L'EXTINCTION DE L EMPIRE ZEYANIDE 1550-1557
AROUDJ S’EMPARE DE TENÈS ET DE TOUT LE PAYS
COMPRIS ENTRE CETTE VILLE ET ALGER.
Ainsi, tout réussissait à Barberousse. Son frère, Khéïr-ed-Dine, venu le rejoindre avec la flotte et les prises, lui avait amené leur troisième frère, Ishak, et cette association d’hommes hardis et dévoués les uns aux autres allait permettre à Aroudj de tirer parti de son succès dont l’effet avait été considérable en Berbérie et en Espagne. La première victime devait être le cheikh de Tenès, dont on connaissait les relations avec les Espagnols. Laissant Alger sous le commandement de son frère et traînant à sa suite des otages garantissant la sécurité de cette ville, Aroudj s’avança en maître à travers la Mitidja, culbuta les Zenètes qui, en grand nombre, sous le commandement de Moulaï Abd-Allah, essayèrent de l’arrêter à Ouédjer, et entra à Tenès pendant que le cheikh se réfugiait dans le sud. Les arquebusiers turcs avaient porté la terreur partout et aucune population indigène ne paraissait disposée à leur résister (juin-juillet 1517). A l’est, les vaisseaux de Khéïr-ed-Dine avaient pris possession de Dellis, de sorte que l’empire de Barberousse s’étendait jusqu’au delà de cette ville. Dans la plaine et les premières montagnes, les indigènes avaient offert leur soumission et s’étaient obligés à servir le tribut. Ces succès vertigineux étaient bien faits pour griser
un homme tel qu’Aroudj ; son audace et son ambition allaient causer sa perte.
USURPATION D’ABOU-HAMMOU III À TLEMCEN. AROUDJ EST APPELÉ PAR. LES HABITANTS DE CETTE VILLE.
Cependant, à Tlemcen, Abou-Abdallah-Mohammed, fils de Thabeti, était mort (1516), sans laisser d’héritier en état de prendre
la direction des affaires. C’était la porte ouverte aux compétitions. Abou-Zeyane, frère cadet de l’émir défunt, essaya de recueillir
l’héritage ; mais son oncle Abou-Hammou, soutenu par une partie des gens de la ville et les Arabes de l’extérieur, vint l’attaquer dans son propre palais et, s’étant rendu maître de sa personne, le jeta en prison. Ce succès eût été sans conséquence dans l’état d’affaiblissement de l’empire zeyanide, si le nouvel émir n’avait compté sur un appui effectif : celui des chrétiens. Abou-Hammou III écrivit en conséquence au gouvernement de Castille et conclut avec lui un nouveau traité par lequel il s’obligea à servir au roi Charles V un tribut annuel de 12,000 ducats et à lui fournir, comme vassal, douze chevaux et six gerfauts mâles. Moyennant l’exécution de ces engagements, il serait protégé par l’Espagne. Le gouverneur d’Oran reçut des ordres en conséquence.
Mais la situation était telle à Tlemcen, la population, comme la famille royale, si divisée, que la tranquillité y était impossible.
Les partisans d’Abou-Zeyane, les légistes, outrés des complaisances d’Abou-Hammou pour les infidèles, songèrent à appeler à leur
secours le champion de l’Islam, le fameux Baba Aroudj, dont les victoires transportaient de joie tous les vrais musulmans. Une députation lui fut adressée, alors qu’il se trouvait à Tenès, ou dans la Mitidja, et les délégués n’eurent pas de peine à obtenir de lui la promesse d’une intervention. C’était, pour le chef turc, l’occasion d’étendre ses conquêtes vers l’ouest, et il se mit en devoir d’organiser son expédition. Les Tlemcéniens, dans leur aveuglement, allaient attirer sur eux de nouveaux malheurs.
FUITE D’ABOU-HAMMOU ; AROUDJ EST ACCUEILLI À TLEMCEN COMME UN LIBÉRATEUR.
