Algérie

L'impair diplomatique de De Mistura



Comme attendu, le huitième round du cycle des pourparlers pour la Syrie parrainé par les Nations unies s'est achevé jeudi à Genève en donnant lieu au même constat d'échec que celui ayant sanctionné les sept précédents. En annonçant la clôture de ce huitième round, Staffan de Mistura l'envoyé spécial pour la Syrie de l'ONU qui à nouveau a tenté de faire dialoguer le régime et l'opposition a amèrement admis n'être pas parvenu à enclencher de réelles négociations entre les deux parties syriennes. La cause en est selon lui que « le cycle des pourparlers est pris dans les incessantes accusations réciproques entre les deux délégations syriennes sur des conditions préalables ».Il est vrai que cet obstacle empêche depuis le début les pourparlers de Genève de s'orienter vers des négociations dont le fond ne soit pas conditionné par un ou des préalables qui sont inacceptables pour l'une ou l'autre partie. Le plus radicalement clivant étant celui posé en une arrogante forme par l'opposition syrienne qui ne veut ni plus ni moins que l'exclusion de Bachar El Assad de la négociation sur le devenir de la Syrie.
Staffan de Mistura n'ignore pas que ce préalable qui a été inacceptable pour le régime même au moment où sa chute paraissait inéluctable, est désormais une incongruité à laquelle se raccroche l'opposition avec l'espoir de transformer sa défaite militaire en succès politique qui lui ouvrirait la porte du pouvoir en Syrie. Mais au lieu d'admettre qu'il a échoué à convaincre cette opposition à renoncer à ce préalable dont l'exigence est totalement déconnectée de la réalité qui est celle du terrain en Syrie, l'envoyé spécial de l'ONU l'a confortée en attribuant l'échec du huitième round des pourparlers au régime de Damas au prétexte que c'est sa délégation qui a refusé de poursuivre les pourparlers tant que le préalable sur Bachar El Assad n'aura pas été publiquement retiré.
Mais là où De Mistura a commis « l'impair » diplomatique qui le disqualifie aux yeux du régime de Damas c'est celui d'avoir adressé un appel à Moscou lui suggérant de faire pression sur le président syrien et son régime. Décrypté par Damas, son appel a été perçu comme véhiculant le sous-entendu que c'est la Russie qui dicte « in fine » au régime sa position y compris sur le sort de Bachar El Assad. Puisque De Mistura s'en remet à l'intervention russe en direction du régime syrien, il aurait pu apparaître moins partial en demandant aussi aux parrains étrangers de l'opposition d'agir de même avec elle.
Il est clair que pour aussi neutre qu'il se prétend, l'envoyé spécial de l'ONU pour la Syrie aide en sous-main l'opposition syrienne qui a perdu toute chance de faire prévaloir l'agenda politique qu'elle s'est tracé. Par sa sortie, il a probablement enterré la poursuite du cycle de pourparlers de Genève et certainement en tout cas sans lui à la man?uvre si Damas consent à sa poursuite. Reste à savoir qui a inspiré à De Mistura sa sortie qui à l'évidence a cherché à instaurer la méfiance entre Moscou et Damas alors que leur alliance a produit des résultats militaires et diplomatiques qui ont fait entrer le conflit syrien dans une configuration qui leur est favorable à tout point de vue. Ni Moscou ni Damas n'accepteront une solution négociée qui transformerait leur incontestable victoire militaire en une défaite politique qui en serait une s'ils acceptent le préalable de l'opposition qui n'est plus défendu par grand monde, hormis les pétromonarchies totalement démonétisées et mises échec et mat sur le conflit syrien.


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