Algérie

La colonie Suisse de Sétif



La colonie Suisse de Sétif
Mais que diable pouvait avoir été la Compagnie Genevoise des Colonies suisses ? Chacun sait que l'Helvétie ne possédait aucune terre coloniale ni aucun autre territoire sous sa domination. Et pourtant, l'histoire est réelle et remonte à Napoléon III.
Vers 1850, l'Algérie était en fin de conquête coloniale et en cours d'établissement d'une organisation civile. En 1852, deux honorables banquiers genevois écrivirent au ministre de la guerre français afin de savoir si l'envoi de colons suisses pouvait contribuer au développement de l'économie locale et à tout le moins consacrer des moyens d'existence à des gens actifs mais ne pouvant prétendre en Suisse à une place de travail honorable (" Nous avons pensé, Monsieur le Ministre, que le gouvernement français serait peut-être disposé à une colonisation Suisse en Algérie et, en conséquence, nous prenons la liberté de vous faire cette ouverture, en vous priant de vouloir bien nous faire connaître si vous trouveriez en effet convenance à consacrer un vaste territoire salubre fertile et non exposé aux attaques des Arabes, à une colonisation de ce genre à la tête de laquelle nous sommes disposés placer en Suisse, et qui nous paraît être une œuvre essentiellement utile… ").

Les deux banquiers sollicitèrent une immense concession de 500 000 hectares et, par recherches et enquêtes, situèrent pour le mieux ce territoire dans la région de Sétif.
L'affaire fut, si l'on peut dire, rondement menée et l'idée dut convenir à Napoléon III qui n'avait sans doute pas gardé un mauvais souvenir de son passage en Suisse, où il fut en 1830 engagé volontaire dans l'armée.

Le 26 avril 1853 un décret impérial accordait une concession de 20 000 hectares dans la région de Sétif. Grosso modo, le but était de créer une dizaine de village de chacun 50 maisons et d'y installer des émigrés suisses pour cultiver le sol et développer l'infrastructure économique de la région.
En septembre 1853 fut créée la Compagnie genevoise des colonies suisses de Sétif qui " hébergea " la concession. Le mois suivant, les premiers immigrants, tous vaudois, arrivent dans le premier village et prennent possession du domaine encore mal installé. Cinq arrivées de nouveaux colons s'échelonnent jusqu'en mars 1854.

A cette époque, la Compagnie genevoise emploie Henri Dunant qui, au début très optimiste, finit par constater le peu de succès de l'opération. En effet, dès les débuts, un certain nombre de malheurs s'abattent sur la colonie : une épidémie de choléra et de typhoïde, aggravée par des inondations, décime les premiers arrivants. La chaleur est éprouvante durant l'été et beaucoup abandonnent. D'autant que les relations avec la population locale se dégradent et que la Compagnie met parfois trop facilement la responsabilité des maux sur le dos de ses colons.

La situation évolue : Une campagne de presse se déchaîne en Suisse contre la compagnie. Celle-ci fait venir des colons savoyards et français mais n'arrivera pas à coloniser ses terres. Elle doit les confier aux Algériens à des prix bien plus élevés que ceux pratiqués par l'administration française. Des différends opposent la Compagnie et le gouvernement français. Il apparaît surtout que la Compagnie a travaillé en vase clos, ne répercutant pas ses bénéfices sur l'activité locale et rapatriant purement ceux-ci à Genève

La Compagnie disparaîtra en 1956, quelques années avant l'indépendance de l'Algérie et ses terres seront redistribuées aux populations locales. L'histoire de la Compagnie genevoise des colonies suisses de Sétif est le seul cas concret de participation suisse active à un acte de développement économique dans le cadre de projets coloniaux. Dans une certaine mesure, des villes et villages suisses y furent impliqués, mais il est certain que jamais le gouvernement de la Confédération ne fut directement impliqué dans cette affaire. D'avisés financiers genevois se contentèrent de prendre la place et d'en tirer eux aussi un profit certain, malgré les difficultés rencontrées.


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