Ayant reçu à Tenès, des renforts et de l’artillerie envoyés par son frère Kheïred-Dine, Aroudj se mit en route vers l’ouest, à la tête d’un corps expéditionnaire composé de quinze à seize cents arquebusiers et janissaires, levantins ou maures andalous, augmentés bientôt d’un certain nombre de volontaires indigènes (fin 1517). Sa marche fut probablement rapide; sinon on ne s’expliquerait guère l’inaction du gouverneur d’Oran «et de la province de Tlemcen». Se tenant, du reste, à une distance raisonnable du littoral,
Barberousse passa par la Kalaa des Beni-Rached, ville berbère, à une journée à l’est de Maskara, et fut si bien accueilli par les
habitants de ce poste fortifié par la nature et par l’art qu’il se décida à l’occuper, afin d’assurer ses communications et pour enlever
aux Espagnols d’Oran les ressources qu’ils tiraient de cette région, comme centre d’approvisionnement. Ishak, le frère aîné des Barberousse, y fut laissé, avec trois cents soldats levantins; puis, Aroudj continua sa route, précédé par la renommée que ses succès lui avaient acquise. Abou-Hammou jugea toute résistance inutile dans ces conditions; il prit la fuite et alla demander asile et vengeance aux Espagnols d’Oran, Peut-être, ainsi que certains documents l’affirment, trouvant la route de cette ville déjà occupée, se réfugia-t-il à Fès ; cela n’a pas une grande importance, mais on y voit la preuve des contradictions qui se rencontrent à chaque pas dans les chroniques de cette époque. Aussitôt après le départ d’Abou-Hammou, la population de Tlemcen mit en liberté sa victime Abou-Zeyane : puis elle se porta, avec ce dernier, à la rencontre du libérateur, des glorieux champions de l’islam. L’entrevue fut des plus cordiales. Cependant on fit jurer à Baba-Aroudj, sur le Koran, qu’aucun désordre ne serait commis et que les propriétés et les vies de tous seraient respectées; après quoi, on entra en grande pompe dans la ville, au bruit des acclamations du peuple.
AROUDJ FAIT PÉRIR ABOU-ZEYANE ET SES PARENTS À TLEMCEN. LES ESPAGNOLS S’EMPARENT DE LA KALAA DES BENI-RACHED.
Trop souvent, pour les peuples comme pour les individus, les jours de joie n’ont pas de lendemain. Les habitants de Tlemcen en firent l’expérience : les exigences, la brutalité des Turcs révoltèrent aussitôt les citadins qui les avaient accueillis comme des sauveurs. Cédant à leurs instances, Abou-Zeyane voulut faire entendre quelques timides observations aux oppresseurs. C’était, pour Aroudj, le prétexte cherché. Il pénétradans le Mechouar à la tête de ses gardes, se saisit d’Abou-Zeyane et le fit aussitôt pendre aux traverses de la galerie du palais ; ses fils subirent le même sort et furent attachés autour de lui. Mais cette exécution ne lui suffi sait pas. Il voulait détruire jusqu’au dernier, les membres de la famille royale de Tlemcen et, étant parvenu â arrêter soixante-dix d’entre eux, il les fit jeter dans le grand bassin dont on peut voir encore les vestiges dans cette ville, s’amusant de leurs angoisses et de leurs luttes contre la mort et aidant lui-même à rejeter, dans l’eau ceux qui essayaient d’en sortir. Le massacre d’un grand nombre de citoyens occupa ensuite ses sicaires et le pays gémit sous la plus affreuse tyrannie. Cependant, Abou-Hammou, réfugié à Oran, pressait le marquis de Comarès d’agir contre l’envahisseur et, en présence des derniers événements, il n’y avait plus à hésiter. Charles V venait d’arriver en Espagne, amenant avec lui de bonnes troupes. Aussitôt, le marquis alla lui présenter ses hommages et lui faire connaître la situation du pays, et obtint un renfort d’une dizaine de mille hommes. Avec son coup d’oeil militaire, le gouverneur espagnol jugea fort bien la situation et résolut d’abord d’enlever la Kalaa des Beni-Rached, afin de couper la retraite aux Turcs et de les isoler. Abou-Hammou et les Arabes y bloquaient depuis quelque temps les janissaires. Martin d’Argote, le meilleur capitaine espagnol, fut envoyé vers lui avec un renfort. Mais la place était vaillamment défendue par Ishak, frère d’Aroudj, et ses yoldachs commandés par Iskander, rompue à tous les genres de guerre, à tous les dangers. On se trouvait alors vers la fin de janvier 1518. L’arrivée des Espagnols exaspéra les Turcs qui tentèrent plusieurs sorties fort meurtrières de part et d’autre. Désespérant enfin de pouvoir tenir plus longtemps, ils demandèrent et obtinrent une capitulation honorable. Mais, à peine étaient-ils sortis de leurs remparts, que les; Arabes se jetèrent sur eux. Une lutte acharnée s’engagea, à laquelle l’armée assiégeante ne tarda pas à prendre part. Tous les Turcs, y compris Ishak et Iskander, périrent en luttant dix contre un.
