Algérie

La cité Tihagouine ou le désastre urbain



Attribuée sans viabilisation depuis 1994, une bonne partie des 350 lotissements publics dudit quartier est le parfait exemple de l'anarchie urbaine qui affecte profondément la capitale de l'Ahaggar.Le silence observé par les autorités locales autour du problème de la prise en charge des problèmes de développement soulevés dans la cité Tihagouine, sise à quelques encablures de la ville de Tamanrasset, ravive la colère des habitants qui se disent victimes "de marginalisation et d'exclusion". Attribuée sans viabilisation depuis 1994, une bonne partie des 350 lotissements publics dudit quartier est le parfait exemple de l'anarchie urbaine qui affecte profondément la capitale de l'Ahaggar.
C'est l'avis même des propriétaires qui se disent victimes d'une arnaque portant commercialisation des lots de terrain sans réseau d'assainissement ni ceux de gaz et d'AEP. Il s'agit des lots jouxtant le lycée Amlal-Ag Bilal et le cimetière de la cité où l'on a remarqué l'érection d'un pâté de bâtisses qui ne répond à aucune norme urbaine.
"On ne parle pas d'un centre rural ou encore d'une zone enclavée, mais de l'un des quartiers huppés de la ville de Tamanrasset", s'indigne Boudjemâa Hamdi, représentant des habitants, qui a tenu à préciser que ce problème a été signalé à maintes reprises aux autorités locales. Depuis septembre 2015, plusieurs correspondances, cosignées par tous les propriétaires lésés, ont été envoyées aux services de la wilaya.
"Nos lettres de doléances finissent vraisemblablement dans la corbeille de nos responsables", regrette M. Hamdi, en dénombrant 12 correspondances adressées à qui de droit sans parvenir à résoudre ce problème qui serait dû, en partie, aux constructions illicites érigées sur les parcelles destinées aux réseaux divers et sur la voie principale permettant d'accéder aux lotissements concernés.
Otages du béton illicite, nombre d'habitants se trouvent ainsi condamnés, selon M. Hamdi qui lance : "La responsabilité de cette excroissance urbaine incombe exclusivement à l'agence foncière qui, en sa qualité d'aménageur public, aura ouvert dans la hâte des lotissements défectueux en mettant en vente des lots à bâtir sans aménagement préalable."
Les terrains puisés du patrimoine des domaines publics sont ainsi livrés "au désordre et à une excroissance" qui en disent long sur le mal urbain qui affecte la capitale du tourisme saharien.
Plus grave encore, accuse-t-on dans une déclaration à Liberté, l'agence foncière aura court-circuité la procédure du permis de lotir, pourtant indispensable à toute ouverture de lotissement. "Cette procédure serait intervenue dans une sorte de consentement tacite avec les organismes publics chargés du contrôle de l'urbanisation.
Les habitants construisent anarchiquement leurs maisons et occupent leurs logements sans les autorisations réglementaires ou les revendent en dehors du circuit officiel.
Il en découle ainsi des quartiers sous-intégrés que les populations aménagent sommairement à leurs frais et comme bon leur semble", dénonce le représentant des habitants, en évoquant une situation paradoxale où un important arsenal juridique devant bloquer l'urbanisation non réglementaire est contredit par l'action d'un organisme public officiel qui agit à contresens des normes censées guider ses actions.
Rétorquant à ces allégations, le directeur de l'agence foncière de la commune de Tamanrasset, M. Khetali, précise que plusieurs lotissements situés sur l'ancienne zone d'activité de Tihagouine ne sont pas encore régularisés.
"La wilaya a été saisie au sujet de ce dossier qui traîne depuis 2013, date des délibérations du conseil d'administration de l'agence portant essentiellement les conditions de concession des lots occupés, dont le prix était initialement fixé à 6000 DA/m2 avant de le réduire à seulement 3500 DA/m2.
Cependant, ce prix est jugé inaccessible par certains occupants complètement désintéressés par le processus de régularisation", indique le même responsable qui s'apprête à aller à la retraite.
Evoquant les lotissements non viabilisés, M. Khetali impute le problème à la nature rocheuse des assiettes sur lesquelles sont érigées anarchiquement les constructions à vocation d'habitat, d'où le non-raccordement de ces habitations aux réseaux divers.
Par ailleurs, pour comprendre la gravité de ce phénomène, il faut passer en revue le rapport dressé en janvier dernier par l'APW de Tamanrasset concernant les lotissements sociaux. Le document, dont nous détenons une copie, précise que sur les 4000 lotissements prévus dans le cadre du programme quinquennal 2015-2019, seulement 2727 ont été finalisés.
Pas moins de 1759 autres lotissements sociaux, dont le lancement relève de l'impossible à cause de la propagation sans limite des constructions illicites et du détournement boulimique des poches foncières destinées à cette opération, sont également prévus dans le cadre du quinquennat 2019-2023, indique-t-on dans le même rapport.

RABAH KARÈCHE


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