Algérie

L'interdiction des manifestations date de 10 ans



 
Il ne s’agit là ni d’un décret ministériel, ni d’un décret d’état d’urgence, ni d’une ordonnance, mais d’une décision prise par le gouvernement en 2001.
Son maintien est une forme d’atteinte à la libre expression. En effet, cette décision, qui demeure en vigueur jusqu’à ce jour, a été prise lors d’un Conseil de gouvernement tenu dans la précipitation, à la suite de la marche historique du 14 juin 2001 initiée par le mouvement citoyen des archs. Une manifestation qui avait vu déferler sur Alger près d’un million de personnes et qui a été malheureusement violemment réprimée.
Les représentants de ce mouvement d’essence populaire, né après les événements qui ont secoué la Kabylie et d’autres régions du pays, voulaient mettre le premier magistrat du pays devant ses responsabilités. Seulement, la manifestation a viré vers l’émeute et la casse. Il y a eu mort d’homme et actes de sabotage. Sans tarder, le gouvernement dirigé par Ali Benflis a réagi pour annoncer sa ferme détermination à faire face aux dérives qui pourraient surgir dans le proche avenir. Benflis passe à l’acte. Le 18 juin 2001, il réunit son équipe, qui se penche sur la situation prévalant dans le pays.
Des décisions sont alors prises : «Le gouvernement s’incline devant la mémoire des victimes, il déplore les actes de sabotage et de vandalisme commis à l’encontre des biens du peuple, privés ou publics. Il exprime en outre sa ferme détermination à faire face aux graves dérives et dérapages constatés à l’occasion des événements tragiques et douloureux qui se sont produits (émeutes en Kabylie suite à l’assassinat d’un lycéen et la marche du 14 juin) et que certaines parties ont tenté d’exploiter pour installer le pays dans le chaos et l’anarchie.»
En conséquence, le gouvernement, à sa tête Ali Benflis, a décidé de suspendre jusqu’à nouvel ordre l’organisation des marches dans la capitale. Une interdiction renouvelée le 2 juillet 2001 par le chef du gouvernement lorsque le mouvement des archs avait manifesté son désir d’organiser une autre marche dans la capitale. Ali Benflis avait annoncé à l’endroit des responsables de ce mouvement que «les autorités étaient prêtes à recevoir une délégation mandatée, à condition qu’elle ne revête pas la forme d’une manifestation de rue». Avec du recul, les observateurs les plus avertis pensent que les émeutes qui se sont déclenchées lors de la marche pacifique du 14 juin 2001 ont été provoquées sciemment dans le but d’interdire tout défilé de l’opposition et de pouvoir la confiner dans son silence. Depuis 2001, nombre de réunions publiques dans d’autres régions n’ont pas été autorisées. Il est vrai que le ministre de l’Intérieur et le wali compétent territorialement peuvent, selon le décret d’état d’urgence, ordonner par arrêté «la fermeture provisoire des salles de spectacle, lieux de réunion de toute sorte et d’interdire toute manifestation susceptible de troubler l’ordre public». Mais aujourd’hui, avec la levée de l’état d’urgence, seule la décision signée, cautionnée et approuvée par Ali Benflis est opérationnelle.

 


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