L'intérêt national ou celui des nationaux '

Nuages gris, temps incertain, Amar Ghoul, ministre des bus, des bateaux, avions et taxis, vient encore de reporter l'ouverture du ciel national à un jour futur, le plus loin possible du moment. L'argument n'a pas changé, c'est l'intérêt national qui est une fois de plus brandi pour repousser l'échéance.Il faudrait pourtant commencer à se demander si l'intérêt national joue contre l'intérêt des nationaux. Car dans le cas où l'Algérie est le plus grand pays d'Afrique, le transport aérien, du moins interne, devient une nécessité. Sans ouvrir le secteur, comme le craint le ministre, aux «entreprises étrangères qui capteront tout le marché», il apparaît urgent de confier une partie du segment du transport aérien à des privés nationaux comme cela s'est fait pour les bus, pour soulager la demande et réduire les prix.Rappelons qu'il faut 30 heures de bus pour rallier Tindouf à Annaba et que le coût du billet d'avion correspondant équivaut à faire un Oujda-Londres. Sans vendre du libéralisme, on se doit de rappeler une nouvelle fois que le transport aérien n'est plus un secteur stratégique comme l'énergie ou l'éducation, il ne s'agit que de transporter une personne ou un colis de spaghettis d'un point à un autre. En théorie, tout ce qui serait pour l'intérêt des nationaux devrait être dans l'intérêt national.Mais Amar Ghoul a bien compris que dans ce cas comme dans d'autres, similaires, trois intérêts se croisent, celui du pays, celui du régime et celui des Algérien(ne)s, qui ne sont pas les mêmes, d'autant qu'il faut là y ajouter celui du ministre, dont la gestion du chantier de l'autoroute Est-Ouest est encore suspectée d'avoir enrichi des intérêts privés. «Ouverture quand les conditions seront réunies.» Phrase-clé du régime qui n'ouvre aucun domaine en repoussant l'échéance au jour où les conditions seront réunies, tout en faisant en sorte qu'elles ne le soient jamais.