Algérie

La Commune, un parcours et des histoires



Une prouesse logistique. Une signification politique. La Commune était à l'honneur national jeudi dernier. Un long parcours, un couloir macabre, un espoir et beaucoup d'histoires.A regarder les jeunes élus qui y étaient ; l'on sourit à l'espoir qui renait. Réunir tous les maires du pays, fraichement élus et nouvellement installés devait obéir à une stratégie de rassemblement et de mobilisation. La journée est commémorative, la représentativité est plurielle et diversifiée. Devant l'appel du pays, l'on sentait voir tomber toutes les idéologies et leurs multiples tendances. La partisannerie est mise de coté le temps d'un temps donné à l'hymne national ou au devoir d'hommage à rendre à ces personnes qui ont fait la Commune, l'ont vu naitre, l'on bercée au gré des instabilités et des drames et ont tissé ainsi son fil historique.
L'évènement qui s'est présenté le jeudi passé avait d'innombrables sens. En plus des messages qu'il devait transmettre à la mémoire collective afin que nul n'oublie le sacrifice des uns et le service rendu des autres ; il avait grandiosement à exalter l'avènement de la Commune algérienne.
Une Commune venait de naitre
Les affaires sociales durant la période coloniale n'étaient en fait qu'une affaire à connotation politique. Les indigènes et les autochtones n'avaient nullement de statut de citoyen entier. Sujets d'un empire colonial, ils n'étaient là que par les travaux forcés, de terrassement, de tranchées, de ponts et de chaussée. Le tout au bénéficie du confort recherché par l'envahisseur. La révolution a petit à petit fait le lit de la libération et la Commune au sens national faisait déjà apparaitre ses prémices et ses embryons.
Celle-ci avait connu sans doute plusieurs péripéties. Des phases importantes dans son évolution ont sillonné son long et cahoteux parcours. Elle naissait, dans sa couche purement algérienne le 18 janvier 1967. Depuis le monde municipal a changé selon la transformation sociétale. L'urne est devenue transparente et en verre et tient lieu de celle ésotérique et en bois.
Le premier Code communal de l'Algérie indépendante a été promulgué par l'Ordonnance 67-24 du 18 janvier 1967. Plus qu'un territoire, un nom et une date de naissance, la Commune est un idéal interminable. Cinquante et un ans après le chemin continue. Ce texte fondamental était venu à point nommé organiser la toute nouvelle Commune algérienne. La considérant telle une « unité insérée dans l'Etat », le Code en question tenait ainsi à asseoir définitivement la Commune dans son cadre naturel, dans un pays totalement souverain et libéré d'une organisation territoriale inégale et partiale. Expression sans ambages de l'exercice de l'acte politique et citoyen, la Commune a été de tout temps le socle essentiel de l'organisation sociopolitique du pays. Elle est à tous les rendez-vous nationaux. Si elle est le réceptacle final où viennent s'éclore et s'appliquer les dispositions législatives et réglementaires tous secteurs confondus, c'est qu'elle est un organe imprescriptible dans le démembrement de l'Etat et un cadre privilégié de démocratie, de concertation et de partage. C'est à la Commune qu'échoit la citoyenneté et c'est en elle que s'éclot la démocratie locale.
Une exposition du calque au clic
Il y avait en parallèle du rassemblement, un espace qui contenait cette Commune en quelques photos, d'anciens objets, des coupures de presse, des archives. L'exposition qui se déclinera en plusieurs distances en suivant un parcours logique qui prenait en compte la promulgation du code communal, l'évolution de la Commune en 60 ans en mettant l'accent sur la destruction pendant les années 90 et la reconstruction suite à la réconciliation nationale. Le fait saillant de l'expo était ce mur de la mort. Cette zone qui racontait en silence se vouant à la méditation, la tragédie décennale vécue par le sang et dans la chair tant par le citoyen que par ses représentants. L'émotion était telle que les yeux de ceux disparus vous fixent et semblent vous suggérer de continuer à lutter contre les affres de l'oubli.
De l'ancien mobilier était présenté là, donnant l'impression selon les périodes que l'on se trouve par-devant un maire ou un autre conseiller municipal. L'agencement tellement chronologique que l'histoire qu'il vous raconte est pleine d'émotions, de sensations et de méditation. A voir ces machines à écrire, ces appareils de dactylographie, ces grands registres à la belle transcription manuscrite qui ressemble beaucoup plus à un dessin qu'à une simple écriture, l'on sent l'attention y déployée. Le ministère de l'intérieur étant l'organisateur a su avec brio ménager les choses historiques avec l'empreinte sensationnelle que visait l'exposition. La ronéo des années de braise juxtaposée aux plus récents logiciels donnait l'image du saut fait du calque au clic. De la Commune des registres et de la grosse paperasserie à celle du guichet électronique et des documents biométriques, le pas est franchi et demeure à parfaire, soutenir et encourager. Un musée national de la Commune s'annonce. Ce sera le geste salutaire et une autre prouesse du Ministre pour la sauvegarde de la mémoire et des sacrifices consentis.
La Commune électronique
Ce qui dans le temps n'était qu'un projet commence à se faire sortir au grand jour. La Commune, cette entité d'actes et de leurs extraits, de plumes et de stylos, de fiches familiales, de certificats multiples, de permis de construire ou de démolir ,d'autorisations de voirie est en phase de faire rentrer le tout dans une unité centralisée où l'élément humain n'aura plus d'humeur ou d'avis personnel. Elle n'est plus un comptoir ou une salle d'attente. C'est cette tendance de vouloir ramener tout à un système d'information qui permettra la synchronisation de l'action des services de l'Etat et de ses établissements publics pour faciliter la réutilisation la plus large possible de l'information et de la procédure publiques. L'effort fourni ces derniers temps en termes d'informatisation de tout ce qui a trait à la vie administrative du citoyen n'est pas un effort ordinaire. Certes le retard accusé dans le domaine au lieu de ralentir la cadence, l'avait bel et bien booster privilégiant tantôt l'audace réfléchie tantôt l'usage naturel des choses. La commune avance et va vers le domicile de tout un chacun. Cependant l'outil resterait insuffisant si le génie et la volonté venaient à y manquer. Il appartient aux responsables communaux d'élire le savoir comme véritable partenaire et l'efficacité comme ultime objectif. Le maire outre qu'il soit un Président, il doit s'astreindre à devenir le manager général de son administration locale.
