Algérie

L’offensive du Nord Constantinois a permis de raviver la flamme de la Révolution



L’offensive du Nord Constantinois a permis de raviver la flamme de la Révolution
Publié Le : Mercredi, 17 Août 2022 l’APS

CONSTANTINE- L’offensive du 20 août 1955 du Nord Constantinois dont l’architecte est le chahid Zighoud Youcef a été l'une des étapes majeures dans l’histoire de la lutte armée pour la libération du pays du joug colonial, permettant de raviver la flamme de la Révolution libératrice et de desserrer l'étau sur les Aurès Nememcha et les autres régions du pays, ont soutenu des spécialistes en histoire.
L'insurrection du 20 août 1955 a été lancée dix mois à peine après le déclenchement de la guerre de libération nationale, exactement à midi. Elle a constitué un second souffle pour la Révolution et un tournant décisif dans le combat du peuple algérien. Nombre d’historiens y voient même en elle le véritable début de la Révolution, les plus grandes offensives de l’Armée de libération nationale et les premières planifiées par Zighoud Youcef surnommé Si Ahmed, commandant de la Wilaya II historique.
Plusieurs spécialistes de l’histoire de la Révolution dont le chercheur en histoire et littérature et ancien recteur de l’université Emir Abdelkader, Dr. Abdallah Boukhelkhal, considèrent que l’offensive du 20 août 1955 ressemble beaucoup au déclenchement de la Révolution du 1er novembre 1954
Vu qu'elle s’était caractérisée par le secret total de la préparation, une excellente planification et un sursaut collectif en faveur de l’émancipation, traduite par la participation des partis politiques, du mouvement nationaliste, de l’association des Oulémas musulmans algériens et des Scouts musulmans algériens.
Pour cet universitaire, spécialisé dans l’histoire du héros Zighoud Youcef, la "seule différence" est que le déclenchement de la Révolution de novembre 1954 a eu lieu à minuit, tandis que le lancement de l’offensive du 20 août 1955 s’est fait à midi et par laquelle les artisans de l’épopée du Nord-constantinois ont voulu montrer à l’occupant que le peuple algérien avec toutes ses composantes était disposé à consentir les plus grands sacrifices pour libérer la patrie, contrairement à la propagande française qui martelait à l’opinion publique que les déclencheurs de la Révolution de novembre sont des "hors-la-loi" et des "bandits".
Les évènements du 20 août 1955 ont contribué à l’inscription de "la cause algérienne" à l’ordre du jour de l’Assemblée générale de l’Organisation des Nations-Unies le 30 septembre 1955 à la demande de 15 Etats des 29 ayant participé à la conférence de Bandung (Indonésie), a relevé Dr. Boukhelkhal.
L’objectif visé par les chefs de la Wilaya II historique, au travers l’insurrection du 20 août 1955, était de répondre à l’appel de Chihani Bachir, chef temporaire alors de la région des Aurès, au soutien des régions avoisinantes pour briser le blocus imposé aux Aurès. Cela avait démontré les liens solides entre ces régions et le niveau de coordination, a souligné à l’APS le moudjahid Moussa Boukhemisse.
Les chefs des deux régions ont voulu, par cette offensive, réagir aux politiques françaises et aux pressions faites sur les Algériens pour les maintenir en état de neutralité à l’égard de la Révolution. C’est pourquoi, a ajouté M. Boukhemisse, ils ont tenu à impliquer le plus grand nombre de citoyens dans cette lutte et ses assauts qui avaient ciblé 93 sites coloniaux à travers les campagnes et villes des wilayas de Guelma, Skikda, El Tarf et Constantine.
L’offensive a eu des "résultats positifs" et l’étau imposé à la région des Aurès Nememcha a été desserré avec le déplacement des troupes de l’armée coloniale vers le Nord-constantinois pour contenir l’insurrection populaire, a ajouté ce moudjahid résidant dans la commune d’Emdjez Edchich (Skikda), affirmant que "le bilan de la répression française de cette révolte est de 12.000 Algériens tués dont 6.000 à Skikda".
Cette répression sanglante fut des plus barbares. Des victimes encore vivantes étaient enterrées dans des fosses par des bulldozers, a relevé ce moudjahid dans son témoignage.

