Algérie

LA CASBAH D’ALGER : ENRTE RÉHABILITATION ET PRÉDATIONS



LA CASBAH D’ALGER : ENRTE RÉHABILITATION ET PRÉDATIONS
Cela fait plusieurs décennies que la Casbah a été reconnue par la communauté nationale, puis internationale, en tant que patrimoine digne de figurer sur la liste du patrimoine universel; Et cela n’a pas suffi à donner une réponse simple et précise à la question : ” Que veut-on faire de la Casbah”?

Cet objectif pourtant fondamental est constamment éludé par les différentes autorités de tutelle (Ministère de la culture, de l’habitat et de l’intérieur). Or, formulé avec

la précision voulue, on détermine le devenir de ce premier noyau de la capitale du pays. Cette orientation clarifie et renforce la détermination des pouvoirs publics (politiques), et unifie les actions des institutions responsables chargées des programmes de sauvegarde de ce patrimoine. Elles conjugueront leurs efforts et mobiliseront tous leurs moyens disponibles, aussi bien locaux qu’étrangers, pour atteindre cet objectif commun. A défaut chaque changement au niveau décisionnel risque de se traduire par une remise en cause, justifiée ou injustifiée, de la démarche mise en œuvre par son prédécesseur.

A défaut d’une finalité clairement définie et acceptée par toutes les instances, nationales et internationales, responsables à titres divers de sa sauvegarde (restauration, réhabilitation ou rénovation, selon le cas de figure et en fonction de la finalité de chaque élément architectural qui forme le Casbah), nous sommes réduits à formuler trois hypothèses et à envisager les implications de chacune :



1- Sauvegarder la Casbah en maintenant sur place la population résidente actuellement.



2 – Faire de la Casbah un centre touristique.



3- Restaurer la Casbah pour accueillir une population nouvelle (profil à déterminer dans le cadre d’une commission ad hoc) .



I) La première hypothèse peut être retenue, si l’on souhaite voir disparaître (dans les prochaines décennies) à moyen terme ce qui reste de la Casbah, car on peut affirmer sans risque d’erreur, que la population résidente actuellement est dans sa majorité en attente d’un relogement et que cette finalité est conditionnée par la démolition accidentelle et/ou volontaire des lieux d’habitations. Cette action transforme le propriétaire, les locataires et/ou les squatters en “sinistrés”, leur offre la possibilité d’obtenir un logement et accorde, en plus, au propriétaire le bénéfice de diverses aides publiques (confortement, démolition puis enlèvement des gravois) sans bourse déliée, tout en reconduisant les privilèges, à tour de rôle, aux autres héritiers et ayant-droits l’opportunité de bénéficier d’un appartement à chaque programme de relogement. Au bout du compte la famille reste toujours propriétaire de la parcelle et à ce titre bénéficie en permanence de toutes formes d’aides publiques. La permanence de ce système, sur plusieurs décennies, s’avère désastreuse pour notre patrimoine. Depuis l’indépendance, ce mode opératoire ne cesse d’encourager les dégradations et est à l’origine de près d’une démolition sur deux.
L’obstination manifeste à reconduire cette pratique ne s’explique que par la collusion avérée entre bénéficiaires et organismes d’attribution des logements gratuits. La finalité de cette action “dite” sociale est la revente des biens de l’état sur le marché libre par le biais du système de désistement. Une simple vérification des listes d’attributions et sa confrontation avec les occupants effectifs, montre ce que tout le monde sait et qu’on fait mine d’ignorer, près d’un logement social sur deux est détourné et finit sur le marché “libre”. Ce système de redistribution (du bien public) donne satisfaction à l’ensemble des parties prenantes (propriétaires, locataires, squatters et fonctionnaires), sauf à ceux qui souhaitent et militent effectivement pour la sauvegarde de la Casbah. Cela participe à la perte du patrimoine, que l’on affirme vouloir sauvegarder. Ce constat peut être étayé par une étude rétrospective des différentes opérations “relogement”. De plus, après chaque programme d’attribution, on assiste à une recrudescence des démolitions et effondrements de maisons. On a déjà attribué plus de dix mille logements pour reloger les “sinistrés” et dé-densifier les maisons afin d’engager les travaux de réhabilitation, sans atteindre les résultats escomptés. L’état physique de la Casbah est édifiant. Ce système (spéculatif) a plus que largement fait preuve de sa flagrante inefficacité dans tous les domaines. Seuls ceux qui en tirent un profit direct et/ou indirect militent pour son maintien en évoquant la dimension humaine et sociale du problème. Cette hypothèse ne peut être retenue, car elle est incompatible avec une réelle volonté de sauver la Casbah.



II) La seconde hypothèse serait de faire un centre touristique. On peut difficilement imaginer l’ensemble de la Casbah peuplée d’artisans, corporation déjà en voie d’extinction, avec des rues parcourues par une horde plus qu’hypothétique de touristes (tourisques) se promenant dans une ville fantôme.
L’existence de l’artisanat et ce dans tous les pays ayant cette vocation, est d’abord conditionnée par la consommation locale des produits, le touriste ne représentant qu’un apport (le Maroc, l’Espagne et l’Egypte illustrent notre propos). La véritable production artisanale est consommée par les autochtones, le touriste achète la contre-façon. En Algérie les seuls artisans “ressuscités” subissent la même métamorphose, passant du statut d’artisan, dont la production était destinée à la consommation populaire et utilitaire au quotidien, au statut d'”artiste” dont le produit est aujourd’hui destinée à l'”élite” fortunée à titre d’objet symbolique servant de décors exotiques. Cette hypothèse n’est pas viable ni à court, ni à moyen terme, elle implique un budget de fonctionnement important et à fond perdu; or l’économie (rentabilité) est aussi importante pour la vie de la cité que l’oxygène pour les humains.


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