LES ESPAGNOLS ATTAQUENT TLEMCEN. FUITE ET MORT D’AROUDJ. ABOU-HAMMOU EST RÉTABLI SUR LE TRÔNE DE TLEMCEN.
La nouvelle de la chute de la Kalaa, de la mort d’Ishak et des préparatifs des Espagnols parvint en même temps à Aroudj et, si son courage n’en fut pas ébranlé, la plus élémentaire prudence lui conseilla de chercher un appui, car il ne pouvait plus attendre de secours d’Alger. Il se tourna alors vers le souverain merinide de Fès et sollicita son alliance, en lui représentant le danger qui résulterait pour lui de l’occupation de Tlemcen par les Espagnols. On ignore exactement le résultat de cette démarche; mais il est probable, comme les historiens espagnols l’affirment, qu’il obtint de lui des promesses d’intervention. Pendant ce temps, le marquis de Comarès, avec ses meilleures troupes et un grand nombre d’auxiliaires arabes commandés par Abou-Hammou, arrivait sous les murs de Tlemcen et en commençait le siège. Aroudj, dont l’effectif de Turcs et de renégats était peu considérable (cinq cents environ), et qui ne pouvait compter sur la fidélité des Tlemcéniens, n’osa pas sortir de la ville pour essayer d’arrêter la marche de l’ennemi. Mais il organisa la résistance derrière ses remparts, avec autant d’habileté que de courage. Pendant six mois, les assiégée n’avancèrent que par l’emploi de la poudre; néanmoins il arriva un moment où le premier Barberousse dut renoncer à défendre ses lignes, pour se retrancher dans les rues et enfin se renfermer dans le Mechouar. Il aurait pu y tenir longtemps
encore, mais les habitants de Tlemcen, voyant l’occasion de se venger de lui et de ses suppôts, s’entendirent avec les Espagnols et, ayant obtenu des Turcs la permission d’entrer dans le Mechouar pour y visiter la mosquée à l’occasion de la fête de la rupture du jeun, en ouvrant la porte ils se mirent à massacrer Osmanlis et renégats. Aroudj avait pu se retrancher dans un réduit d’où on communiquait avec l’extérieur par une poterne. La nuit venue, il sortit de la ville par cette issue, suivi d’une poignée d’hommes portant toutes les valeurs qu’il avait pu enlever aux trésors des souverains zeyanides, et gagna le large. On a beaucoup discuté sur la direction prise par Aroudj, dans sa fuite. Haëdo affirme qu’il se sauva sur la route d’Oran et fut rejoint par les Espagnols au Rio-Salado. Celle version a été reproduite par le Dr. Shaw et défendue dans ces derniers temps par M. de Grammont ; mais tous les historiens arabes indiquent la montagne des Beni-Zenassen. comme la direction de la fuite du corsaire et plusieurs historiens, parmi lesquels Berbrugger, ont démontré, à notre avis, que cette tradition est d’accord avec la logique des faits et même avec les indications des auteurs espagnols. Comment admettre, en effet, qu’Aroudj, attendant de jour en jour l’arrivée de l’armée du sultan de Fès, n’ait pas pris la direction de l’ouest et se soit lancé sur la route même d’Oran, centre de ses ennemis ?
