les choses ne marchent bien, dirait-on, qu'au niveau des marchés anarchiques où la foule surexcitée déambule dans la joie entre des étals qui occupent les passages, telles des embûches. On se plaît dans ces lieux qui n'obéissent à aucune règle, ni aucune réglementation.C'est là un échantillon de cette allergie chronique collective qui se manifeste dans tout environnement « clean », où la visibilité n'est pas trouble. Le mal d'organisation dont souffre le peuple remonte aux origines du temps. Toute une culture. Et, en parlant de culture, la manifestation « Constantine capitale de la culture arabe » s'achève comme elle a commencé, dans une organisation chaotique. A quelques jours de la clôture, le programme n'est pas encore totalement fignolé. Au niveau de la wilaya, on se plie en quatre pour mettre en place les scènes de cette clôture d'un évènement qu'on a grossi comme une grenouille. On n'aurait pas dû faire tant de bruits pour cet évènement, et le laisser se dérouler naturellement. En Europe, chaque année une ville est consacrée capitale de la culture européenne sans qu'on entende trop parler ni de la ville, ni de l'évènement. Pourquoi on chercherait à faire du tape-à-l'?il, en dépensant énormément d'argent dans le vide, alors que le moment est plutôt à l'austérité. Enfin, l'un dans l'autre, Constantine est ville invitée d'honneur du Salon du Livre qui sera inauguré demain à Paris (17 au 20 mars). Jusqu'aux derniers moments, Constantine n'a pas présenté un programme qui puisse faire « rougir les visages ». A Paris, on a commencé à donner des signes d'inquiétude, et des questions ont commencé à tomber, « qu'est-ce que vous comptez présenter lors de cet évènement en tant que ville invitée d'honneur ' », a-t-on insisté à quelques jours de l'ouverture du Salon auprès des concernés locaux. Des tables rondes, voilà ce qu'on envisage d'organiser au Salon de Paris. Voilà ce qui arrive quand on n'est pas bien organisé.Ce maigre programme a contraint la partie française à se mêler de l'organisation et proposer ses services, les services de l'Institut français d'Algérie qu'on a associé à la programmation des différentes rencontres sur le stand de Constantine, ainsi que l'Institut français (Paris), pour donner un peu de tonus à cette présence constantinoise dans ce vaste Salon du Livre. On apprend que faute d'une bonne organisation, toujours, certains représentants constantinois n'ont pu obtenir leurs visas dans le délai. Lamentable.Quant aux gens sélectionnés pour faire partie de la délégation qui représentera Constantine à cet évènement du salon du Livre de Paris, mieux vaut ne pas en parler. C'est pour cela, peut-être, qu'on adore vivre et travailler dans une atmosphère désordonnée, on n'y voit que du flou…artistique.