Algérie

La bataille de Sidi Brahim



La bataille de Sidi Brahim
Les 21,22 et 23 Septembre 1845, les troupes françaises commandées par le Général Lamoricière subirent une lourde défaite près du marabout de Sidi Brahim, où des centaines de soldats furent tués par les cavaliers de l'Emir Abdel-Kader. En 1945, les restes de ces combattants ont été réunis dans un mausolée à Djemmaa Ghazaouet appelé 'le tombeau des braves'. En 1962, ils ont été transportés à Paris au Musée des Chasseurs, au vieux fort de Vincennes en 1965. Aujourd'hui encore, les soldats du corps d'armée 'Les Chasseurs' arborent sur leur épaule le nom de Sidi-Brahim. De plus une célèbre marche militaire s'intitule 'la sidi Brahim'.

Notre camarade René Clément a proposé de mettre en ligne la commémoration de cette bataille. Les dessins, réalisés en 1978, sont du brigadier chef Jamois (2ème esc. 2ème Hussards), alors que Le Général de Corps d'Armée Bruno Cuche (3661C - LF 66-68) était capitaine, commandant cette unité.

Djemmaa Ghazaouet, Fin de journée... Seize hommes épuisés sont recueillis par la garnison venue à leur rencontre : le Caporal LAVAYSSIERE, 14 Chasseurs et le Hussard NATANLY. Tous bouleversés, les écoutent ... Ils racontent leur marche terrible de trois lieues, constamment harcelés par les Arabes, contre lesquels ils luttent à la baïonnette, faute de munitions. Ils étaient 80, formés en carrés, les blessés au centre dont l'épuisement obligeait à de fréquents arrêts. La fatigue était immense, mais surtout la soif les torturait, lorsqu'ils parvinrent dans le lit de l'oued Mersa, à 2000 mètres de leur objectif.

C'était l'endroit et le moment où les attendait la tribu des Ouled Ziri. Ce fut un carnage. Le capitaine de Géreaux et le lieutenant de Chappedelaine, déjà blessés, ont été achevé les premiers...

De cet affreux massacre, voici les seuls survivants...

Tout avait débuté le 21 Septembre...

Depuis le début du mois, l'Emir ABD EL-KADER, du Maroc où il s'était réfugié, avait entrepris de soulever les tribus Algérienne dont beaucoup, s'étaient déjà ralliées à nous. Ce jour là, le caïd Trari, sous prétexte de nous appeler au secours, nous entraîna dans un traquenard.

Le Colonel de Montagnac, commandant les troupes basées à Djemmaa Ghazaouet, se mit à la tête d'une petite colonne, composée de 69 Cavaliers du 2ème Hussard sous les ordres du Cmdt Courby de Cognord, et 354 Chasseurs du 8ème d'Orléans sous les ordres du Cmdt Froment-Coste, le tout avec 6 jours de vivre. L'on partit le jour même à 22 heures et l'on bivouaqua à 15 kilomètres, à l'ouest, de Djemmaa Ghazaouet.

Le 22 au matin, Trari orienta Montagnac vers le sud, et l'on campa vers 13 heures le long de la piste en plein bled, à 1 km au sud de la maison appelée Dar-Sidi-Bou-Rahal.

A ce moment, quelques cavaliers Arabes sont visibles sur les crêtes . On échange à distance les premiers coups de feu.

Le 23 à l'aube, Montagnac décide de se porter vers les cavaliers ennemis aperçu la veille.

Il laisse à la garde du bivouac, le Commandant Froment-Coste, le Capitaine de Géreaux et des éléments de sa compagnie, la 8em, le Capitaine Burgard et sa 2em Compagnie. Ils font 4 000 mètres vers l'ouest et c'est le drame.

Surgissant des crêtes environnantes, 5 à 6 000 cavaliers Arabes, menés par Abd el-Kader, fondent sur la petite colonne. Les Hussards chargent. Courby de Cognard est blessé. Les cavaliers sont submergés et bientôt anéantis.


Les trois Compagnies de Chasseurs forment le carré et font face. au milieu d'elles, Montagnac est tué. La lutte va durer 3 heures. Puis les unités du 8ème d'Orléans succombent sous le nombre et sont massacrées.

Averti au bivouac par le Maréchal des logis Barbut, du 2em Hussards, le Commandant Froment-Coste se précipite avec la 2em Compagnie vers le combat, situé a 4 kilomètres, il n'en fera pas 2. Les Arabes qui ont vu le mouvement, l'interceptent et l'assaillent de toute part.

Froment-Coste est tué, le Capitaine Dutertre, Adjudant major est fait prisonnier...

Bientôt, il ne reste qu'une douzaine de Chasseurs que l'Adjudant Thomas, au moment de tomber aux main de l'ennemi, exhorte à se battre jusqu'au bout.

Le Capitaine de Géreaux qui a la responsabilité du bivouac, après un vain essai de se porter au secours de ses compagnons, assiste impuissant à la lutte désespérée.