Les Turcs fuyaient donc vers le couchant, sur le chemin d’Oudjda, lorsqu’on s’aperçut de leur départ. Aussitôt, Espagnols
et Arabes se lancèrent â leur poursuite. On dit qu’Aroudj, se voyant serré de très près, employa un stratagème renouvelé des anciens et qui consistait à semer sur sa route des pièces d’or et des objets précieux pour attirer la cupidité de ses ennemis et ralentir l’ardeur de la poursuite. Quoi qu’il en soit, un groupe d’une quarantaine de cavaliers espagnols, conduits par l’enseigne Garcia Fernandez de la Plaza, était prés d’atteindre les fuyards. Abou-Hammou était mort à Tlemcen en 1528, son frère Abou-Mohammed-Abd-Allah, qui lui avait succédé, profita de cette circonstance pour rompre avec les Espagnols et envoyer à Kheïr-ed-Dine son hommage de vassalité. Le marquis de Comarès, gouverneur d’Oran, était alors en Espagne, où il avait dû se rendre pour se disculper des accusations de désordre et de prévarication, trop justifiées, qui avaient été portées contre lui.
EXPÉDITION DE HASSAN-PACHA À TLEMCEN. IL Y RÉTABLIT MOULAÏ ABOU-ZEYANE.
Dans l’Ouest, les affaires n’étaient pas plus favorables pour les Espagnols. Nous avons dit qu’Abou-Mohammed, roi de Tlemcen, menacé ou soutenu, tour à tour, par les Turcs d’Alger ou les chrétiens d’Oran, entretenait des relations avec les uns et avec les autres. Après la prise de Tunis, par Charles V, il se rapprocha de ces derniers et présenta même un projet d’alliance qui ne fut jamais ratifié ; mais l’échec de l’empereur devant Alger le ramena vers Hassan-Pacha : celui-ci, du reste, à peine de retour de son expédition dans la Kabylie et la province de Constantine, prépara une colonne dont la destination était Tlemcen (fin 1542).
Bientôt, on apprit dans l’Ouest que Hassan était sorti d’Alger à la tête d’une armée imposante composée de mousquetaires turcs, de cavaliers et de fantassins arabes et kabyles, avec 10 canons de campagne. La situation d’Abou-Mohammed était d’autant plus critique que ses deux fils, Abou-Abd-Allah-Mohammed et Abou-Zeyane-Ahmed, étaient en révolte contre lui. Ici, nous devons confesser qu’en présence de la pauvreté des documents indigènes et de la confusion faite par les auteurs chrétiens entre le père, Abou-Mohammed, son fils Abou-Abd-Allah-Mohammed et son frère Abd-Allah, il nous est difficile de savoir si le premier régnait encore à Tlemcen. Peut-être était-il mort en 1540, comme le pense M. l’abbé Bargès. Dans tous les cas, le second, que nous appellerons à l’avenir Abou-Abd-Allah, est maître de Tlemcen, lorsque les Turcs en approchent. Il sort à leur rencontre, accable le pacha de protestations de dévouement et lui ouvre les portes de la ville. Mais Abou-Zeyane-Ahmed s’est assuré la protection des Turcs et c’est lui qui est placé sur le trône, tandis qu’Abou-Abd-Allah, pour sauver sa vie, est contraint de se réfugier auprès des Espagnols d’Oran. Hassan-Pacha rentra à Alger, laissant à Tlemcen environ 400 Turcs, auprès du roi. Il s’arrêta, en passant, à Mostaganem, et y laissa un représentant de son autorité.
DÉFAITE DES ESPAGNOLS AU DÉFILÉ DE LA CHAIR. LE COMTE D’ALCAUDÈTE S’EMPARE DE TLEMCEN ET Y RÉTABLIT MOULAÏ ABOU-ABD-ALLAH.
