Algérie

«La Banque centrale ne maîtrise pas l'inflation»



-Qu'est-ce qui peut expliquer le recours à  l'émission d'un nouveau billet de banque de 2000 dinars' En dehors de la date symbolique de l'anniversaire de la création du dinar en 1964, l'émission du nouveau billet de 2000 DA intervient dans un contexte économique qui se caractérise notamment par ce qui suit :
D'abord, des dépenses budgétaires faramineuses dans l'investissement public, notamment les infrastructures ainsi que les augmentations des salaires des employés des différentes administrations, c'est-à-dire des secteurs qui ne sont pas directement productifs et qui sont, de ce fait, inflationnistes. Ensuite, des ruptures persistantes de stocks de monnaie qui sont plus visibles au niveau des P et T, notamment, et qui renseignent sur le fait que la Banque centrale n'arrive plus à  suivre et assurer la liquidité de tout le système bancaire.
Ce qui veut dire que la Banque centrale ne maîtrise pas l'inflation et n'assure pas la stabilité des prix, alors que c'est sa principale fonction. Cela est très simple à  comprendre, elle ne maîtrise ni le PIB ni le secteur des finances publiques qui ne dépendent pas de son domaine. En d'autres termes, il n'y a pas de cohérence ni de coordination dans la politique économique des pouvoirs publics. Enfin, l'augmentation sans cesse de la monnaie fiduciaire en dehors du système bancaire ; elle a augmenté de 19% entre 2008 et 2009 et représentait 19% du PIB pour cette dernière année.
 
-Quelles peuvent en àªtre les conséquences ' L'effet immédiat sera une réduction des ruptures de stocks au fur et à  mesure que la Banque centrale va produire, stocker et distribuer les nouveaux billets sur tout le territoire national.
A court terme, il faut s'attendre à  une augmentation de la monnaie fiduciaire en circulation en dehors du système bancaire.
En effet, la priorité accordée par les autorités politiques à  l'emploi et partant à  l'investissement ne permet pas à  la Banque d'Algérie d'utiliser le taux d'intérêt pour drainer l'épargne et ainsi réduire la monnaie en circulation en dehors du système bancaire et le risque d'emballement de l'inflation (une politique qui a montré ses limites dans les premières années des réformes des années 1990), les autorités monétaires tentent d'utiliser un autre subterfuge qui consiste à  geler les billets en circulation en dehors du système bancaire, c'est-à-dire  favoriser la thésaurisation à  défaut de pouvoir drainer cette épargne vers les institutions financières bancaires. Cette politique n'est pas mauvaise en soi , elle est même innovante en matière de lutte contre l'emballement de l'inflation, mais elle entrave toute politique de contrôle de la monnaie ainsi que les mesures relatives à  la promotion du chèque et des instruments de paiement électroniques. Ces dernières mesures sont repoussées aux calendes grecques, voire jetées brutalement par terre. La politique de la Banque centrale en matière de contrôle de l'excès de liquidités n'aura, également, que très peu d'effet.
Par ailleurs, l'inflation va continuer de croître suite au maintien de la politique économique des pouvoirs politiques basée sur les dépenses publiques, d'une part et les mesures en faveur du crédit destiné à  la promotion de l'emploi des jeunes ! (Je me demande pourquoi doit-on faire cette ségrégation dans un pays où 75% de sa population à  mois de 35 ans), d'autre part. Le laxisme en matière d'octroi de crédit qui en découlera conduira à  une augmentation du portefeuille malsain des banques publiques et une perte de productivité de celles-ci vis-à-vis des banques privées. Et ce n'est pas le rituel de la politique d'assainissement-capitalisation des banques publiques qui n'a rien produit de bon (c'est en vérité un gaspillage énorme de ressources destiné à  apaiser momentanément un climat social explosif) et qui se poursuit, qui permettra à  ces dernières de retrouver une bonne santé financière à  même de mettre l'économie nationale sur les rails d'une croissance et un développement économiques  soutenus et durables. Seule une politique saine du crédit le peut. L'argent déversé jusqu'ici dans cette voie permet de créer plusieurs fois l'économie actuelle avec la performance en plus. -Un impact sur le dinar est-il envisagé' En ce qui concerne la valeur du dinar vis-à-vis des principales monnaies étrangères, en sus qu'il est aujourd'hui surévalué du fait de l'existence d'un haut niveau d'inflation réprimée, il l'est également par la politique économique prônée par les pouvoirs publics pour promouvoir l'emploi, c'est-à-dire, l'investissement et qui nécessite pour diminuer le coût de celui-ci (l'investissement et partant sur les prix des produits finis à  travers l'amortissement) à  surévaluer le dinar. Un dinar surévalué entrave toute tentative de réforme économique basée sur l'avantage réel de notre économie et la diversification de ses exportations. Cependant, quelle que soit l'origine de la réévaluation du dinar, les conséquences sont les mêmes.  Au plan du secteur extérieur, les importations des biens et services sont favorisées et la compétitivité externe des biens et services du pays est totalement remise en cause. Les remboursements de notre dette qui sont devenus négligeables seront par contre réduits. Sur le secteur des finances publiques, un dinar surévalué conduit à  une baisse des recettes fiscales et notamment celles liées aux importations des biens et services ainsi que des recettes de la fiscalité pétrolière. Sur le secteur monétaire, les avoirs extérieurs du système bancaire seront moindres et leurs contreparties respectives vont subir également une baisse. Au plan du secteur réel, il conduit à  une diminution des coûts des investissements et des prix des intrants mais entrave la compétitivité externe des produits et services fournis.  En conclusion, la mise en circulation de nouveaux billets de banque, prévue, il y a quelque temps, en sus qu'elle vient confirmer une inflation non maîtrisée, elle n'a pas pour vocation de changer ni la politique économique appliquée à  ce jour par les pouvoirs publics ni à  régler les problèmes créés par celle-ci. Car pour cela, il faut beaucoup plus qu'une politique de replâtrage, elle exige un autre type de gouvernance basée sur la transparence et la cohérence sur les objectifs et les moyens à  mettre en œuvre au plan économique et une responsabilité politique avec son corollaire fondamental, l'alternance, c'est-à-dire, la démocratie.                      


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