Algérie

L'université algérienne: S.O.S. le savoir en naufrage



Le système algérien est-il frigide ou manque-t-il d'intelligence ? Fonctionne-t-il selon un archétype suranné dont il ne peut s'en défaire ou refuse-t-il sciemment de se moderniser ? Parce que se moderniser, c'est « s'obliger à s'adapter » aux ambitions sociales, particulièrement, à celles de la jeunesse estudiantine désireuse de faire valoir son droit inaliénable: une formation universitaire à la hauteur de ses aspirations. «Le meilleur» exemple en «pis» est, à notre avis, l'université algérienne qui est en train de faire naufrage, doucement mais sûrement et ce, au vu et au su des politiques. Ces derniers persistent, dangereusement, dans leur indifférence autiste aux doléances motivées et aveugles à la déconfiture, pourtant, patente de l'université. Le système politique prime-t-il sur l'entité universitaire ? La communauté universitaire assiste, impuissante, à ce « lèse-intellectualité » perpétré par des assassins de la culture. Cette tragédie que vit, aujourd'hui, l'institution universitaire est due à la dévalorisation criminelle de la fonction intellectuelle sans parler, bien sûr, des vides culturel et spirituel abyssaux ainsi que les pesanteurs idéologiques dévoyées. Les pays occidentaux ont acquis leur actuel niveau de technologie enviable parce qu'ils ont érigé un véritable culte sacral au savoir au point de l'élever au rang d'une seconde religion. C'est, pourtant, au niveau de la fonction intellectuelle, sur laquelle insiste explicitement notre Saint Coran, que se situe toutes les chances de réussite sociale et nationale à la condition sine qua non qu'elle ne soit pas coupée des réalités sociales. Le potentiel intellectuel, qu'on le veuille ou pas, est l'unique assurance de la croissance de la productivité et du développement social, économique et culturel. Aujourd'hui, l'intelligentsia nationale est exclue sciemment par des opportunistes au pouvoir pour des desseins suspects. Ce qui explique que l'Algérie est devenue un corps sans âme du fait que la dynamique de changement - et donc d'adaptation - reste, pour l'heure, inexistante. Cette situation du statu quo, voulue et maintenue par des forces occultes, périclite le pays dans un irrémédiable que nul ne peut présager ses retombées. Une stabilité factice n'équivaut en rien une stabilité concrète qui garantit un équilibre et une paix sociaux effectifs. Ces derniers sont établis par consensus car leur dynamique est motivée par des valeurs intrinsèques telles que la justice sociale, l'égalité de tous devant la justice, l'égalité des chances, le mérite... De ce fait, on pourrait dire que la démocratie, en Algérie, est « visiblement en vue ». Il y a, certes aujourd'hui, la classe politique qui jouit de tous les privilèges tels que la considération sociale et un salaire faramineux qui dépasse tout entendement. Par contre, le système refuse de voir l'élite intellectuelle s'organiser en classe scientifique par crainte de se constituer en force d'opposition dont le contrôle échappe au Pouvoir. D'ailleurs, comment peut-elle l'être, alors que le statut particulier de l'enseignant-chercheur est bloqué sciemment depuis des lustres sans jamais voir le jour. Il est à rappeler aux décideurs que le système salarial est plus favorable aux opportunistes qui se sont emparés des postes politico-administratifs (chefs de daïra, walis, députés...) souvent par trabendisme, «régionalisme» et/ou «tribalisme», alors que les cadres de pointe se voient relégués aux postes de sous-ordre. Pourtant « L'article 04 du décret exécutif 98.254 du 17 août 1998 définit clairement [...] que l'habilitation universitaire sanctionne en particulier la reconnaissance d'un haut niveau scientifique(1) » (de l'enseignant-chercheur). L'université algérienne vit, actuellement, un naufrage sans précédent. Autrefois, sanctuaire du savoir, elle est devenue, de nos jours, un parking pour chômeurs diplômés. L'insuffisance de sa qualité de service a favorisé la médiocrité de la formation dont pâtissent nos étudiants, aujourd'hui, avec, pourrait-on dire, la consécration du Pouvoir. Il faut rappeler que l'université est la seule et unique institution qui forme les élites pour la relève. L'impact de la recherche scientifique sur le développement économique n'est pas à démontrer. Cependant, construire des infrastructures universitaires, allouer des budgets conséquents à la recherche scientifique, c'est bien mais insuffisant si le principal facteur, qu'est le chercheur lui-même, en est exclu. C'est pourquoi, lorsque l'université s'enrhume, toute la société éternue. Toutefois, si son rôle n'est pas très reluisant, nous continuons à croire, bon an mal an, que tout n'est pas complètement noir. L'espoir reste encore permis si certaines conditions, que nous estimons honnêtes, se réunissent: 1°/ Cesser la massification des effectifs estudiantins et revenir au système d'élite. 2°/ Le passage à l'année supérieure doit se faire sur le seul critère « mérite » et ne doit répondre, aucunement, aux taux imposés par la tutelle. Le personnel pédagogique est le seul habilité à juger et jauger les compétences de l'étudiant. 3°/ Créer une classe scientifique au même titre que la classe politique, de sorte que rien ne se décide par les politiques sans consulter au préalable les scientifiques. Les deux classes conjuguent, au même mode et en même temps, leurs efforts pour l'intérêt supérieur de la nation et la nation seulement. 4°/ Accorder à l'enseignant-chercheur « le même statut que celui du député » avec tous les privilèges octroyés à ce dernier, d'abord la considération sociale et non seulement le salaire. 5°/ Lui accorder l'immunité scientifique au même titre que l'immunité politique et parlementaire. 6°/ Accorder toute l'importance morale et matérielle au chercheur et à la recherche scientifique. L'intellectuel se sentant, ainsi, reconsidéré dans sa société, il se donne à fond. Dieu dit dans le Coran: « Dieu élève (en dignité) les croyants et ceux qui détiennent le savoir(2). » Alors, nos chefs sont-ils ou non des musulmans ? Se conforment-ils aux préceptes coraniques ou n'en tiennent «hérétiquement» aucun compte ? L'Islam est-il ou non la religion de l'Etat comme le stipule l'article 2 de la Constitution nationale ? Qui sont ceux qui nous gouvernent ? Ils se doivent de s'identifier à la société. Politiquement parlant, l'Etat a tous les moyens moraux et matériels pour contenir l'exode massif des compétences nationales vers l'étranger, notamment avec l'émigration positive qui consiste à pomper la sève intellectuelle des pays comme le nôtre. L'université algérienne pourrait redorer son blason et redevenir, comme par le passé, le fleuron le plus beau et le plus précieux du savoir car, que l'on le veuille ou non, nous faisons partie de la nation «Iqra'». Marginaliser l'université signifie marginaliser la jeunesse. Celle-ci a perdu foi aux études et aux diplômes qu'elle estime dévalués pour devenir de simples cartons officiels. Une jeunesse qui a perdu tous ses repères, écartelée entre « le terrorisme » et « les harraga », entre « la drogue » et « la criminalité » au lieu d'être le réceptacle d'une bonne éducation et d'un savoir performant comme par le passé. Ce qui vaudrait... «l'espoir de toutes les espérances».  Aux bons gestionnaires, la Nation est reconnaissante. *Docteur ès lettres, Université de Chlef


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