Algérie

La Casbah, capitale de la culture de l'oubli



La Casbah, capitale de la culture de l'oubli
La Casbah, capitale de la culture de l’oubli.
par farouk Zahi

« Comment l’homme qui saisit à peine le présent, qui oublie le passé, saurait prévoir l’avenir ? » citation populaire.aisit à peine le présent, qui oublie le passé, saurait prévoir l'avenir."
Sous le slogan de « Oran, capitale mondiale du gaz », El Bahia a bien bénéficié d’un programme spécial pour le GNL 16 perturbé par le nuage volcanique islandais comme chacun sait. La Casbah aurait-elle la chance, à l’instar de Tlemcen capitale de la culture islamique, de bénéficier d’un programme et d’une manne financière à l’effet de la soustraire au gommage matériel ? Rien n’est moins sûr, mais il faut quand même espérer. L’immatériel, lui, il part inexorablement avec ses « bibliothèques qui brûlent ». L’historien Belkacem Babaci aura beau faire, il ne parviendra pas à nous extirper de cette torpeur inconsciente. Le parricide culturel est malheureusement consommé. Classée patrimoine mondial par la session du comité exécutif de l’organisation onusienne pour la culture et l’éducation de décembre1992, presque une génération, la cité geint sous le laminoir du temps qui passe. A la veille du dix-huitième anniversaire de cette consécration universelle, une caméra baladeuse fait parler quelques uns de ses ultimes autochtones. Le dinandier parle de la disparition de ses pairs au nombre d’une vingtaine, l’artisan- bijoutier rapporte la même déshérence dans sa corporation. Un vieil habitant a déjà entendu la litanie de l’Unesco, mais il ne voit rien venir. Il ajoute : « Les pâtés de maisons qui s’affaissent, deviennent naturellement des places publiques ». L’enchevêtrement du bâti du à la dénivelée de près de 118 mètres fait que les maisons se solidarisent en s’adossant l’une à l’autre, d’où le risque actuel d’une autodestruction en « château de cartes ». Certaines voix malveillantes, colportent çà et là que la décrépitude de la Casbah est entendue depuis bien longtemps et que sa disparition est inéluctable. Elle attiserait les convoitises des preux chevaliers de la promotion immobilière d’affaires du futur. L’assiette d’implantation de 45 hectares au cœur d’Alger, la mythique capitale de la course méditerranéenne, n’est certainement pas faite pour apaiser les vieux démons de la conquête qui, cette fois ci, se présenteront sous l’effigie d’un commis de commerce.

Le site Algerian-Tourisme dit de la Casbah : « Aux alentours de 1920, naît un véritable intérêt pour la sauvegarde de la vieille ville. Les premières études pour la sauvegarde du site de la Casbah d'Alger sont conduites dans les années 70. Un plan d'aménagement de la Casbah est mis en œuvre à partir de 1981. Il porte en particulier sur le bâti de la période 1816-1830 pour mettre en valeur la ville à l'époque de l'influence ottomane, 1816 étant la date à laquelle le centre politico-administratif fut transféré à la citadelle ; ce déplacement a entraîné un nouveau flux de population vers la haute ville. Il a été notamment suivi d'un plan d'action-programme prioritaire en 1985 et d'un plan directeur d'aménagement et d'urbanisme en 1992. Le plan de restauration actuellement en cours correspond parfaitement aux besoins de la vieille ville : il s'agit notamment de restaurer et de réhabiliter le tissu historique. En plus de sa richesse artistique, la vieille ville est un précieux témoin de l'histoire de l'Algérie. Fin de citation ».
Comme on peut aisément le constater, l’intention généreuse de réhabiliter la citadelle date du début du siècle dernier et ses premiers frémissements des années soixante dix(70), mais qui a empêché jusqu’ici d’aller à la concrétisation des vœux pieux et c’est le moins qu’on puisse dire ? Si la force d’occupation n’avait aucun intérêt à sublimer le passé historique du vaincu et c’est dans la nature des choses, qui peut entraver une telle œuvre de salut mémoriel alors que le pays a recouvré son indépendance depuis près d’une quarantaine d’années ? Cette réhabilitation serait-elle l’arlésienne de l’Algérie moderne ? Le commun des mortels serait tenté de le croire, tant les atermoiements foisonnent autour de ce dossier national.

Ayant survécu au séisme dévastateur de 1715 (20.000 morts), à cinq siècles de convoitises coloniales agressives, de Charles Quint (1535) à Massu (1957) en passant par de Bourmont (1830), elle a raté doublement sa chance lors des préparatifs des festivals panafricains de 1969 et de 2009 où Alger la Blanche fut parée d’atours de circonstance. Les rencontres internationales culturelles ou même économiques, auxquelles notre pays est convié, ne manquent jamais de mettre en avant le label « Casbah ». La dernière exposition universelle de Shanghai l’a bien mis en évidence, tout comme celle de Barcelone bien avant. Et si pour préserver la mémoire collective, il faille passer par l’organisation de manifestations culturelles de prestige, ce ne sera que bénéfique pour Cirta la numide, la Kalaâ la hammadite, Sedrata l’ibadite et autres capitales historiques qui attendront patiemment leur tour. La question qu’il faut se poser maintenant, s’agit-il de difficulté de financement du projet qui pourrait mettre en péril l’équilibre budgétaire de l’Etat ? Dans ce cas, la communauté nationale serait interpellée pour recourir à une souscription citoyenne pour sauver ce qui peut l’être déjà, ou bien s’agit-il d’impéritie bureaucratique ? Il ne restera plus, dans ce cas, qu’à lever les bras pour que la providence céleste lui fraye la voie du salut. Au 11è Salon international du tourisme et des voyages (Sitev) qui se tient du 8 au 11 décembre, saura-t-on focaliser l’intérêt sur ces médinas médiévales qui on défié le temps, mais pas l’indifférence de la descendance de leurs propres bâtisseurs ? Le patrimoine commun sera-t-il préservé des meurtrissures du temps ou bien faudra-t-il faire table rase des luttes pour la survie identitaire menées par les anciens, dans une mare nostrum (notre mer) chère à Mussolini ? Cette appellation nostalgique et néanmoins allusive, renvoyait à l’emprise romaine sur la méditerranée dans l’antiquité. Seul, l’avenir nous le dira.


Le 5 decembre2010





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