Publié le 01.07.2024 dans le Quotidien l’Expression
Dans une société cultivée, le citoyen sait choisir ses représentants, quand il y a un rendez-vous politique décisif. Une nation cultivée réserve automatiquement à son avenir un choix politique positif, c'est une équation historique vérifiée et approuvée.
Cependant, il faut faire la distinction entre la culture vraie d'un côté et la propagande culturelle de l'autre. Deux choses opposées et différentes.
La culture positive éclairée est une activité politico-sociale où l'imagination des producteurs d'arts est libre et féconde, et dont le but essentiel est de faire tomber les murs élevés contre la liberté individuelle et collective.
La culture de la propagande est une activité vicieuse et stérile où l'imagination créative est un acte qui ne sert qu'à la montée du mal, le culte du zaïm et la généralisation de la médiocrité.
Une nation cultivée où le citoyen est libre dans son choix, est une société capable de surmonter toute épreuve politique ou économique.
Les intellectuels, les producteurs du bonheur, de la raison et du courage à travers la littérature, la musique, la chanson, l'art plastique, le théâtre, le cinéma, sont les garants et les défenseurs d'une cité, au sens platonicien du terme, politique démocratique et plurielle.
La culture n'est pas le dernier wagon d'un vieux train historique tortueux et délabré. La culture n'est pas la présence saisonnière de la folklorisation répondant à l'appel d'un politicien assoiffé de pouvoir, d'un parti politique périmé ou d'une tribu qui souffre de la maladie de la ghettoïsation.
L'histoire du roman algérien contemporain nous donne une grande leçon, celle de l'engagement politique et de l'implication directe des écrivains romanciers dans le Mouvement national et la révolution algérienne.
La littérature poétique ou narrative algérienne, celle de Dib, de Mammeri, de Jean Amrouche, d' Assia Djebar, de Bachir Hadj-Ali, de Malek Haddad, de Kateb Yacine, de Mouloud Feraoun, de Moufdi Zakaria, en arabe, en tamazight ou en français, était une arme opérante contre le colonialisme culturel et militaire.
Il ne faut jamais minimiser ou dénigrer le rôle efficace que jouent les lettres et les arts dans les moments les plus cruciaux de l'histoire d'une nation. Et il est impensable de négliger le rôle des intellectuels et des artistes, éclaireurs de conscience collective, dans le façonnage de l'histoire d'une nation libre.
Lire un bon roman, à l'image de celui de Cervantes, de Balzac, d'Henry Miller, de Philip Roth, de Hanna Mina, de Naguib Mahfouz, de Tahar Djaout, d' Abdelhamid Benhadouga, de Tahar Ouettar, de Tayeb Salah, d' Ibrahim el Koni, d' Abdellatif Labi, de Rachid Boudjedra...est le chemin évident vers le bon choix du politicien correct, quel que soit son statut social ou le niveau de son pouvoir.
Apprécier la musique, la bonne musique, la belle musique, est une voie douce vers la défense d'une pratique politique positive. Savoir écouter Aït Menguellet, Jacques Brel, Mohamed Abdelwahab, Idir, Georges Brassens, Dahmane el Harrachi, Réda Goumaz, Louis Armstrong, Matoub Lounès, Fairouz, Taos Amrouche, Ahmed Wahbi, Ahmed Saber, Abdelhamid Ababssa, Khlifi Ahmed, Othmane Bali...est une force magique qui offre la possibilité d'analyser et de critiquer le politique noyé dans un discours fleuve ou dans une rhétorique sans bord!
Le citoyen qui sait méditer sur une toile, déchiffrer les détails de son festin de couleurs et de formes, discerner son message et sa philosophie, celle de Mohamed Khadda, de M'hamed Issiakhem, de Mohamed Racim, de Baya, de Rachid Koreichi, de Farid Benyaâ, de Aïcha Haddad, de Taha Ouamane, de Karim Sergoua, de Denis Martinez, de Jaoudet Guessouma... est un citoyen intelligent avec une vision politique perspicace.
Le citoyen qui a une bonne connaissance de l'histoire de son pays ne perd jamais sa boussole politique. Celui qui est en connexion avec les symboles de notre histoire à l'image de Massinissa, Jugurtha, saint Augustin, saint Donat, Juba 2, Apulée de Madaure, Kahina, Koceïla, l'Émir Abdelkader, Cheikh Ahaddad, Fadma N' Soumer, Ahmed Zabana, Larbi Ben M'hidi, Ben Boulaïd, Abane Ramdane, Amirouche, Didouche Mourad, Djamila Bouhired... ne sera jamais manipulé par les politicards. Son choix ne sera pas mauvais et son chemin ne sera pas perdu.
Dans une nation où la culture est un vécu quotidien, les citoyens sont dotés d'une immunité politique naturelle.
La culture, la bonne culture, celle de la raison et de la critique est une arme contre la médiocrité politique.
La culture, c'est un investissement à long terme. Une société en bonne santé économique, sanitaire et politique est une société, qui est d'abord, en bonne santé culturelle.
Le choix politique positif, le bon choix, c'est-à-dire celui qui est porteur des valeurs humaines, de la liberté, de la justice, de l'égalité ne peut être effectif si l'électeur est dépourvu d'une vision culturelle juste, saine et critique.
Amin Zaoui
-
Votre commentaire
Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Posté Le : 02/07/2024
Posté par : rachids