Algérie

LA BOURGEOISE



Résumé : La couple se plaît tellement à Constantine qu'il décide de prolonger son séjour. Mordjana achète encore d'autres souvenirs. En passant devant un hammam, elle émet le désir de prendre un bain. Alors qu'elle sort de la chambre chaude, la jeune femme se heurte à une vieille dame. Une conversation s'ensuit.La vieille femme porte une main à sa bouche.
- Que Dieu protège Ses êtres de toute malédiction. Pourquoi tout ce tableau noir, ma fille ' Vous n'êtes pas heureuse dans votre vie conjugale '
Mordjana soupire encore.
- Mon mari m'aime et tente par tous les moyens de me rendre heureuse, mais ma belle-mère n'a jamais accepté notre mariage. Elle voulait une autre fille pour son fils.
- C'est Dieu qui décide pour nous. À chacun son destin. Cela lui passera. Elle finira par vous accepter, et son c?ur s'adoucira si vous vous comportez plus loyalement avec elle.
Mordjana sent des larmes rouler sur ses joues.
- Elle me traite de poule stérile.
Sa curiosité piquée à vif, la vieille femme la regarde un moment avant de demander :
- Vous êtes mariés depuis combien de temps '
- Plus de deux années.
- C'est trop peu pour parler de stérilité. Vous allez sûrement avoir des enfants dans les années à venir. Pourquoi tout ce pessimisme '
- Je n'arrive plus à soutenir son regard accusateur.
La vieille femme hoche la tête.
- Je vous comprends amplement. Seulement, pensez à votre mari qui vous aime et à votre avenir. Cela vous permettra de voir la vie sous son angle le plus beau et vous aidera à surmonter vos peines.
- Je ne cesse de me répéter que les choses changeront un jour. Que tout rentrera dans l'ordre. Mais j'avoue que je commence à perdre patience.
- Avez-vous consulté '
- Tous les médecins susceptibles de nous venir en aide. Mais jusqu'à ce jour nous attendons cette étincelle qui nous permettra de reprendre espoir. Mon mari, s'il est déçu, craint davantage que mes nerfs craquent. Que je sombre dans la folie. Je passe mes nuits à rêver en train de bercer un enfant dans mes bras.
La vieille femme lui tapote l'épaule.
- La patience finira par triompher. Si aucun de vous deux n'est affublé d'une anomalie, tout s'arrangera, et bien plus tôt que vous ne le pensez.
Mordjana regarde la vieille dame et sourit.
- J'ai l'impression d'écouter ma grand-mère. Elle aussi ne cesse de m'exhorter à être patiente.
- Prenez donc nos expériences respectives en considération. La vie est ainsi faite. Elle nous soumet à des épreuves et juge nos réactions.
Elle lui tapote la main.
- Qui sait ' Peut-être qu'un jour prochain vous allez vous rappeler mes paroles. En attendant, si j'ai un conseil à vous donner, sachez que la médecine traditionnelle apporte parfois des solutions adéquates à des situations jugées désespérées. Des massages donnent souvent de bons résultats.
- Je ne comprends pas bien de quoi vous parlez. Vous voulez dire que je dois me faire masser '
Elle hoche la tête.
- À la fin de vos prochaines menstrues, allez voir une vieille matrone expérimentée et vous verrez que souvent il ne suffit que d'un petit geste pour débloquer nos entrailles.
La vieille femme s'éloigne et Mordjana demeure interdite un moment. Elle a déjà entendu parler de ces traitements traditionnels. Mimouna sa grand-mère y a fait aussi allusion lors de leur dernière communication, mais elle n'a jamais pris ses dires en considération. Est-il donc possible que de simples massages réguliers puissent déclencher une grossesse '
Un peu déroutée, elle s'habille à la hâte et appelle Samir pour la récupérer.
Ils reprennent la route dès le lendemain, pour se rendre tout d'abord à Batna, avant de continuer vers Annaba.
Dans la ville des Aurès, Mordjana découvre avec plaisir la culture chaouie et les us et coutumes d'une région authentique et millénaire, qui n'a pas à rougir de ses origines.
Elle visitera non seulement la ville, mais aussi les régions environnantes, et sera subjuguée par les ruines romaines et les anciens villages dont la plupart, malgré le modernisme, avaient gardé leurs anciennes traditions. Samir, qui aime faire le guide, l'entraîne dans les dédales des vieilles ruelles, tout en lui expliquant que les Chaouia sont très généreux et très accueillants.
D'ailleurs, elle ne tarde pas à en avoir la preuve, puisque à chaque fois qu'ils s'arrêtent pour demander leur chemin ou des renseignements on les invite à prendre un café ou à partager un repas.
Mordjana, qui devient de plus en plus curieuse devant les nombreux sites et les quartiers de Batna, tombe sous le charme de la tenue aurassienne.
Samir n'hésite pas à lui en offrir un modèle. Lorsqu'ils arrivent à leur destination finale, Samir et Mordjana ont l'impression d'avoir quitté leur ville depuis des mois et surtout d'avoir vécu hors du temps.

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