Ces résultats étaient trop préjudiciables à l’autorité espagnole pour que le gouverneur d’Oran ne cherchât pas à les atténuer. Réunissant un corps d’un millier de soldats réguliers, auquel il adjoignit 400 cavaliers arabes, il plaça cette colonne sous les ordres de Don Alonzo Martinez de Agulo et la lança contre Tlemcen. De nombreux contingents d’indigènes soumis devaient la renforcer en chemin. Au lieu de ce secours, les Espagnols se trouvèrent bientôt entourés par des masses de cavaliers commandés par Abou-Zeyane lui-même, dans un défilé où, ne pouvant se développer, ils perdirent tous leurs avantages et furent bientôt massacrés, pour ainsi dire jusqu’au dernier, y compris leur chef. Ce déplorable échec est appelé par les historiens espagnols: «Défaite du défi lé de la chair» (Chaabet-el-Leham), janvier 1543.
Alcaudète, rendant compte de ce désastre, réclama, pour en tirer vengeance, des renforts qui lui furent envoyés sans retard. En février, le gouverneur, accompagné de ses trois fils et du prétendant Abou-Abd-Allah, quitta Oran à la tête d’une armée de 14,000 fantassins et 500 cavaliers. Les contingents des tribus du Tessala et les Beni-Moussa-ben-Abd-Allah vinrent se ranger sous ses drapeaux. Abou-Zeyane essaya en vain d’arrêter l’orage qui le menaçait par l’offre d’une importante rançon. Tout était inutile et la parole ne restait qu’aux armes. Le caïd des Beni-Rached, El-Mansour, dont nous avons déjà parlé, conduisit bravement contre les chrétiens ses contingents, dont les écrivains espagnols évaluent la nombre à 20,000 cavaliers. La bataille fut livrée à l’occasion du passage do l’Isser. Cette fois, grâce aux bonnes dispositions prises par le comte et à l’importance de ses forces, il remporta une victoire décisive.
Peu après, l’armée espagnole rencontrait, sous les murs de Tlemcen,
le roi Abou-Zeyane lui-même, soutenu par ses 400 Turcs, et entouré d’une nuée de guerriers : il y eut un rude combat qui se termina de nouveau par la victoire du comte d’Alcaudète et la fuite d’Abou-Zeyane et des débris du corps turc vers la Kalâa, d’autres disent dans les plaines d’Angad, ce qui parait plus probable. Abou-Abd-Allah reçut le serment de la population, mais, s’il faut en croire Marmol, les chrétiens renouvelèrent ce qui s’était passé à Tunis, en soumettant la ville au pillage le plus complet. Les juifs, surtout, furent dépouillés ou réduits en esclavage. Après une expédition contre Abou-Zeyane, qui essuya une nouvelle
défaite, dans la plaine d’Angad, le comte d’Alcaudète reprit la route d’Oran, traînant à sa suite un butin considérable, parmi lequel se trouvaient les canons perdus en 1535, à la défaite de Tibda. Mais la longueur de son convoi l’exposait, sur une file interminable, aux attaques des Arabes, qui étaient revenus en très grand nombre, et ce ne fut qu’après avoir couru de véritables dangers et abandonné presque tout son butin, que le comte put rentrer à Oran. C’était, en résumé, bien des dépenses et beaucoup de pertes pour un médiocre résultat (mars).
ECHECS DES ESPAGNOLS DANS LA PROVINCE D’ORAN. MOULAÏ-ABOU-ZEYANE S’EMPARE DE TLEMCEN. MORT D’ABOU-ABD-ALLAH.
