Algérie

La caravane et le TGV



«Vous vous réjouissez en élaborant des lois, mais vous vous réjouissez cependant davantage en les violant».K. GIBRAN

Tous les soufflets vont retomber au gré des compromis laborieusement négociés et bricolés au grand détriment des finances publiques et des seules recettes qui font bouillir la marmite Algérie.

 Des troisièmes sabres érodés par le temps feront encore quelque temps la chronique des scandales, suivis par d'autres scandales jusqu'à ce que l'Algérie devienne importatrice d'énergies anciennes et nouvelles inventées par des élites et des recherches scientifiques là où elles sont au cÅ“ur du pouvoir et de la compétition mondiale dont les classements sont du domaine public.

 Les partis de la majorité, imperturbables ne se soucient que dans la forme du prix du sucre, de la sardine, des salaires des enseignants, des médecins et du taux du chômage insaisissable comme le mercure et les programmes des formations politiques, juste d'ici 2011. De toute évidence, comme le disait le camarade Oulianov il faut adapter les rêves à la réalité, celle du niveau de la réflexion officielle où il est question d'un ministre gros acheteur de bus, d'un autre qui se prend pour une caravane qui passe et d'un troisième qui informe de l'existence d'un «clan présidentiel» etc.etc.

 «C'est normal» comme dit la sagesse juvénile qui a l'esprit et les regards tournés ailleurs, loin des détournements et d'une corruption qui atteignent les cimes où régnaient les grandes stars de Wall Street au moment où d'honorables parlementaires de la Old England sont interrogés pour des notes de frais qui laissent hilares nos grands prédateurs qui ne comptent qu'à hauteur du million de dollars et beaucoup plus s'il y a des marchés à propos de n'importe quoi de bien juteux. Les soufflets ne vont pas tarder à retomber, et la caravane passe, comme si de rien n'était. Et d'ailleurs c'est quoi un paquet de milliards?

 Pour faire bonne mesure et créer une pathétique diversion, on fait mine de continuer la guerre d'indépendance avec quelques combattants sortis de leur sieste un fameux 19 mars. Et comment ne pas apprécier les propos de Louiza Hanoune à propos d'une éventuelle et hypothétique loi criminalisant les atrocités commises par la France coloniale et oublieuse des Français qui ont tout risqué pour l'indépendance de l'Algérie? Un parlement qui ne propose aucune loi pour la mener à terme dans un débat démocratique sur un des nombreux problèmes qui pourrissent la vie aux salariés, aux femmes, aux retraités et à la jeunesse, peut-il sans rouge au front sortir d'une sieste homérique, au moment où le pays coule sous les ordures et les scandales pour proposer une troisième mi-temps à la guerre d'indépendance?

 Cette dernière appartient à une histoire et une mémoire collectives Elle est de la compétence de brillants historiens nationaux et non d'un parti, quel qu'il soit. Certains avaient privatisé l'Islam, suivis par des «parties» et des administrations.

 D'autres tentent, avec du retard, de privatiser et de téter les martyrs, leur sang, leur descendance, toujours à partir de sinécures grassement rémunérés, dans un mesquin jeu de coulisses pour de petites querelles intérieures, après un silence pitoyable après la loi française de février 2005, la liste noire des pays terroristes, l'invasion massive de l'espace par les salafistes, la prolifération de faux moudjahidine, de pseudo imams, les grèves réprimées, les routes défoncées…

 Toutes ces problématiques, et tant d'autres, relèvent du pouvoir politique.

 Ce dernier, en démocratie, tire sa légitimité d'une délégation suspensive à chaque élection, octroyée par le peuple souverain. Donc, le pouvoir est exercé, par délégation, au nom du peuple, par des formations politiques majoritaires et d'autres minoritaires qui inscrivent l'alternance comme mode et modèles indépassables. En situation de crise ou de transition, comme c'est le cas en Algérie depuis des décennies, la responsabilité de la classe politique, des élites et de la société civile (si elle trouve les cadres institutionnels et démocratiques pour son organisation et son expression libres) est énorme devant les enjeux, la mondialisation et l'avenir.

 Ce dernier ne peut être «touillé» aux sautes d'humeur, à l'improvisation, à l'approximatif et à une rente, à l'exemple de la guerre d'indépendance dont les artisans fondateurs et les acteurs de premier plan ne sont plus de ce monde pour la plupart.

 «Une désagrégation prolongée du tissu politique fait filer la société soit vers une régression à un état d'anarchie «semi barbare», soit vers la promotion révolutionnaire d'un ordre compact ou sacralisé, doté d'un taux de composition symbolique très élevé (1)». Après la période «semi barbare» d'un FIS tenté par le pouvoir absolu irrigué par la seule eau bénite de la religion et la mise en place d'un clergé dissident dans les quartiers, les cités, l'université et l'école, le balancier est réparti vers une autre extrême, celle de la fermeture sous le prétexte d'une transition restée figée. Les régressions constatées aux niveaux de l'incivisme, « des restes à éradiquer» du terrorisme, de la prédation à grande échelle, d'une anomie ravageuse, des fractures sociales et identitaires qu'un simple match de foot a fortement ravivé la puissance et la profondeur qu'on fait mine d'ignorer interpellent le pouvoir, les partis, les élites et la société entière qui navigue au gré des intempéries et de folie du marché des denrées alimentaires.

 Lorsque le dépositaire d'une délégation qui n'affronte même pas un scrutin de douar parle de la caravane qui passe (chassez le rural, il revient au galop) et qu'un autre signale son appartenance à un clan réel ou virtuel, c'est le règne de l'archaïsme avec la structuration de sectes.

 Ces dernières manipulent des ingrédients incompatibles et explosifs comme l'atteste l'histoire récente du pays. Un zeste plus ou moins variable de religiosité, un autre d'une charge symbolique manipulée (novembre et la guerre d'indépendance), un laxisme tous azimuts, une part de potentiel coercitif ne font pas forcément une légitimité ou une gouvernance éclairée par les savoirs, la justice et les droits de l'homme.

 «Chaque type de pouvoir d'Etat a un taux de composition organique qui lui est propre, ainsi que le mode de combinaison qui l'accompagne. En règle générale, l'usure du temps provoque dans un régime donné de domination une dégradation du potentiel symbolique incorporé au moment de sa fondation, fonction d'un rendement décroissant de la machine politique (2)».

 Cette dernière, à l'évidence est soumise à moult questionnements implicites ou explicites, disparates, hétérogènes donc hors du contrôle institutionnel ou démocratique. «Au rebours, la dévalorisation qualitative de l'institution a pour envers et effet la valorisation d'organes suppléants, porteurs de nouvelles valeurs ou dépositaires des anciennes, mais extérieurs à la sphère d'autorité proprement dite».

 La multiplication de sphères d'autorité ou de réseaux, clans ou sectes affecte directement le cheminement de la société qui opère des inflexions en dehors de l'Etat, contre lui ou bien génère des puissances d'argent, violentes ou prédatrices en dehors de tout contrôle. Et si «la caravane passe», les dromadaires se fatiguent, sont forcément dépassés par le TGV, l'informel et la constitution de puissances et de pouvoirs qui peuvent opérer des jonctions avec l'étranger, le crime organisé pour mieux et plus dépouiller l'Etat, la nation et la société entière. Il y a donc des choix à faire, la caravane qui passe à son rythme et celui des Grands Pédagogiques (G.P.) ou le T.G.V. qui doit ses performances à l'ordinateur maîtrisé par des humains?










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