Du maire au Président de l'APC
Le maire par définition politique est un consensus populaire. Résultat d'une opération électorale d'addition de voix, il n'est pas le produit de l'administration. C'est une encaisse de l'urne. Il n'est pas un fonctionnaire banal et anodin qu'un acte pourvu d'autorité administrative arrive à le nommer selon une forme procédurale suite à un concours externe ni le dégommer selon une autre. Il est un partisan. Il émane, en principe d'une volonté populaire. C'est au parti, le sien à qui incombe le devoir d'assurer la production. L'administration ne tient pas lieu que d'un certificat d'authentification, voire de label. Si sur le plan politique toute personne portée sur une liste électorale était supposée remplir les conditions tacites de performance politique, il en serait autrement, la pratique le démontre, quand ce candidat devient élu et de surcroît chef d'un exécutif communal. La partie est pénible plus que ne l'était la campagne électorale.
Quel que soit l'intitulé sous lequel il agit, ce personnage élu et public doit offrir une écoute attentive aux nombreuses doléances des citoyens. Comme tous les maires qui étaient présents sont nouvellement élus, il leur faudrait accomplir en vue d'établir un diagnostic qui sans doute leur permettra, afin de parer aux lacunes ; de mobiliser les troupes, de créer un espace de partenariat, de rameuter les alliés et de réduire les réticences. Ceci ne serait obtenable que grâce à des approches tendant d'abord à améliorer le statut matériel de l'employé communal, cheville ouvrière du plan de charge, le renforcement physique des capacités d'action du parc, une veille attentionnelle d'assiduité et de ponctualité, une disponibilité permanente et enfin un engagement passionnel. Faire adhérer tout le monde, d'entre élus, administrations, organismes, associations, tutelle et citoyens autour d'un défi : le bien être social est le principal challenge de tout chef d'exécutif communal. La préoccupation, disons classique d'une Commune se confine en rendant plus agréable et attractif le cadre de vie citoyen.
Malheureusement il est de ces maires qui n'ont pu endosser avec capacité la fonction de Président d'assemblée. Ils étaient juste des gardiens de bureaux où certains se prenaient pour des Directeurs généraux, alors qu'à la limite ils n'étaient que des correspondants à une tutelle parfois mal en point. On les voit, certains d'ente eux se faire prendre otages de leur idéologie partisane ou du clan les ayant mis en orbite de liste électorale. Ainsi l'histoire de chaque ville aura à retenir le palmarès de ses élus. Elle dira qui d'entre eux ne savait que parloter ou ajuster narcissiquement ses cravates et qui parmi eux trébuchait nuit et jour avec sueur et abnégation. Comme il y a de ces élus municipaux qui n'aspirent qu'à une place à confort et lorgnent la sacrée indemnité qui a en fait pervertit la fonction bénévole et gratuite du mandat électorale.
18 janvier journée nationale de la Commune
Cette journée est l'?uvre de Bedoui, ministre de l'intérieur qui depuis son installation avait voulu la consigner dans les annales de l'administration territoriale. Elle est une couronne de lauriers à arborer sur chaque tombe d'un disparu, sur chaque tête d'un retraité, sur chaque dossier d'un actif encore généreux et travailleur au service de tous. Ce n'est qu'une reconnaissance envers celles et ceux qui ont façonné dès l'indépendance cette infrastructure sociopolitique de base. L'arbre comme le commerçant, la tomate, la mère, le père, la fille, la terre, l'amour ont eu tous l'honneur d'avoir à se fêter lors d'une journée. Maintenant c'est au tour de la Commune de faire dorénavant chaque 18 janvier sa fête et créer ainsi la gaieté dans tous les monts et piedmonts de chaque agglomération urbaine ou rurale et sous n'importe quelle enseigne politique. L'emblème national unique et exclusif trônera avec ses glorieuses oriflammes sur tous les frontons de mairies et de leurs antennes administratives. Le Président de la république en décrétant cette date journée nationale n'a pas omis dans son message d'inciter les élus à plus d'initiative et d'amour de la patrie et plus de passion et d'engagement dans leur responsabilité et de faire de cette journée outre une fête ; une halte d'évaluation et de bilan.
En somme la finalité de l'institutionnalisation de cette journée ne se confine pas uniquement dans des p'tits fours et des gâteaux secs ou un bout de papier cadré en dorure à remettre à un ancien maire. Elle vise à atteindre un niveau non seulement d'hommage mais aussi un nivellement de mentalité gestionnelle et une mise à niveau harmonieuse entre l'innovation et l'exécution. Ainsi ce 18 janvier est maintenant sacralisé. Les pouvoirs publics viennent par cette consécration d'ériger en obligation pour la Commune de revoir chaque année sa copie et se souvenir de son parcours et ses différentes histoires. Elle a des histoires d'instabilité et de drame, elle en a aussi celles de la joie et de la gloire. Rendez-vous au 18 janvier 2019 inchallah. D'ici là personne ne doit dormir sur l'oreiller de cet événement pour se réveiller une année plutard. La commune enfin n'est pas une journée, elle est le jour et la nuit. Le temps.


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