Douar Souadek, berceau du militantisme de l’architecte de l’offensive du 20 août 1955

C’est au lieudit Douar Souadek, à l’Est de l’actuelle commune Zighoud-Youcef (ex Smendou), que naquit l’architecte de l’offensive du 20 août 1955 Zighoud Youcef et s’abreuva des idées nationalistes aux côtés de Didouche Mourad, Boucheriha Abbas, Bengherzallah Belgacem et Beloucif Ali qui dirigeaient cette zone.
En 1938, Zighoud Youcef est désigné chef d’une cellule du Parti du peuple algérien (PPA) à Condé Smendou (actuelle Zighoud Youcef) et supervisa l’organisation des manifestations du 8 mai 1945 avant de rejoindre en 1947 l’Organisation spéciale du Mouvement pour le triomphe des libertés démocratiques (MTLD) jusqu’à la découverte de l’organisation par les services coloniaux français et l’arrestation de Zighoud et de plusieurs centaines de militants en 1950.
L’APS s’est rendue au village Souadek où se trouvait le siège de la Wilaya II historique (1954-1956) et se réunissaient les moudjahidine pour préparer la guerre de libération nationale. Selon Dr Ahcène Tlilani, directeur de la Fondation Zighoud-Youcef et actuel directeur de la culture et des arts de la wilaya d’Annaba, c’est dans ce village que le forgeron révolté, surnom donné à Zighoud Youcef par cet universitaire dans l’un de ses écrits, fit ses premiers pas de militantisme nationaliste et c’est aussi le lieu où était tombé au champ d’honneur le chahid Didouche Mourad le 18 juin 1955 lors de la bataille Boukerker, suite à quoi Zighoud Youcef était désigné chef de la Wilaya II historique.
Pour Tlilani, Souadek a été une école pour l’artisan de l’épopée du 20 août 1955 où il avait pris la décision de lancer l’offensive du Nord-constantinois et y avait planifié ses actions lors du congrès de Zamène en présence de plusieurs zones dans l’Est de l’Algérie.
Lors de son internement à la prison d’Annaba, Zighoud Youcef planifiait son évasion avant même son procès et il était parvenu à façonner une copie de la clé de la prison à partir d’un morceau de fer qu’il avait pu se procurer. La nuit du 21 avril 1951, il s’évada en compagnie de trois autres militants, à savoir Barkat Slimane, Amar Benaouda et Abdelbaki Bekhouche, a ajouté le directeur de la Fondation Zighoud Youcef.
Dr. Boukhelkhel rapporte une anecdote liée à l’évasion de Zighoud Youcef en 1951 lorsque ce dernier se réfugia dans la ferme de la famille Boukhelkhel à Djebel El Ouahch (Nord de Constantine). Deux camions de l’armée française encerclèrent alors la ferme et lorsque les soldats entrèrent à la maison, le propriétaire dans un sang froid épique leur assura que le fugitif recherché n’était point dans la ferme et leur présenta Zighoud Youcef qui était alors debout devant eux comme étant son beau frère.
Lors du congrès de la Soummam, tenu le 20 août 1956 dans la localité d’Ifri (Bejaia), Zighoud Youcef fut chargé de se rendre dans la région des Aurès pour s'enquérir des raisons ayant empêché Mustapha Benboulaïd, chef de la Wilaya I historique, d’assister au congrès, a souligné Dr. Boukhelkhel. Sur son chemin vers les Aurès, Zighoud Youcef, accompagné de trois djounoud, est surpris par les forces de l’armée française à El-Kherba près de Sidi Mezghiche (Skikda) le 25 septembre 1956 et tomba au champ d’honneur après une farouche résistance à la soldatesque coloniale.



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