Algérie

La chronique de Ghaleb Bencheikh



L?urgence d?un dialogue Au moment où des groupes indomptés, guidés par des visées démoniaques veulent s?en prendre aux étrangers vivant en Algérie, bafouant par ces actions inqualifiables nos valeurs pérennes d?accueil et d?hospitalité, nous affirmons qu?il n?y a pas d?autre issue que le dialogue des cultures, des civilisations et des religions. En effet, le dialogue interreligieux semble occuper une place de choix chez beaucoup de nos coreligionnaires, comme peuvent en témoigner les nombreux colloques tenus à ce sujet. Il n?en demeure pas moins que toute entreprise de dialogue soit empreinte de quelques ambiguïtés qui nécessitent d?être levées. Tout comme elle cultive un paradoxe de taille qui doit être rompu. En ce sens que jamais les associations de rencontres et de dialogue interreligieux n?ont connu une telle prolifération de par le monde, et surtout autour du bassin méditerranéen, au même moment où la suspicion et la méfiance entre les communautés paraissent de plus en plus exacerbées. Des colloques sur le dialogue des civilisations abondent sans résultat concret quant au désordre qui prévaut dans le monde. C?est pour cela que l?urgence d?un dialogue sincère, loyal, objectif, respectueux et exigeant tant sur le plan religieux que culturel, relève, de nos jours, d?une nécessité vitale. L?exigence est entendue d?abord vis-à-vis de soi et de sa communauté propre. C?est un besoin impérieux que nous éprouvons tous, nous qui évoluons désormais dans un seul monde, alors qu?auparavant, il nous semblait que nous vivions dans des mondes différents et que nous pouvions nous suffire à nous-mêmes. Sans vouloir reprendre toutes les doctrines des théoriciens du dialogue interreligieux ni passer en revue les modes opératoires de ses propagateurs, il est toujours utile de rappeler que la révolution entreprise dans nos rapports à la Vérité commence à être de plus en plus admise et avalisée par bon nombre d?hommes et de femmes de foi, notamment dans la famille abrahamique, celle des croyants juifs, chrétiens et musulmans. Nous voulons bien croire que nous ne nous y présentons plus comme seuls détenteurs de l?absolu ni seuls dépositaires de la Vérité indépassable. Mais nous réalisons, plutôt que c?est désormais le divin et le mystère de l?homme qui sont au centre et, nous tous, par-delà nos appartenances confessionnelles, gravitons autour, appréciant par là même la pluralité des voies qui mènent vers Dieu et reconnaissant la diversité des canaux vers la Transcendance. Mais une fois cette affirmation proclamée, quelles finalités caractérisent-elles le dialogue interreligieux ? Il ne s?agit guère par cette volonté de dialoguer tous azimuts uniquement d?asseoir le vivre ensemble, puisque nous sommes déjà ensemble et même contraints à l?être dans ce village terrestre qui se rétrécit de jour en jour sous l?effet de la mondialisation. Il s?agit de mettre en pratique l?enseignement puisé dans la Révélation de Dieu sous quelque forme que nous l?ayons reçue afin d?incarner ses valeurs. Des valeurs de bonté, de miséricorde et de solidarité. Ce n?est que comme cela que les contours d?un mieux-vivre ensemble se dessinent et deviennent une réalité. Ce n?est que comme cela que nous contribuons à consolider une société solidaire et fraternelle. Mais nous n?y parviendrons que lorsque des voix s?élèvent au sein de chaque communauté afin d?assainir ab intra la situation et d?extirper les germes d?intolérance chez soi et dans sa famille propre. A cet égard, et au titre d?un affligeant exemple de l?actualité brûlante puisé dans le bourbier irakien où tout le peuple avec toutes ses franges vit une tragédie indicible due à une guerre menée suite à un mensonge éhonté, le sort des chrétiens irakiens mérite que nous nous y appesantissions davantage. Il est inacceptable que « profitant » du chaos général qui bouleverse tout le pays suite à l?agression caractérisée américano-britannique, des islamistes fanatisés veuillent imposer à leurs compatriotes chrétiens une conversion forcée à l?Islam, leur Islam. Sinon, ils les obligent à s?acquitter d?une dîme de capitation tout aussi inacceptable. Alors que les chrétiens assyro-chaldéens vivaient en bonne intelligence avec leurs concitoyens musulmans sunnites et chiites. Aussi ne devons-nous pas, nous autres musulmans, nous taire devant de telles exactions qui n?honorent pas notre grande tradition d?ouverture et de respect des autres cultes. Parce que la jauge à l?aune de laquelle nous pouvons estimer les avancées éthiques d?une tradition religieuse est la position des minorités confessionnelles en son sein a fortiori dans une situation de troubles. Il est vrai que la folie meurtrière qui frappe au premier chef le peuple irakien et ses lieux de culte quelle que soit la confession, caractérise les spasmes et les convulsions paroxystiques d?un extrémisme barbare. Un extrémisme dû à la fois à l?occupation indue et scandaleuse américaine et aux idées rétrogrades du radicalisme religieux. Puisse la restauration de la basilique Notre-Dame d?Afrique à Alger par des deniers publics qui s?ajoutent à ceux privés des donateurs musulmans témoigner de l?invincible espérance et de la fraternité à promouvoir entre les hommes et les adeptes des traditions religieuses. Cette action entre en résonance avec la cession d?une église très peu fréquentée au centre de l?Angleterre par des fidèles chrétiens à leurs compatriotes musulmans qui avaient besoin d?un lieu de culte et de prière et qu?ils ont transformée avec bonheur et reconnaissance en mosquée. (*) Président de la Conférence mondiale des religions pour la paix


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