Algérie

L'expression brimée



La liberté de la presse traverse, encore une fois, de fortes turbulences. Les relations entre les autorités et les journalistes se dégradent à nouveau. Fait saillant, après Mohamed Benchicou, incarcéré injustement depuis 19 mois, c'est au tour de Bachir Larabi, journaliste à El Khabar, de faire les frais d'une politique de répression de l'expression.Les craintes exprimées, au début de l'année, sont fondées.Beaucoup de journalistes seront emprisonnés en 2006. Probablement une vingtaine sans préjuger d'autres « expéditions punitives » qui risquent d'être décidées par les autorités.Nous assistons à une tentative de remodelage en profondeur du champ de l'expression dans notre pays. L'aventure intellectuelle, engagée en 1990, vire à l'amertume.Après une dizaine d'années de menaces terroristes, contraignant les journalistes à travailler la peur au ventre, enterrant un des leurs par semaine, mais résistant tout de même face à la furie intégriste, nous revoilà à présent dans un autre contexte. Peut-être moins dramatique. Fort heureusement, il n'y a plus d'assassinats de journalistes. Mais les tribunaux ont remplacé progressivement les cimetières. Il y a un tel déferlement de plaintes, un tel acharnement à condamner, parfois en dépit du bon sens, les journalistes, une telle volonté de nuire financièrement aux entreprises de presse en les assommant avec des amendes très lourdes, que c'est à se demander si l'aisance financière de notre pays n'y est pas pour quelque chose. Il fut un temps où les autorités algériennes étaient très sensibles aux critiques internationales. A cette époque, le baril valait à peine 15 dollars. Aujourd'hui, les autorités font la sourde oreille face aux critiques qui se font d'ailleurs rares et insignifiantes. L'odeur du pétrole est trop forte.Sans doute, des écrits manquent parfois d'objectivité, de professionnalisme, il arrive que des journalistes dérapent, ne vérifient pas l'information et s'empressent de publier de simples bobards. C'est un fait. Mais nous ne sommes plus dans ce cas d'espèce. Les artisans et promoteurs des amendements du code pénal portant sur les délits de presse avaient pris soin de rassurer la profession à l'époque, affirmant que ces nouvelles dispositions, sévères, répressives et injustifiées pour un pays se proclamant en phase de construction démocratique, ont été décidées pour tout simplement sanctionner les écarts et les dérapages. Or cet édifice juridique sert à tout autre chose.La justice, s'appuyant sur les articles du code pénal, pénalise l'expression et l'opinion.Les autorités font face, en réalité, à une contestation sociale qui prend de l'ampleur. Les citoyens sont plus exigeants. Il est tout à fait naturel que la presse joue un rôle. Elle ne peut pas tourner le dos au pays en taisant les vérités...C'est ce que nos dirigeants ne supportent pas et ne veulent pas comprendre.Mais est-ce là la bonne attitude pour une nation qui aspire à s'émanciper rapidement après les tumultueuses années que nous venons de vivre '


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