Algérie

L'héritage



Résumé : Un homme me ramène sa femme enceinte. Cette dernière doit être prise en charge dans l'immédiat. Mais il refuse qu'elle soit assistée par des médecins hommes.Elle me demande d'informer bien sûr son mari. Mais quand je mets au courant ce dernier, il entre dans une colère folle.
- Jamais je ne laisserai un homme toucher à ma femme, s'écria t-il. Jamais, au grand jamais !
- Pourquoi donc ' Votre femme court un danger et le bébé aussi. Seul un obstétricien pourra les sauver tous les deux.
- Orientez-moi alors vers une femme.
- Je n'en connais pas. En tous les cas, pas dans notre banlieue. Essayez de voir en ville.
L'homme me jette un regard plein de rage.
- Vous voulez me rendre fou ou
quoi ' Je veux que vous preniez ma femme en charge. Vous êtes médecin,
non '
- Oui. Mais je ne suis qu'un simple généraliste. Votre femme nécessite l'intervention d'un spécialiste en obstétrique.
- Très bien.
Je lui tendis ma lettre de recommandation, mais il ignore mon geste et se lève, blême de colère.
- Je n'ai que faire de vos conseils. Je vais faire appel à la matrone du quartier. C'est ce que j'aurais dû faire depuis longtemps au lieu de venir écouter vos imbécilités.
Il tire sa femme par le bras et l'entraîne vers la sortie. Je tente de les retenir, mais il me repousse et sorti en claquant la porte.
Je pousse un long soupir et me rassois à mon bureau, déprimée et vraiment inquiète pour cette pauvre femme.
Le soir, je racontais l'incident à Hacène, qui me rassura de son mieux
- Ne t'inquiète donc pas tant. Il finira bien par se rendre à l'évidence. Même cette matrone dont il t'a parlé ne pourra rien faire, alors il sera dans l'obligation de conduire sa femme à la clinique.
- Mais ses jours sont comptés. Va-t-il s'en rendre compte à temps '
Hacène sourit. Les hommes sont comme ça. Ils veulent démontrer leur autorité. Ils jouent tous les durs.
Mais il y a des circonstances dans la vie qui ne le permettent pas, alors ils finissent toujours par flancher.
Je n'étais pas rassurée pour autant. Cet homme avait l'air d'une brute.
Quelques jours plus tard, il revint me voir, triste et abattu pour m'annoncer que sa femme était morte en couches.
- Vous aviez raison. Il lui fallait une césarienne. La matrone n'a fait que retarder le transfert de ma femme à l'hôpital, et là, les choses allèrent tellement vite que le médecin ne pouvait que constater le décès.
Il éclate en sanglots.
- J'aurais dû vous écouter. J'ai tué ma femme.
Il se met à pleurer à fendre l'âme. Je tentais de le consoler, mais se sentant coupable, il ne voulait rien savoir. Il se lève, se mouche bruyamment, puis me lance sur un ton calme.
- J'ai tué ma femme, docteur. Je l'ai tuée. Et j'ai tué aussi mon fils. Vous n'y êtes pour rien. Je suis le seul coupable.
Sur ce, il sortit et je ne le revis plus jamais.
Mon fils Ratibe grandissait à vue d'?il. Il marchait, parlait, me faisait rire aux éclats par ses babillages et mettait de l'ambiance dans la maison. Tout le monde était aux petits soins pour lui. Aussi bien mes parents que ceux de Hacène.
Il était choyé, dorloté, admiré. Bref ! De ce côté-là, j'étais rassuré. Je pouvais respirer à l'aise quant à sa petite santé aussi qui ne prêtait pas à l'inquiétude. Je ne cessais de remercier Dieu pour le bonheur qu'il m'avait accordé en me faisant rencontrer un homme comme Hacène, et en me donnant un enfant aussi beau et intelligent que Ratibe.
Mon quotidien me suffisait. J'étais partagée entre mon travail et mon foyer, je ne me plaignais pas trop. La quiétude que je ressentais n'avait pas de prix. Je recevais dans mon cabinet des femmes qui se plaignaient du mauvais traitement qu'on leur infligeait et de l'incompréhension de leur entourage à leur égard. Moi, j'étais sauvée. Mes parents m'avaient toujours gâtée et mon mari encore plus.
(À SUIVRE)
Y. H.

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