Algérie

La culture, ce besoin actuel'



Dimanche dernier, la 4e édition du Grand Prix Assia Djebar faisait son cérémonial. Les lauréats ont reçu leur prix, assorti d'une récompense financière. Bien, très bien même. Reste que la culture et ses appendices, littéraires ou autres, demeure recroquevillée dans un espace officiel, souvent inaccessible à n'importe qui. Ce lambda, la société en somme, fut au c?ur des romans, nouvelles, poésies et essais d'Assia Djebar, nom de plume de Fatima-Zohra Imalayène. Pour évoquer des thèmes collectifs, elle avait à plusieurs reprises dépeint la situation de sa génération, confrontée aux valeurs de deux communautés et de deux cultures. Mais elle reste une femme de lettres algérienne d'expression française. Son immense culture lui vaudra d'être élue à l'Académie française, d'acquérir le doctorat honoris causa des universités de Vienne en Autriche, de Concordia à Montréal et d'Osnabrück en Allemagne. Tout ça n'est pas le fruit du hasard. Elle avait la culture chevillée au corps. Et quand, en 1996, dans Le Blanc de l'Algérie, elle s'insurge contre l'obscurantisme et la terreur meurtrière en tentant de rendre compréhensible l'origine du mal, on pense immanquablement à cette culture qui gagnerait à sortir des espaces clos, réservés à des initiés. Et, en allant demander les noms des lauréats du Prix Assia Djebar, quelques jours après la cérémonie, l'on est édifié. Rares seront ceux qui les citeront ou sauront quels ouvrages ont été récompensés. Quant aux lauréats de la 1re, 2e ou 3e édition, autant chercher une aiguille dans une botte de foin. Pourtant, notre société a grandement besoin de communication, de culture populaire. Cette culture cassera pas mal de tabous, ces maux qui nourrissent les préjugés négatifs. En inventant des approches sociétales et éducatives généreuses, en invitant les autres à la connaissance, au partage et aux échanges fructueux dans la convivialité, cette culture saura être le ciment dont on a besoin aujourd'hui. En fait, la culture est une réinterprétation positive des choses. Sous d'autres cieux, nombreux sont les artistes, les créateurs, les intermittents du spectacle, les bénévoles et les amateurs des beaux-arts en général qui s'investissent au quotidien. Ils sacrifient même leur temps libre pour le fait culturel à partager, à vivre en commun en ces périodes de fête. Ils n'ambitionnent rien de moins que de réinventer un monde moins pesant, supportable et surtout plus agréable. On en est loin. La montée du pessimisme étreint le c?ur du citoyen lambda, désorienté qu'il est par une actualité remplie de boîtes à idée politique, économique ou sociétale. Tremplin de fluctuations, d'états d'âme et de ressentis négatifs, ces boîtes sont semblables à la proverbiale boite de Pandore, issue de la mythologie gréco-romaine. Elle contenait tous les malheurs du monde : la vanité, la tromperie, l'impudeur, le narcissisme, la maladie, la souffrance, le crime etc. Son couvercle soulevé, tous ces maux s'en échappèrent, seule l'espérance y demeura. Eh bien, cette espérance se nomme à nos yeux la culture ! Elle ne devrait, en aucun cas, être confinée à des cérémonies officielles. Entre terrains vagues asséchés ou laissés en jachère, l'air populaire lui redonnera de l'ampleur. Ça sera alors un vivier d'où sortiront des talents méconnus, des compétences enfouies et, pourquoi pas, des lumières incandescentes à l'image d'Assia Djebar ou de Tahar Djaout?


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