«Lentement est surement» pourrait être le slogan qui définit le mieux le parcours de l'artiste andalouse Zahia Benzengli. Née le 19 juillet 1969 à Alger, d'un père kabyle et d'une mère algéroise, elle est aussi professeur d'anglais au Lycée national des mathématiques de Kouba, à Alger. Sur scène, on la voit chantant d'abord des inqilabate, puis des mouvements de la nouba, dont les légers et entraînants inçirafs et enfin faire des immersions dans le haouzi et l'aâroubi. Son album, Florilège musical, sorti en 2016, est un joli bouquet de fleurs et de roses de différentes couleurs artistiques. Zahia Benzengli et l'art c'est aussi une longue histoire car ses enfants sont musiciens et son mari Ahmed Benzengli est le descendant direct (arrière-petit-fils) du grand poète tlemcénien du haouzi Ahmed Benzengli, connu sous le nom d'Ahmed Bentriki. Passionnée et fière de notre patrimoine, Zahia Benzengli veut contribuer à sa préservation et sa promotion. Elle veut notamment le transmettre aux jeunes qui l'entourent quotidiennement par la nature même de son travail d'enseignante.Le Soir d'Algérie : Un autre Florilège musical pour bientôt '
Zahia Benzengli : Oui, un deuxième Florilège andalou se prépare tout doucement. J'essaie de m'organiser pour gérer mon temps entre l'enseignement de la langue anglaise au lycée et la vie artistique. Nous attendons le moment propice pour entrer en studio. Nous restons dans le même principe que le premier : un voyage à travers la musique andalouse et ses dérivés. Nous restons conservateurs là où il faut, mais ouverts aussi à la création et la composition avec une touche moderne et de nouveaux arrangements.
Comment le public et les gens de l'andalou ont accueilli les nouvelles créations dans l'album Florilège '
Nous avons eu de très bons échos par rapport au premier florilège où nous avons essayé de satisfaire dans la mesure du possible tous les goûts, comme je l'avais expliqué auparavant par rapport au choix du programme à enregistrer. Nous avons reçu beaucoup d'encouragements pour continuer sur ce principe. Mais nous comptons bien améliorer les insuffisances. Il faut que ce deuxième album soit nettement meilleur que le premier.
Pour rester dans le domaine de la création et de l'innovation, pourrait-on imaginer un morceau andalou en anglais '
Chanter un texte andalou en anglais ne m'est jamais passé par la tête et je ne vois pas comment ça se peut se faire. Par contre, je suis pour la traduction. D'ailleurs, c'est une chose qui se fait en ce moment. C'est donc une bonne idée de traduire les beaux textes en anglais et en français pour permettre à une large audience de comprendre et apprécier ce que l'on chante.
Dans votre parcours atypique, tout a commencé, paraît-il, par un trio avec vos deux enfants Lilia et Ahmed?
Ma passion remonte à mon enfance. Malheureusement, je n'ai pas eu la chance de la pratiquer jusqu'à l'âge adulte où je trouve la possibilité de m'y mettre avec mes enfants que j'ai inscrits dans une annexe du conservatoire quelque temps après à l'association El Djazira où j'ai fini par les rejoindre. A 37 ans, j'ai commencé à apprendre mes premières notes en musique et me mettre au chant timidement. C'est tellement beau et captivant que j'ai réussi à rattraper le retard et avancer, mais je ne suis toujours pas satisfaite. Je reste consciente qu'il y a encore beaucoup de travail à faire pour me perfectionner. Maintenant, j'avoue que j'ai orienté mes enfants vers la musique sans savoir que j'allais les trouver à mes côtés. Ils ont tellement avancé et atteint un haut niveau que c'est eux qui m'encadrent en ce moment. Pour être plus claire, toutes les répétitions se font avec ma fille Lilia qui n'épargne aucun effort pour me corriger et me conseiller. En parallèle, il y a son frère Ahmed qui apporte des arrangements pour les pièces choisies. Bien entendu, on les retrouve à chaque fois avec moi sur scène pour animer les différents concerts.
Vous avez souvent dit que d'une passion peut naître un espoir. Comment '
On croit souvent que lorsque l'on avance dans l'âge, on n'a plus la chance de faire ce qu'on aime ou bien qu'il est trop tard pour s'y mettre. C'est complètement faux ! Si on est passionné, on a la volonté et on est prêt à faire l'effort nécessaire, on arrive quand même à faire quelque chose. Il suffit d'y croire. Et là, je suis un exemple concret. Je profite de l'occasion pour encourager les adultes qui ont un rêve étouffé à le transformer en réalité car tout est possible.
Vous considérez aussi que la tolérance est mère de la paix?
J'estime que tout artiste doit avoir une âme artistique et que la tolérance doit régner dans ce domaine. On doit respecter les idées créatives des autres sans les juger ou essayer de diminuer de leur mérite tant que le travail qui se fait reste propre et bien réfléchi. Il est clair qu'on ne peut pas accepter ce qui peut nuire à la réputation de notre art. Cependant, on préfère la critique constructive qui offre des solutions sans heurter ou humilier qui que ce soit.
Tout comme Lila Borsali, vous jouez de la kouitra, un instrument qui a tendance à se «féminiser» ces dernières années. Pourquoi le choix de cet instrument '
La kouitra est l'instrument qui m'a attirée au premier abord. D'autant plus que c'est un instrument typiquement algérien bien que j'ai lu récemment qu'il était plutôt tunisien, mais ça reste à vérifier. Contrairement aux idées reçues, en plus de la gent féminine, il y a beaucoup d'hommes qui jouent et excellent à la kouitra.
Un message '
Pour finir, je dirais qu'en ce moment, il devient de plus en plus difficile de se faire un public vu que les concerts sont devenus pratiquement tous payants, contrairement au passé où les gens n'hésitaient pas à assister à un spectacle, même s'ils ne connaissent pas l'artiste. Par ailleurs, je souhaite que les organisateurs donnent la chance à tous les artistes, même nouveaux, de se produire sur scène, ce qui peut les encourager et les inciter à fournir plus de travail. Nous avons souvent remarqué un manque de coordination entre les organisateurs qui font appel pratiquement aux mêmes artistes, aux soirées ramadanesques par exemple, alors que d'autres ne manquent pas de valeurs et sont oubliés. Ça peut causer un découragement total jusqu'à l'abandon. Nous ne ménageons aucun effort pour nous faire connaître et partager notre art avec notre public en utilisant tous les moyens possibles, entre autres les réseaux sociaux et les médias pour dire qu'on existe et qu'on travaille pour honorer notre cher patrimoine.
Entretien réalisé par Kader B.
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Posté Le : 27/09/2018
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Kader Bakou
Source : www.lesoirdalgerie.com