A 1 000 mètres de là, se dresse le petit édifice de la Kouba du Marabout de SIDI BRAHIM. C'est là que Géreaux décide de se porter et de s'installer pour se battre, en attendant du secours.

Géreaux rameute alors le reste de sa compagnie, les 3 escouades de la 3em compagnie, et le Caporal Lavayssière, qui sont à la garde du troupeau et des bagages, soit environ 80 fusils.

Le mouvement est rapidement exécuté, dans la chaleur accablante de ce début d'après midi. Il n'échappe pas à Abd el-Kader dans cette grande plaine rase, l'Emir pense qu'il va facilement écraser le restes de la colonne Française, mais il va se heurter pendant trois jours et trois nuits à la résistance des 80 Chasseurs du Marabout de SIDI BRAHIM.

Dans l'après midi du 23, les Arabes sont en masse autour de la Kouba et c'est le siège. Les assauts des troupes de l'Emir se succèdent, les harcèlement sont permanents, les munitions et les vivres commence à manquer.

Dès le début, le Capitaine de Géreaux a fait confectionner un drapeau tricolore de pour attirer l'attention de la colonne de Barral qui, avec le 10ème Bataillon de Chasseurs d'Orléans, opère non loin à partir de Lalla-Marnia. Lavayssière, aidé du Chasseur Strapponi, hisse le drapeau au sommet d'un figuier qui se dresse près du Marabout... et là, dans la lunette, il voit la colonne de Barral, attaquée à son tour, s'éloigner dans la plaine.

Les Arabes vont tout faire pour faire céder la résistance inattendue que leur oppose les Chasseurs de la Sidi-Brahim.

Par trois fois ils les somment de se rendre. A la première sommation, Géreaux répond que ses Chasseurs préfèrent mourir. A la seconde, assortie de menaces contre les prisonniers, il répond encore que ses Chasseurs et lui sont à la garde de Dieu et attendent l'ennemi de pied ferme. A la troisième, Géreaux blessé, ne peut répondre lui-même. Lavayssière s'en charge et ayant emprunté le crayon du Capitaine, écrit :

'MERDE POUR ABD EL-KADER ! LES CHASSEURS D'ORLEANS SE FONT TUER MAIS NE SE RENDENT JAMAIS'.

Après les sommations viennent les menaces et les sévices. C'est d'abord le Capitaine Dutertre, fait prisonnier le 23, qui est amené devant la murette, crie à ses camarades : 'Chasseurs, si vous ne vous rendez pas, on va me couper la tête. Moi, je vous le dis, faites vous tuer jusqu'au dernier plutôt que de vous rendre'. Quelques instants plus tard, sa tête tranchée est promenée par les Arabes autour de la Kouba.

Ce sont alors les prisonniers de combats précédents qui sont traînés de même les mains liées, afin d'ébranler la détermination des hommes.

'Couchez vous ! hurle Lavayssière. Et il fait aussitôt déclencher une fusillade sur l'escorte d'Abd el-Kader qui se trouvait à proximité, et est lui même blessé à l'oreille.


Enfin c'est le Clairon Rolland, lui-même aux mains de l'ennemi qui reçoit l'ordre, sous la menace, de sonner la 'retraite'. Il s'avance et vient, à plein poumon sonner 'la charge'.

Les jours passent et la résistance ne faiblit pas. Mais les secours n'arrivent pas. Géreaux, de plus en plus affaibli, mais qui a gardé la tête froide et le commandement, se rend compte que la situation ne peut durer. Il décide alors, de percer et essayer de regagner Djemmaa, à près de 15 kilomètres.

Le Caporal Lavayssière, homme d'action, prendra le commandement du détachement. Les Officiers, Géreaux, Chappedeleine, Rozagutti, blessés, ne sont plus en état d'assurer cette mission.

Le 26 Septembre, à l'aube, ils escaladent la face nord de la Kouba, ils bousculent les petits postes Arabes, et formés en carré, blessés au centre, ils marchent dans la plaine sous le soleil qui monte. L'épreuve va durer toute la journée. Nous connaissons la suite et l'issue douloureuse de cette marche héroïque, qui va connaître un dénouement tragique dans le lit de l'oued Mersa, à 2 kilomètres de Djemmaa.

Dans la journée du 26 et les jours qui suivent, quelques rescapés de la colonne Montagnac parviendront à rejoindre Djemmaa, mais plusieurs succomberont à leur épuisement et à leurs blessures.

Dès le début, le nom de SIDI-BRAHIM connut un retentissement extraordinaire.

Ce qui frappa, ce fut la volonté, la cohésion de cette troupe, l'accord intime et la communauté de réaction des cadres et des chasseurs dans leur farouche résistance à la faim, à la soif, aux menaces, témoignant d'un état d'esprit bientôt connu comme l'ESPRIT CHASSEUR.

Ce fut aussi l'extraordinaire autorité d'un Caporal, dénotant la qualité d'une instruction et d'une formation morale : 'le Style Chasseur'.


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