Retrouver intactes les couleurs de la Casbah d'Alger, telle qu'on pouvait encore l'admirer à la fin des années trente. Redécouvrir les façades de ses maisons aux tons pastel, la foule affairée et multicolore des marchés, les enfants jouant, tranquilles, sous les balcons, l'ombre mystérieuse d'une étroite ruelle voûtée où s'enfonce une femme dont on voit frémir le voile... C'est tout cela que permettent les 114 planches en couleur réalisées entre 1938 et 1940 par l'un des plus grands architectes de l'Alger des années trente, Paul Guion. Les illustrations peuvent être regardées une à une pour leur seule valeur esthétique. Toutefois, le texte qui les accompagne, rédigé par deux universitaires algériens, les éclaire d'une lumière plus forte. Chaque croquis, replacé dans le contexte historique et sociologique de la ville d'Alger, prend alors une épaisseur et une signification nouvelles. Le lecteur qui, lors d'une première approche, n'a vu dans chaque image qu'une scène pittoresque et colorée, y décèle soudain mille détails qui lui avaient échappé de prime abord. Il comprend mieux, au-delà de son intérêt artistique, la valeur du témoignage laissé par Paul Guion. Témoignage d'autant plus essentiel que la Casbah d'Alger, inscrite à l'inventaire du patrimoine mondial dressé par l'Unesco, a subi nombre de mutilations et reste encore fragile et menacée. Les responsables de l'urbanisme algérois ne s'y sont pas trompés : le ministre-gouverneur du Grand Alger a tenu à préfacer l'ouvrage, publié à la veille des célébrations du " millénaire " de la ville. Celle-ci, en effet, porte le nom que lui avait donné, au Xe siècle, le prince Bologhine. Mais le cœur de la cité, la Casbah, la " citadelle ", garde les traces d'une histoire bien plus ancienne encore, souvent trop méconnue. En restituant la beauté de cet ensemble urbain, les tableaux de Paul Guion aident à déchiffrer le passé et, on peut l'espérer, à préserver l'avenir.
Posté Le : 17/10/2017
Posté par : patrimoinealgerie
Source : decitre.fr