Algérie

L'observateur algérien jette l'éponge et accuse



En se prononçant dimanche pour la poursuite de sa mission d'observateurs en Syrie, la Ligue arabe ne désespère visiblement pas de parvenir à  ramener le régime de Bachar Al Assad à  la raison. Au vu de la situation sur le terrain, le vœu de l'organisation panarabe passe au mieux pour un excès d'optimisme et au pire pour du cynisme ou un manque flagrant de discernement. Loin de s'être apaisée, la crise syrienne risque au contraire de connaître une nouvelle escalade. La crainte d'un tel scénario est d'autant plus justifiée après le discours enflammé prononcé mardi par Bachar Al Assad, dans lequel il avait juré de «frapper les terroristes d'une main de fer» et promis de faire du «rétablissement de la sécurité» sa priorité absolue.
Entre-temps, les tueries ne se sont pas arrêtées depuis le 26 décembre dernier, date du «débarquement» à  Damas sous le crépitement des flashs de la presse locale du général soudanais Mohamed Ahmed Moustapha El Dabi et de ses 163 hommes. Leur présence sur les lieux qui devait en principe coïncider avec un arrêt des «hostilités» n'a pas empêché, en tout cas, la mort de 400 personnes et la multiplication d'accrochages meurtriers entre les troupes de Bachar Al Assad et les éléments de l'Armée syrienne libre (ASL). Pour le moins féroce, la violence n'a également pas épargnée les envoyés spéciaux des médias internationaux, puisque Gilles Jacquier, grand reporter sur la chaîne de télévision publique France 2, a été tué hier à  Homs, dans le centre de la Syrie. Selon des témoignages, un obus est tombé sur un groupe de journalistes qui se trouvait en reportage dans cette ville. Pour l'opinion internationale et l'opposition syrienne, la mission d'observateurs sert davantage d'alibi à  Bachar Al Assad pour se maintenir au pouvoir. Si déjà la nomination du très problématique général El Dabi à  la tête de cette mission a été décriée, tant tout le monde le soupçonne d'être impliqué dans la répression des population du Darfour, il sera pour le moins difficile d'accorder un quelconque crédit à  son travail, puisqu'il s'avère finalement que les observateurs n'ont vu que ce que les services syriens ont bien voulu qu'ils voient. Un journaliste français tué   Cet état de fait a d'ailleurs conduit des membres de la mission à  remettre publiquement en cause le discours rassurant tenu par El Dabi sur la situation. A ces signes flagrants de tiraillements internes, cette fameuse mission d'observation risque de voler en éclats après la décision prise par l'un de ses membres de claquer la porte pour dénoncer les «crimes» commis par le régime de Bachar Al Assad.  Dans une interview accordée mardi à  la chaîne qatarie Al Jazeera, l'observateur algérien Anouar Malek, puisque c'est de lui dont il s'agit, a en effet surpris tout son monde en accusant le régime syrien de mises en scène et de commettre des «crimes en série». «Les observateurs ont été trompés (...). Il s'agit d'une mascarade. Le régime a mis en scène et fabriqué la plupart des choses que nous avons vues pour empêcher la Ligue arabe d'agir» contre Damas, a-t-il lancé devant des millions de téléspectateurs. Pour enfoncer plus profondément le clou, M. Malek a indiqué avoir «vu un véritable désastre humanitaire». Pis encore, l'observateur algérien a soutenu que «le régime ne s'était conformé à  aucun point du plan arabe (…) et que les observateurs n'ont aucune latitude pour mener correctement leur mission».
Ses propos sont loin d'être des affabulations, puisque des observateurs ont été effectivement la cible d'attaques lundi. Des attaques dénoncées aux quatre coins de la planète et qui ont provoqué la suspension de l'envoi d'une équipe supplémentaires d'observateurs. Une chose est sûre : en plus d'avoir pour effet de rendre complètement caduc le travail de la mission arabe, le témoignage accablant d'Anouar Malek contre le régime de Bachar Al Assad pourrait bien précipiter le lâchage total de la Syrie par la Ligue arabe (et, en plus, avec la bénédiction d'Alger) et sonner l'entrée en scène de l'ONU dans le jeu.
L'hypothèse est d'autant plus probable, lorsque l'on sait que l'Arabie Saoudite a décidé hier, sans avertir, d'imposer des sanctions contre Damas.
 


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