Le débat Ouyahia-patrons a permis de répondre à pas mal de questions, mais en a suscité autant sur la stratégie de communication du gouvernement.Le format choisi par le FCE pour son université d'été répond à la tendance en vogue pour les forums économiques. Déjà testée par le passé, la formule, importée des Etats-Unis, plaît en ce sens qu'elle permet aux professionnels d'échanger des points de vue, poser des questions, commenter un fait de l'actualité ou tout simplement interpeller les pouvoirs publics. Bref, cette manière de procéder laisse une marge de liberté aux intervenants, apportant de la spontanéité aux débats. C'est d'ailleurs ce qui s'est passé, hier, dans la grande salle qui a vu défiler des chefs d'entreprise, «heureux» de converser, sans protocole, avec le Premier ministre.
Cela au plan de la forme. Sur le fond, cette «expérience» de communication à laquelle s'est prêté le responsable de l'Exécutif, avec visiblement une certaine satisfaction, apporte un «souffle nouveau», dans la doctrine du gouvernement en matière de diffusion de ses messages au public. Il faut dire que jusque-là le gouvernement a habitué l'opinion nationale à des formats autrement plus «officiels». Ce que se sont dit, hier, gouvernement et patrons, restait dans le secret du huis clos. Les Algériens avaient droit à un communiqué final, résumé et commenté par les médias, avec le risque de quelques «tripatouillages» imposés par les lignes éditoriales. Il reste qu'en tout état de cause, il est toujours difficile aux citoyens de se faire sa propre idée de la situation économique du pays. Le prisme, parfois déformant des médias, n'était pas de mise, dans la salle de conférences de l'université d'été du FCE. Cette manière de transmettre des informations aux citoyens ne peut se substituer totalement aux pratiques anciennes, mais elle apporte un élément d'appréciation supplémentaire aux Algériens pour qu'ils puissent s'approprier une partie de l'information sans avoir besoin d'intermédiaire. Il est entendu que tout le monde n'est pas censé tout retenir de ce qui s'est dit, hier à la Safex, mais l'opinion publique peut nuancer sa façon de voir les rapports entre patronat et gouvernement ou encore, corriger quelques fausses idées glanées ici et là.
Il y a également la dimension intellectuelle, mais également humaine qui a son importance dans ce genre de débats. Que les Algériens découvrent leur Premier ministre dans la spontanéité d'un débat retransmis en direct à la télévision et surtout sur les réseaux sociaux, constitue un facteur important de rapprochement entre le pouvoir et la société. Il n'est, certes, pas question de comparer cela aux bains de foule ou autres manifestations populaires, mais écouter son Premier ministre répondre du tac au tac et converser avec des chefs d'entreprise, le ramène à la condition du responsable qui écoute et argumente. Cette nouvelle forme de communication est d'autant plus profitable pour le politique qu'est Ahmed Ouyahia que ces interventions vont voyager dans le cyberespace, grâce aux multitudes de vidéos qui en seront tirées et les milliers de commentaires qu'elles susciteront sur les réseaux sociaux. C'est donc doublement intéressant pour le gouvernement qui en une seule apparition de quelques heures, s'assurer une «publicité politique» qui tournera en boucle sur le Net durant plusieurs semaines. L'opération, qui n'est pas nouvelle en soi, car pratiquée par la quasi-totalité des responsables politiques occidentaux, inaugure peut-être un style différent dans la communication institutionnelle. Il faut dire que l'instruction du président de la République à l'adresse du gouvernement dans le sens d'une communication dynamique semble avoir trouvé sa voie, à travers cette «performance» du Premier ministre. D'autres initiatives du genre, même avec des formats différents, sont-elles envisagées par le Premier ministère' Le succès de l'expérience de l'université d'été du FCE, aura-t-il un effet dynamisant de la communication institutionnelle' L'Exécutif ira-t-il jusqu'à nommer un porte-parole du gouvernement pour diffuser en temps et en heure, les informations sur ses activités, en y mettant la forme pour la faire parvenir jusqu'aux citoyens' Il faut dire que le débat Ouyahia-patrons a permis de répondre à pas mal de questions d'ordre économique, mais en a suscité autant, pour ce qui concerne la stratégie de communication du gouvernement.
Posté Le : 19/10/2017
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Saïd BOUCETTA
Source : www.lexpressiondz.com