Algérie

La colonisation : un crime contre l'humanité



La colonisation : un crime contre l'humanité
Brahim Younessi;
Il faut toujours que le député parisien, Bernard Debré, fasse parler de lui. Il a un désir hypertrophié et maladif d'exister médiatiquement. Cet homme, fils de Michel Debré que le peuple algérien n'a pas oublié pour sa politique colonialiste, fut ministre de la Coopération du gouvernement Edouard Balladur en tout et pour tout pendant cinq mois et six jours, du 12 décembre 1994 au 18 mai 1995. Son soutien au Premier ministre de l'époque, candidat à la présidentielle, aujourd'hui empêtré dans le scandale des rétro commissions de l'affaire des sous-marins du Pakistan, lui ferme le chemin qui devait, en principe, le mener, pour la seconde fois, au gouvernement. Cet échec le marque psychologiquement de façon indélébile.
L'homme est d'autant plus aigri que son faux jumeau, Jean Louis Debré jugé moins brillant que lui, devint ministre de l'Intérieur sous la présidence de Jacques Chirac qui, remuant le couteau dans la plaie, le nomme en 2002 à la tête du Conseil constitutionnel. L'élection du professeur de médecine, Moncef Marzouki, à la présidence de la République tunisienne a attisé le ressentiment du simple député d'une circonscription parisienne Bernard Debré, lui-même professeur d'Urologie, qui se représentait à l'Elysée en lieu et place de Nicolas Sarkozy, en écrivant son indécente et inqualifiable lettre ouverte au chef d'un Etat dont le pays a subi l'asservissement français durant trois quarts de siècle. Michel Debré, le père de Bernard et de Jean Louis, est Premier ministre lorsque la guerre qui a fait entre mille et deux mille morts éclate en juillet 1961 à propos de la base navale de Bizerte qu'occupaient encore les troupes françaises.
Moncef Marzouki a, sans doute, pris un ton « bourguibien » pour exprimer sa volonté de mettre fin au néocolonialisme et à la Françafrique, et pour demander à la classe politique française de ne point utiliser la carte de l'islamophobie lors des prochaines élections présidentielle et législatives. Une phrase, cette phrase provoque chez Bernard Debré un choc nerveux qui lui fait prendre sa plume pour calmer son obsession et son dépit. Il lui fallait aussi parler vite et occuper les médias avant tout le monde dans l'affaire new yorkaise de Dominique Strauss Kahn qu'il traite de fausse valeur et d'escroc intellectuel. Bernard Debré a un besoin irrépressible de se montrer meilleur que les autres, professionnellement, intellectuellement et moralement.
De la même manière, une lettre ouverte, il écrit à Rachida Dati qu'il qualifie de « petite fille gâtée » la sommant « devant [ses] caprices, de s'incliner ou disparaître. » Cet héritier politique pousse le bouchon, comme à son habitude, trop loin en accusant l'ancienne Garde des Sceaux, d'avoir « été nommé, purement et simplement » et lui demande « de conserver un minimum de gratitude. » Ce langage, le député Bernard Debré ne l'aurait pas employé, dans la même situation, à l'égard de Nadine Morano, Chantal Jouano, Valérie Pécresse ou Christine Lagarde. Et l'ironie rejoint son comble lorsqu'il lui lance « ton attachement, qui n'a d'égal que ton ego (c'est bien peu dire), est devenu insupportable, s'il n'était pathétique. » Ce dernier propos résume l'homme qui livre une guerre des ego à laquelle le président de la République tunisienne est étranger. Il a une révolution à mener à bon port, un Etat à organiser, un peuple à défendre et un pays à reconstruire dans la cohésion de la nation tunisienne.
Moncef Marzouki est en train de livrer un combat avec l'Histoire, il n'a pas le temps à ces joutes subalternes. Bernard Debré est certainement le dernier à pouvoir disculper, comme il tente de le faire dans son adresse au chef de l'Etat tunisien qui sait de quoi il parle, le colonialisme de ses crimes et de ses méfaits aussi bien au Maroc, en Tunisie qu'en Algérie dont le peuple a connu les enfummades et les fours à chaux, le Code de l'Indigénat et la guillotine. Durant la seule période où Michel Debré, le père de Bernard, était le chef du gouvernement quatre-vingt nationalistes algériens ont eu la tête tranchée. Et le 17 octobre 1961, en plein Paris, des centaines d'Algériens sont tués. Ces faits, ces crimes massifs que l'on minimise en France sont un génocide commis sur les peuples colonisés.


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