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La bataille kurde d'Erdogan


La bataille kurde d'Erdogan
La Turquie se prépare à la grande mue. Erdogan, élu le 10 août à la Présidence pour un mandat de 5 ans, entend renforcer son emprise en disposant de larges prérogatives et préparer son successeur, le ministre des Affaires étrangères, Ahmet Davutoglu, au poste vacant qu'il laissera. La « nouvelle Turquie », promise par Erdogan, rêve ainsi de poursuivre la bataille de la croissance, grandement favorisée par le dynamisme Davutoglu « Monsieur Afrique », et de la paix avec les Kurdes. Une rencontre, annoncée par le vice-Premier ministre Besir Atalay, entre le chef des services de renseignements turcs (MIT), Hakan Fidan, et le leader emprisonné (depuis 1999) du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), Abdullah Ocalan, vise à relancer le processus de négociation actuellement au point mort. « Il a été redit à Ocalan qu'Erdogan poursuivrait le processus de paix pendant son mandat de Président », précise le quotidien Cumhuriyet. Dans un conflit qui a fait plus de 40.000 morts en 30 ans de combats, l'ambition d'y mettre fin a été proclamée ouvertement par Ocalan, alors que le vice-Premier ministre s'est déclaré favorable aux négociations directes dans les monts de Kandi, renfermant le siège du PKK. Mais en dépit du cessez-le-feu unilatéral observé depuis 2013, le PKK juge encore insuffisante les décisions prises par le gouvernement pour créer un climat de confiance. Des mesures en faveur des minorités, notamment le droit d'utiliser la langue kurde dans les écoles privées et devant les tribunaux, ont été votées. Le rapprochement, renforcé par la remarquable percée du candidat pro-kurde Selahettin Demirtas (10% des suffrages) à la récente présidentielle, cristallise le vieux rêve autonomiste favorisé par l'effet de contagion provoqué par la proclamation de l'union sacrée consacrée par le combat commun mené contre l'Etat islamique en Irak. Le précédent du Kurdistan indépendant ne laisse pas indifférent le PKK et, en revanche, accentue le malaise de la Turquie acquise notamment aux combattants de l'Etat islamique en Syrie. Une recomposition du nouveau paysage, accordant une place privilégiée au Kurdistan irakien et syrien, inquiète Ankara, redoutant les retombées d'une telle perspective et la perte d'influence des Frères musulmans dans la région.