S'il s'appelait Rolland, il ne campait pas à Ronceveaux. Guillaume Rolland. Né le 18 septembre 1821 à Lacalm, là où l'Aveyron se fond dans les premières franges de l'Auvergne. Le visage émacié des hommes de la terre. La moustache couleur neige, à l'instar de ces flocons qui s'approprient le paysage. Sa vie, s'il n'avait intégré le 8e bataillon du corps des chasseurs, elle aurait pu se cantonner à la voie de facteur et de garde forestier qu'il s'était tracée.
Sauf qu'aux antipodes des immensités du plateau, Rolland fut, presque malgré lui, le héros de la bataille de Sidi-Brahim en 1845. Prisonnier des troupes de l'émir Abd El Kader, chef de guerre Algérien qui résista quinze ans durant au corps expéditionnaire des troupes d'Afrique, Guillaume Rolland eut, avec lui un incroyable face-à-face. Rolland était clairon de l'une des compagnies participant aux campagnes du général Bugeaud. Blessé et fait prisonnier, l'émir le prit à partie, lorsqu'il vit son clairon. « Les Français sont fous, de résister plus longtemps. Il faut qu'ils se rendent ! Connais-tu une sonnerie pour mettre fin au combat ? », l'apostropha Abd El Kader. Abasourdi, mais malin, le clairon, lâcha : « Oui, la retraite ». Le chef de guerre arabe lui intima donc l'ordre de sonner celle-ci. à peu près un an avant sa mort, en 1915, retiré chez lui à Lacalm, le clairon Rolland racontait : « Alors je me lève péniblement, car mes blessures sont douloureuses ; je porte le clairon à mes lèvres, rassemble tout ce que je sens en moi de forces et, les yeux fixés sur l'émir qui va sans doute me faire payer de la vie cette audace, mais le cœur gonflé d'une ivresse secrète, je sonne… la charge éperdument ! Quand j'ai fini, Abd El Kader attend l'effet promis de la sonnerie. Mais bernique ! Pas ombre d'effet… » Alors que l'émir s'étonne de ne voir aucun bras levé, lui lâche : « Vous savez, les Français sont têtus ! Il n'y a rien à faire. Ils se battront jusqu'au dernier ! » La défaite des corps expéditionnaires fut cinglante. Rolland resta prisonnier sept mois durant, avant de prendre la clef des dunes en s'évadant. Il fut est des seuls survivants de ces événements. Quant à son clairon de Sidi-Brahim. Il faisait résonner trop de mauvais souvenirs. Aussi, l'abandonna-t-il, là-bas, dans la brousse. Après l'avoir crevé d'un coup de pied et jeté dans les ronces. Il ne conserva que celui qui reçu à Tlemcen et en fit don à sa commune de Lacalm.
Une ultime fois, son regard croisa celui d'Abd El Kader. A Toulouse, en 1 848 après la reddition de ce dernier…
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Posté Le : 28/12/2010
Posté par : tlemcen2011
Source : http://www.ladepeche.fr