Algérie

La corruption ne cesse de ravager les institutions publiques Le fléau est considéré comme un facteur d'instabilité


La lutte contre la corruption nécessite la convergence des efforts de toute la société civile algérienne pour s'opposer à un fléau qui menace réellement la cohésion sociale et la souveraineté nationale.
Là est le point principal sur lequel se sont mis d'accord des participants à une conférence-débat tenue hier à Alger.
Les responsables de l'Association nationale de lutte contre la corruption (ANLC), dont l'agrément a été refusé par le ministère de l'Intérieur, se sont exprimés hier à Alger. Ils intervenaient dans le cadre d'une rencontre organisée par le Mouvement de la jeunesse indépendante pour le changement (MJIC).
Le secrétaire général adjoint de l'ANLC, Halim Feddal, a indiqué qu'«en Algérie, chaque projet cache une man'uvre de corruption». «A titre d'exemple, le système nomme des personnes incompétentes aux postes de responsabilité pour les manipuler plus facilement. D'où la dépénalisation de l'acte de gestion», cite le militant. Il ajoute, toujours à titre illustratif, que «la corruption dans le milieu du sport consiste à opérer un blanchiment d'argent par le biais d'achat de joueurs à des milliards de centimes. En plus, les privatisations de clubs se font avec les présidents rentiers de la subvention. Ils sont choisis parce qu'ils sont fidèles au régime».
De son côté, le président de l'ANLC, Mustapha Atoui, pense que «tant que le régime actuel continue à gouverner, la corruption demeurera, car elle est sa matrice pour se pérenniser». Il estime dans le même sillage qu'«outre le manque d'indépendance de la justice, il n'y a aucune prérogative pour permettre à la société civile de participer à la lutte contre la corruption». Atoui ajoute que «la corruption se pratique sous diverses formes, comme l'achat de la paix sociale à travers les augmentations de salaires ou l'octroi de crédits Ansej».
Et de poursuivre : «Des responsables étatiques ne sont jamais convoqués alors qu'ils sont mis en cause dans des affaires de corruption, comme l'ex-ministre de l'Energie, Chakib Khelil, l'ex-président de l'APN, Amar Saïdani (affaire de détournement de 3000 milliards de centimes), l'ex-ministre de l'Agriculture, puis de la Santé, Saïd Barkat, ainsi que l'actuel ministre des Travaux publics Amar Ghoul.» Le plus aberrant pour Atoui est «la nomination à la tête d'un organe de prévention contre la corruption d'un ex-ambassadeur soupçonné de corruption et dont la fille et le gendre sont également cités dans une même affaire».
Dans cet organe, poursuit-il, «il n'y a aucun représentant d'association, il y a uniquement des cadres et des magistrats nommés par leur tutelle».
Le secrétaire général de l'ANLC, Moumen Khelil, explique pour sa part que «la lutte contre la corruption n'est pas incluse dans le dispositif des droits de l'homme de l'ONU mais dans le cadre de la lutte contre la criminalité et dans les paramètres de bonne gouvernance». Pour lui, «la corruption est devenue un obstacle pour l'accès à la démocratie et aux droits». «Le niveau de corruption politique est tellement élevé qu'il représente aujourd'hui un danger pour la souveraineté nationale», analyse-t-il, tout en soulignant que «le pouvoir a fabriqué une élite qui s'intéresse à l'argent».
«La même élite, juge-t-il, a oublié son devoir de réflexion et de production de projets au profit de la société.» Au cours du débat, l'ancien président de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l'homme (LADDH) et actuel député d'Alger (FFS), Mostefa Bouchachi, estime que «si la corruption continue à ce rythme, le pays ira tout droit vers la catastrophe d'ici 5 ans». «Dans la réalité, indique Bouchachi, les pions sont condamnés et les barons ne sont pas inquiétés.» Il explique que «le procureur de la République ne peut jamais poursuivre un ministre ou une personnalité, car il attend les instructions du ministre de la Justice, qui, lui-même, attend les injonctions données par téléphone». Mostefa Bouchachi considère qu'«il ne peut y avoir de lutte contre la corruption sans réelle démocratie».
Quant à Salah Dabouz, président du bureau de la LADDH à Alger, «les exemples de dénonciateurs de corruption réprimés et tués dans l'âme sont légion dans notre pays». «L'inspecteur régional de la Banque extérieure d'Algérie en Oranie, Ahmed Benramdane, qui a relevé un trou de presque 200 milliards de centimes, a été licencié et poursuivi en justice par sa propre banque.» «Depuis sept ans, il vit dans une misère terrible. Son tort, dénoncer la corruption et les dépassements», témoigne l'avocat.
Enfin, un citoyen présent à la conférence considère que «le régime algérien achète le silence des puissances occidentales, à l'image du prêt de 5 milliards de dollars accordé au FMI, ou l'éventuelle permission donnée aux multinationales américaines et françaises pour exploiter le gaz de schiste».
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