Algérie

Là-bas, c?est déjà ici



Didier Tronchet et Anne Sibran ont trouvé la juste note pour narrer l?amour d?une ville et d?un père. Là-bas ou l?impossible deuil sur Alger. On ne quitte jamais l?Algérie de son plein gré. Une ?uvre coup-de- poing. Il est difficile de décrire le déchirement, la séparation sans tomber dans le pathos. La nostalgie a quelquefois des désirs inaccessibles, comme cette volonté de figer le monde pour que la réalité soit conforme aux souvenirs. Les personnes et les lieux de notre passé ont toujours l?âge de notre mémoire. Ils sont éternels. Il est plus difficile, sans tomber dans un patriotisme étroit ni dans une sodade maladive, d?arrêter le flux mémorial quand vous avez laissé derrière vous Alger et votre innocence. La grisaille parisienne rappelle douloureusement le soleil, la scène le bleu de la mer... Puis, la nuit tombe vite, il n?y a pas de harissa dans les magasins, les gens ne parlent pas dans la rue. Ensuite, personne ne rie à vos blagues, décalage oblige, on ne vous écoute qu?à moitié. La liste est longue. Tout rappelle là-bas. Jusqu?à la mère qui refuse de faire le deuil d?Alger. Didier Tronchet et Anne Sibran ont su capter le déracinement d?Alain, un pied-noir, employé dans une compagnie d?assurances, qui a dû quitter précipitamment les plages de Bab El Oued, à la veille de l?indépendance algérienne. A Paris, il rejoint sa mère, sa s?ur et sa femme qui vient juste d?accoucher. La vie parisienne n?aurait plus jamais aucun éclat pour Alain. Comme si ses rêves et ses espoirs se sont noyés durant la traversée, entre Alger et Marseille. Pourtant, il essayera de mettre du soleil dans sa nouvelle vie, il tentera avec obstination de réinventer son quotidien, sous les yeux admiratifs de sa fille. Là-bas (Aire libre, Dupuis) est une déclaration d?amour filial d?une fille pour son père. Car, on le comprend très vite, Alain n?a jamais été heureux à Paris. Le soleil, il l?a peut-être emporté dans son c?ur, mais il est resté de l?autre côté de la Méditerranée, n?arrive pas à percer le brouillard qui enveloppé le Parisien malgré lui. Là-bas est une ?uvre sensible, subtile. L?histoire prend plus de relief grâce aux dessins de Tronchet qui a alterné couleurs fauves et tristes. Le créateur de Jean-Claude Tergal s?est surpassé, il a su trouver la note juste, le ton adéquat. Là-bas est une ?uvre sublime, toute en nuances.


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