"L'officialisation de tamazight ne nous a pas été offerte"

La députée du RCD, Lila Hadj Arab, a animé, hier, à la Maison de jeunes de Naciria, dans la wilaya de Boumerdès, une conférence sur le parcours du combat identitaire amazigh en Algérie, et ce, dans le cadre du programme de célébration du 38e anniversaire du Printemps berbère de 1980, arrêté par la section locale du RCD. Maître Hadj Arab a mis l'accent, lors de son intervention, sur l'importance historique des événements qui ont eu lieu en Avril 1980, suite à l'annulation d'une conférence de Mouloud Mammeri sur la poésie kabyle, à l'université de Tizi Ouzou, sur l'acheminement du combat identitaire amazigh, et qui ont abouti à la reconnaissance de tamazight en Algérie, mais ont, aussi, contribué à l'émergence du combat pour l'amazighité dans tous les pays de l'Afrique du Nord, où, selon elle, la revendication de l'identité amazighe est de plus en plus forte, notamment en Tunisie. "Le régime comme les partisans de l'arabisation en Algérie ont tout importé, à savoir l'idéologie, la doctrine, le financement, contrairement au mouvement amazigh qui est né en Kabylie et qui s'est exporté par la suite vers le Maroc, la Libye et les autres pays de l'Afrique du Nord'', a-t-elle martelé. L'oratrice a rendu hommage aux 24 détenus d'Avril 80, qui encouraient de lourdes peines et qui ont fini par être libérés le 25 juin de la même année, selon elle, grâce à une mobilisation citoyenne pacifique. Elle a enchaîné avec un hommage à Mouloud Mammeri, qu'elle a qualifié de figure historique et nationale : "Tous les officiels qui sont venus en Kabylie après l'officialisation de tamazight ont rendu hommage à Mouloud Mammeri, dont certains, à l'époque, avaient essayé de remettre en cause son algérianité.'' Me Lila Hadj Arab a estimé que l'officialisation de tamazight est le résultat de tout un combat long et périlleux. "Si le Président avait voulu l'officialisation de tamazight, il l'aurait intégrée dans son programme électoral. L'officialisation de tamazight ne nous a pas été offerte. Nous l'avons arrachée grâce à de lourds sacrifices. Nous l'avons eue grâce aux 126 martyrs de 2001, aux marches en faveur de tamazight organisées ces dernières années, ainsi qu'au mouvement du M'zab où des élus du RCD ainsi que du FFS ont été condamnés, à l'image du P/APC de Berriane, qui a été condamné à deux ans de prison'', a-t-elle dit. Elle a aussi appelé à la vigilance face à la manipulation dont peut faire objet l'amazighité à l'avenir. "Le combat n'a pas abouti à 100%. Dans la Constitution, tamazight est considérée comme une langue secondaire, ce qui dénote la mauvaise foi de ce pouvoir. Ils ont verrouillé la Constitution concernant l'arabe et l'islam, qui sont irréversibles et donc intouchables, contrairement au texte de loi sur tamazight, qui peut faire l'objet d'amendement à tout moment.'' Puis, l'oratrice a profité de cette occasion pour relater aux présents le contenu du dialogue qui a eu lieu entre Bouteflika et Saïd Sadi en 1999 autour des événements du Printemps 1980. "Ouyahia s'est exprimé ces derniers jours en disant que Bouteflika était contre la répression sanglante qui a eu lieu à l'université de Tizi Ouzou en Avril 1980. Ce dont Bouteflika a fait part à Saïd Sadi lors d'un entretien en 1999 ne s'assimile pas à de la générosité ou à de la compassion envers le mouvement amazigh, mais plutôt à un plan machiavélique, car il avait l'intention de discréditer Mouloud Mammeri au regard des étudiants de l'époque, en l'invitant, ce jour-là, au siège de la wilaya et en le faisant accompagner jusqu'à l'université par des agents de la police, ce qui aurait incité les étudiants à s'attaquer au défunt Mouloud Mammeri'', précisait-elle. À noter qu'une minute de silence a été observée avant le début de cette conférence en hommage aux victimes du crash de l'avion militaire à Boufarik.NASSIM OUHIB