Algérie

L'usine Renault Algérie sera inaugurée aujourd'hui



L'usine Renault Algérie sera inaugurée aujourd'hui
La nouvelle usine Renault Algérie sous le nom «Renault Symbol», des véhicules destinés au marché intérieur algérien, le deuxième plus grand d'Afrique avec plus de 400 000 véhicules importés chaque année détenue à 51% par l'Etat algérien et 49% par le constructeur français, sera inaugurée le 10 novembre en présence du Premier ministre algérien Abdelmalek Sellal, des ministres des Affaires étrangères Laurent Fabius, de l'Economie Emmanuel Macron et du PDG Carlos Ghosn. Cela fait suite à l'accord signé lors d'une visite à Alger du président François Hollande en décembre 2012 et qui aura dans un premier temps une capacité de production de 25 000 véhicules par an, 350 emplois directs à la clé, pour arriver dans une seconde phase à 75 000 unités/an.L'Algérie allant vers l'épuisement de pétrole en 2025, de gaz en 2030, ces voitures fonctionneront-elles à l'essence, au diesel, au GPL, au GNW (pour les tracteurs, camions, bus), ou seront-elles hybrides ou solaires, avec la révolution technologique qui s'annonce ' Quel sera le prix de cession de ces carburants et la stratégie des réseaux de distribution pour s'adapter à ces mutations technologi-ques ' A-t-on pensé au nouveau modèle de consommation énergétique qui con-cerne également d'autres utilisateurs ' La mondialisation est là et le principal défi des gouvernants au XXIe siècle est la maîtrise du temps par une meilleure gouvernance, tant locale que mondiale, devant tenir compte de la concurrence internationale comme facteur d'adaptation. La mentalité bureaucratique rentière ignore ce facteur déterminant qui tient compte des contraintes externes et internes. Si l'on veut éviter le gaspillage des ressources financières, évitons la précipitation, opter pour le pragmatisme et bien négocier la dynamisation future de ce copartenariat si l'on veut qu'il puisse durer dans le temps. Comment ne pas rappeler qu'au Maroc, l'usine Renault de Tanger produit deux nouveaux modèles Entry (entrée de gamme) : la famille Dacia Lody et un petit véhicule utilitaire, également décliné en version véhicule particulier. Ce site industriel permettra d'augmenter les volumes et d'élargir l'offre de la gamme M0 sur une ligne de production à capacité de production annuelle de 170 000 véhicules ; à terme, la capacité passera à 400 000 véhicules/an. Par ailleurs, les impacts sur l'environnement de l'usine Renault de Tanger sont ré- duits : les émissions de CO2 sont réduites de 98%, soit environ 135 000 tonnes de CO2 évitées par an. Ces résultats ont été obtenus grâce à des innovations dans les différentes étapes de fabrication, à l'utilisation d'énergies renouvelables ainsi qu'à une gestion optimisée du cycle de l'eau. Quelles perspectives pour l'usine Renault-Algérie ' Dans la pratique des affaires internationales, les firmes sont autonomes dans leur management stratégique. Les managers sont responsables devant leurs actionnaires. Il faut que cette unité soit rentable pour la France et l'Algérie. Dans la pratique des affaires, les sentiments n'existent pas et cela concerne tous les investisseurs qui veulent s'installer en Algérie : Chinois, Arabes, Américains, etc. D'où l'importance de développer les relations en réseaux, des relations interentreprises et d'impliquer la société civile et les universités. Soyons réaliste : ce sera une unité non rentable, à court terme, l'Algérie supportant les surcoûts, donc des subventions qui doivent être transitoires. A court terme, ces surcoûts seront supportés par le Trésor via les hydrocarbures qui génèrent 98% des recettes en devises, pouvant être assimilés au coût de la formation et du transfert technologique, afin que les Algériens sachent construire une voiture par eux-mêmes. Le taux d'intégration souhaitable à terme devrait être au maximum de 50 à 60% ; en cette ère de mondialisation, il n'existe nulle part dans le monde une firme avec une intégration de 100%, et ce, afin de réduire, grâce à la sous-traitance par des réseaux décentralisés, les coûts et être compétitifs. Le taux d'intégration de 42% au départ qui avait été annoncé par l'ex-ministre du secteur à l'occasion de la signature de l'accord ne sera effectif qu'au bout d'une certaine période à la lumière du complexe de véhicules de Rouiba dont le taux d'intégration ne dépasse pas 20%, malgré plusieurs assainissements financiers. Aussi, l'Algérie devra prévoir une formation adéquate dans les techniques de pointe, car on ne construit plus une voiture comme dans les années 1970/1980. Comme il ne sera jamais question que Renault supporte les surcoûts aussitôt les avantages fiscaux et financiers arrivés à terme. Pendant la période d'exonérations fiscales et d'avantages accordés par le gouvernement algérien, l'unité pourrait tenir face à ses concurrents. Mais aussitôt les avantages arrivés à terme, cette unité devra rembourser ses emprunts et payer ses charges fiscales, et ce, dans le cadre de la règle 49/51. A ce moment-là, l'unité ne peut être rentable avec une capacité si faible. Aussi, les négociations entre le groupe Renault et l'Algérie doivent porter, outre sur le