Le Comte d’Alcaudète, ayant appris, dès son arrivée à Oran, que les Turcs s’étaient fortifiés à Mostaganem, y fit aussitôt une expédition; mais il constata que cette place était en état de défense, avec 1,500 Turcs et des canons garnissant les remparts, et dut renoncer à l’attaquer. Après avoir passé trois jours à Mazagran, il ordonna la retraite et se vit entouré, comme au retour de Tlemcen, par les Arabes, qui ne cessèrent de le harceler jusqu’aux portes d’Oran (commencement d’avril). A Tlemcen, le roi tributaire n’avait pas joui longtemps de son succès. A peine, en effet, les Espagnols s’étaient-ils éloignés, que Moulaï Abou-Zeyane revenait l’attaquer chez lui. Abou-Abd-Allah sortit bravement à sa rencontre, le défit et s’acharna même un peu trop d sa poursuite. Il revint enfin vers Tlemcen, complant avoir quelques jours de tranquillité. Mais, quel ne fut pas son étonnement de trouver les portes de la ville fermées ! Les habitants, ne pouvant lui pardonner les malheurs qu’il leur avait attirés en amenant les chrétiens, s’étaient révoltés et avaient rappelé Moulaï Abou-Zeyane, qui ne tarda pas à accourir d’un autre côté. Forcé de fuir devant celui-ci, Abou-Abd-Allah se réfugia à Oran et poussa le comte d’Alcaudète à entreprendre une expédition avec lui. Les Espagnols s’avancèrent, au nombre de deux mille, dans la direction de Maskara : mais la fortune était décidément contre eux, ils éprouvèrent une nouvelle défaite au combat d’Ez-Zeïtoun, et durent effectuer une retraite non moins désastreuse que les précédentes et dans laquelle le gouverneur faillit périr. Abou-Abd-Allah, qui voulut tenir encore la campagne, ne tarda pas à tomber entre les mains des partisans de son frère. Ils le mirent à mort et envoyèrent sa tête à Tlemcen. A la suite de tous ces échecs, le comte d’Alcaudète rentra en Espagne pour y chercher des renforts, (juin)(2) Abou-Hammou était mort à Tlemcen en 1528, son frère Abou-Mohammed-Abd-Allah, qui lui avait succédé, profita de cette circonstance pour rompre avec les Espagnols et envoyer à Kheïr-ed-Dine son hommage de vassalité. Le marquis de Comarès, gouverneur d’Oran, était alors en Espagne, où il avait dû se rendre pour se disculper des accusations de désordre et de prévarication, trop justifiées, qui avaient été portéescontre lui.
EXPÉDITION DU PACHA HASSAN BEN KHEÏR-EDDINE À TLEMCEN. ATTAQUE INFRUCTUEUSE DE MOSTAGANEM PAR ALCAUDÈTE.
Le comte d’Alcaudète, ayant enfi n obtenu 4,000 hommes de troupes, rentra à Oran vers 154-. Il y trouva le caïd El-Mansour qui l’attendait avec impatience pour l’entraîner encore sur la route de Tlemcen, lui promettant l’appui des tribus des Beni-Amer, Rached et autres. Dès les premiers beaux jours de l’année 1547, le comte se mit en campagne et s’avança jusque vers Aïn-Temouchent, où il attendit les contingents annoncés ; mais la nouvelle qu’il y trouva fut de toute autre nature.
Le pacha Hassan, fils de Kheïr-ed-Dine, qui avait déjà jeté ses vues sur les régions de l’ouest, reçut sans doute un appel de Moulaï Abou-Zeyane, lui annonçant les préparatifs des Espagnols. Il se mit en route, à la tête de 3,000 Turcs ou renégats armée de
mousquets, avec 1,000 spahis et 10 canons, rallia, en passant, un contingent de 2,000 cavaliers amenés par, Hamid-el-Abdi, cheikh
de Ténès et, faisant diligence, rejoignit les chrétiens sur la route de Tlemcen et les força à se retourner et à lui faire face. Les deux
armées s’observaient, cherchant le moment favorable d’en venir aux mains, lorsque le pacha reçut, par un envoyé français, la nouvelle de la mort de son père. Il se décida aussitôt à rentrer à Alger, de crainte qu’en son absence on ne se servit de ce prétexte pour le renverser (août). Le comte poursuivit les Turcs, qui avaient passé par Mostaganem, et s’empara de Mazagran. Il commença ensuite à canonner les remparts de la ville et ne tarda pas à lui donner l’assaut. Mais le pacha avait pu y faire entrer des renforts malgré le courage des Espagnols.
EXTINCTION DE LA DYNASTIE ZEYANIDE 1550-1557.
Les événements relatés dans ce chapitre font connaître la disparition définitive des dynasties merinide et abd-el-ouadite qui
régnaient depuis trois siècles Sur les deux Mag’reb.
