Algérie

L'option du «tout tramway» fait des heureux… et des inquiets



De nombreux chiffres affichés dans le Plan quinquennal 2010-2014 soulèvent des questions, à commencer par son montant de 286 milliards de dollars. Les 14 nouveaux projets de tramways prévus sont sans doute l'une des grandes intrigues dans les 30 milliards de dollars consacrés aux transports.

Le choix stratégique du «tout tramway» pour le transport urbain en Algérie se précise dans le nouveau Plan quinquennal. Sans débat. «C'est, par excellence, le transport qui s'inscrit dans une pensée urbanistique de la ville. Il ne convient pas partout. Son emprise au sol est importante, son agression sur l'ancien bâti avérée. Sans compter qu'il requiert une culture citadine de la sécurité. Nous aurions mieux fait de faire d'abord le bilan des trois tramways en cours de réalisation (Alger-est, Oran et Constantine)», explique Salah Ferdji, urbaniste à Sidi Bel Abbes.

 Cette ville moyenne figure justement parmi les cinq premières villes dont le projet tramway a déjà bénéficié du lancement des études. Les autres villes sont Mostaganem, Ouargla, Sétif et Batna.

 41 rames Citadis d'Alstom devaient circuler entre le rond-point du «Fusillé» (Alger-Ruisseau) et Bordj El Kiffan depuis le début de l'année 2010. La livraison des autres tramways, Oran 18 km, 32 stations et Constantine 8 km, 11 stations, a déjà glissé sur l'agenda 2011.

 En outre, les 14 tramways promis par Amar Tou, le ministre des transports, ne sont pas une bonne nouvelle immédiate pour tout le monde. «Si j'en parle, je sais ce que cela signifie un chantier de tramway pour la vie des riverains. Nous avons subi un sinistre durant trois ans, nous les commerçants du centre ville. Nous ne sommes pas près de nous en relever», raconte un libraire de Bordj El Kiffan.

Risques en série

L'option «tout tramway» présente des risques en série. Elle bouscule les plans d'aménagement des villes et met un plan de charge «hors gabarit» sur les épaules de l'EMA, l'entreprise du métro d'Alger, désignée de fait opérateur de transport urbain en Algérie, alors qu'elle n'a toujours pas de chiffres d'affaires, plus de 20 ans après sa création. La déstructuration de son entreprise sÅ“ur, la SNTF (6,5 milliards de dinars de déficit en 2009), ne rassure pas sur la capacité managériale du secteur des transports sur rail. La filière tramway devrait être un test véritable de la volonté du gouvernement de réduire le recours aux importations durant ce Plan quinquennal. Alstom a remporté, en novembre 2007, pour 300 millions d'euros sur 660 millions, incluant génie civil, matériel roulant et infrastructures à Oran et Constantine. Le groupe français a compris, depuis, qu'il avait intérêt à intégrer localement une partie de son activité matériel roulant. Un joint-venture avec Ferrovial implanté à Annaba a été projeté depuis une année et devrait voir le jour avant fin 2010, assure-t-on au ministère des Transports. Il s'agira d'assembler des rames de tramways.

Alstom talonné par Siemens, Bombardier

Le gigantesque marché qui se dégage avec le Plan quinquennal 2010-2014 devrait conforter cette orientation de Alstom vers la délocalisation en Algérie d'un volet de son activité. Mais cela ne le mettra sans doute pas à l'abri de la concurrence. Siemens AG et le Canadien Bombardier, les deux autres géants mondiaux des systèmes de transports urbains, vont tenter d'obtenir une partie du marché des 14 tramways du Plan quinquennal. Les arguments dans une telle compétition ne resteront pas uniquement commerciaux. Une campagne sur le net, par exemple, rappelle périodiquement qu'Alstom n'est pas irréprochable sur le plan de la RSE (Responsabilité Sociale de l'entreprise). Le groupe français a accepté d'étendre une ligne de tramway dans Jérusalem occupée sans demander l'avis de l'autorité palestinienne.




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