transfert technologique et managérial, ce que mon ami le professeur Jean-Louis Guigou, délégué de l'Ipemed, qualifie de «colocalisation», un partage de la valeur ajoutée entre la France et l'Algérie, sur d'autres gammes avec une capacité extrapolée à l'horizon 2020 d'un minimum de 200 000 à 300 000 unités par an. Si ces prévisions se réalisent, la capacité sera excédentaire, forcément dans la mesure où nous sommes dans une économie ouverte où vous ne pouvez imposer aux consommateurs algériens d'acheter Renault, l'Algérie ayant bon nombre d'autres marques via les concessionnaires. D'où la nécessité pour la fiabilité de ce projet des exportations à travers les réseaux internationalisés de Renault/Nissan, l'Algérie n'ayant pas de pratiques commerciales internationales. Dès lors se posera la règle des 49/51, qui ne sera pas opérationnelle pour une firme internationalisée comme Renault/Nissan, laquelle se conformera aux règles de l'Organisation mondiale du commerce, la voiture étant une marchandise soumise à la concurrence internationale et surtout commercialisant une marque. Augmenter les capacités et le transfert technologique et managérial Pour la pérennité de l'usine Renault-Algérie, il s'agira de favoriser l'émergence et l'interaction positive des différentes parties prenantes composant les organisations, que ces parties prenantes soient internes (salariés, managers) ou externes (fournisseurs, clients), du fait que l'économie est de plus en plus ouverte et que les firmes travaillent avec des parties prenantes éparpillées à travers le monde. D'où l'importance pour Renault-Algérie du management des connaissances (knowledge management) qui requiert plus que jamais la maîtrise appropriée de technologies de l'information et de la communication (TIC). Dans cette perspective dynamique, d'adaptation à ces mutations, les réponses apportées doivent favoriser les pôles d'activité compétitifs et dynamiques, d'autant plus que l'Algérie, face aux nouvelles mutations énergétiques mondiales, doit penser d'ores et déjà à la transition énergétique avec l'épuisement de ses ressources d'hydrocarbures traditionnelles à l'horizon 2030. Pour l'Algérie qui possède d'importantes potentialités, il devient impérieux de relancer son tissu productif, et cette usine doit s'inscrire dans le cadre d'un co-partenariat gagnant-gagnant en investissant dans l'économie de la connaissance. Le projet de Renault en Algérie, et d'ailleurs de tout autre projet restructurant, doit permettre d'accroître la valeur ajoutée interne et de créer des emplois productifs et non des emplois/rentes, face à la concurrence internationale. Il faut placer l'entreprise et le savoir au c?ur de la stratégie, devant cibler à terme l'exportation, notamment vers le continent africain qui, à l'horizon 2030, sera le continent qui dynamisera l'économie mondiale. En conclusion, l'Algérie doit privilégier ses intérêts propres et tisser également des copartenariats avec d'autres pays (Espagne- Italie- Canada ) et à cette occasion je salue la stratégie du ministère de la Défense qui vient d'inaugurer bon nombre de réalisations industrielles avec nos amis allemands qui auront un impact, à l'instar de toutes les industries militaires, sur la société civile. Egalement avec nos amis américains la coopération algéro-américaine étant en marche comme par exemple les contrats récents entre General Electric et Sonelgaz, sans oublier les nombreux partenariats avec les pays émergents dont la Chine. Le défi de l'Algérie est la nécessaire adaptation aux nouvelles mutations mondiales en réhabilitant l'entreprise publique, privée locale et internationale en lui enlevant toutes les contraintes d'environnement dont la bureaucratie paralysante, et son fondement, l'économie de la connaissance. C'est que la politique socioéconomique, depuis l'indépendance politique, a été menée exclusivement par l'Etat, avec plusieurs variantes d'organisation : autogestion 1963/1965, sociétés nationales 1965/1979, réorganisation des sociétés nationales en microsociétés de 1980/1987, fonds de participation (1988/1994) holdings 1995/1999 en cinq méga-holdings en 2000, sociétés de gestion des participations de l'Etat (SGP) 2003/ à nos jours et, actuellement, l'on parle de groupes industriels. Or, l'efficacité d'une organisation est subordonnée d'abord à une cohérence et visibilité dans la démarche. Ensuite, celle-ci doit s'insérer au sein d'une stratégie de moyen terme. L'héritage d'une économie administrée est fortement présent dans la philosophie et les pratiques de la vie économique et sociale. Puisse notre pays, comme j'ai eu à le rappeler lorsque la présidence de la République m'a invité en tant que personnalité nationale pour la révision constitutionnelle, rassembler grâce à un dialogue productif permanent, fondement de la bonne gouvernance , le plus grand ignorant étant celui qui prétend tout savoir, toutes les forces économiques, sociales et politiques afin de rétablir la confiance entre l'Etat, à ne pas confondre avec les régimes éphémères , et les citoyens, sans laquelle aucun développement fiable ne pourra se réaliser. (Suite et fin)




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