Quant au descendant du rude Yar’moracene, il ne sut pas tomber avec honneur. Humble serviteur des Espagnols, ce prince,
que nous trouvons désigné sous le nom de Moulaï-Hassen, et qui, du reste, n’était peut-être qu’un des prétendants qui se sont arraché le pouvoir pendant les derniers jours de leur dynastie, vint, avec sa famille, chercher un refuge auprès des chrétiens d’Oran (vers 1554), il y mourut, trois ans plus tard; son fils, baptisé sous le nom de Carlos, ayant le puissant Charles V pour parrain, passa en Espagne et s’éteignit obscurément dans une province de Castille
LES EMIRS ZEYANIDES
Yar’moracène-ben-Zeyane......................................................1235
Othmane I, fils du précédent.............................................mars 1283
Abou-Zeyane I, fi ls du précédent…..........................................1304
Abou-Hammou I, frère du précédent…............................avril 1308
Abou-Tachefine I, fi ls du précédent..........................fi n juillet 1318
Sa mort et l’occupation merinide....................................1 mai 1337
Abou-Saïd-Othman.................................................septembre 1348
Abou-Thabet......................................................................juin 1352
2e occupation merinide..................................................juillet 1352
Abou-Hammou II.........................................................janvier 1359
Est renversé en 1360 et remonte sur
le trône la même année.............................................................1360
Est renversé en 1370 et remonte sur le trône en........................1372
..........................1383...........................................................en 1384
..........................1387...........................................en décembre 1387
Abou-Tachefine II, fils du précédent........................novembre 1380
Abou-Thabet_Youçof, fils du précédent.............1393 (Règne 40 j.)
Abou-l’Hadjadj, oncle du précédent.................1393 (Règne 10 m.)
Abou-Zeyane, frère du précédent............................novembre 1393
Abou-Mohammed-Abd-Allah, frère du précédent...................1398
Abou-Abd-Allah, dit El-Ouathek
et Ibn-Khou-la, frère du précédent..................................1401-1402
Moulaï-Saïd, frère du précédent...............................................1411
Abou-Malek-Abd-el-Ouahad,
frère du précédent....................................................novembre 1411
Abou-Abd-Allah-Mohammed,
fils d’Abou-Tachefine Il............................................................1424
Abou-Malek susdit, 2e fois.......................................................1428
Abou-Abd-Allah-Mohammed susdit, 2e fois...........................1430
Abou-l’Abbas-Ahmed, fils d’Abou-Hammou Il......................1431
Abou-Zeyane-Mohammed, fils d’Abou-Thabet, à Alger..........1438
El-Metaoukkel, fils du précédent, à Tenés................................1439
El-Metaoukkel, seul roi à Tlemcen….......................................1461
Abou-Thabte-Mohammed, dit Thabeti…................................1474
Abou-Abd-Allah_Mohammed, fils du précédent…….............1505
Il devient vassal de l’Espagne……...........................................1512
Abou-Zeyane, frère du précédent….........................................1516
Abou-Hammou III, oncle du précédent…................................1516
Aroudj s’empare de Tlemcen et rétablit Abou-Zeyane…....fi n 1517
Abou-Hammou III, rétabli par les Espagnols……...................1518
Moulaï-Mohammed-Abd-Allah, frère du précédent…….........l528
Moulaï Abou-Zeyane-Ahmed,
frère (ou fi ls) du précédent……..........................................fi n 1542
Moulaï Abou-Abd-Allah..................................................mars 1543
Moulaï Abou-Zeyane, susdit….........................................juin 1543
Occupation turque…................................................................1550
Moulaï-Hassen se réfugie à Oran vers…..................................1554
HISTOIRE DE
L’AFRIQUE SEPTENTRIONALE
(BERBÉRIE)
Ernest MERCIER
TOME TROISIÈME
PARIS
ERNEST LEROUX ÉDITEUR
28, RUE BONAPARTE, 28
1868
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Posté Le : 11/10/2010
Posté par : yaghmoracen
Ecrit par : Ernest MERCIER
Source : HISTOIRE DE L’AFRIQUE SEPTENTRIONALE (BERBÉRIE)