Algérie

L'exercice du journalisme au Maroc «est soumis à la volonté du pouvoir»



L'exercice du journalisme au Maroc «est soumis à la volonté du pouvoir»
«Les médias en ligne au Maroc et le journalisme citoyen : analyse des principales limites à un environnement favorable».Tel est l'objet d'une étude effectuée par l'Institut international pour l'action non violente (NOVACT), une organisation non gouvernementale espagnole. Etude qui fait un constat amer sur l'exercice du journalisme indépendant dans le royaume. «L'exercice du journalisme indépendant est soumis à la volonté du pouvoir», relève l'organisation non gouvernementale (ONG) dans son étude, relayée par le site marocain d'information Le Desk le 13 septembre. Atmosphère qualifiée d'hostile «où abondent la pollution informative, la diffamation continue et les cyberattaques». D'où l'inquiétude quant à l'environnement qui entoure la presse en ligne au Maroc. «Les journalistes ont du mal à avoir accès aux informations des institutions officielles.
Bien que la loi sur l'accès à l'information ait été programmée depuis 2011, celle-ci n'est pas encore entrée en vigueur», selon l'étude, parrainée par le Fonds des Nations unies pour la démocratie (FNUD).
Le document met en lumière les différents obstacles dressés par le pouvoir pour neutraliser la liberté d'entreprendre un journalisme indépendant, à savoir, entre autres, l'obligation de déclarer au préalable la création d'un site d'information en ligne, les critères mouvants et non précisés pour bénéficier des aides publiques, la menace de poursuites hors du cadre du code de la presse (code pénal et loi antiterroriste), la création par des agents d'Etat d'un nombre de plus en plus élevé de sites internet se prétendant des médias, consacrés à la propagande, aux attaques ad hominem et servant à contrecarrer toute velléité de critiquer la politique du régime. Un membre de NOVACT a déclaré, en présentant l'étude de son organisation lors d'une conférence de presse tenue à Rabat au siège de l'Association marocaine des droits humains (AMDH), que «la liberté d'expression dans le cyberespace au Maroc a considérablement diminué cette année ».
Arbitraire
Le 13 septembre, l'organisation Reporters sans frontières (RSF) s'est dite «profondément inquiète» après la condamnation en appel à un an de prison du journaliste marocain Hamid Al Mahdaoui, en attente par ailleurs d'un autre procès. Poursuivi pour «avoir incité à une manifestation interdite», le directeur du site Badil.info a vu sa peine initiale «multipliée par quatre», avec sa condamnation mardi par la Cour d'appel d'Al-Hoceïma (nord) à un an de prison ferme, a rappelé RSF dans un communiqué. Après cette «peine nettement revue à la hausse», l'ONG a dénoncé un «verdict incompréhensible» et s'est dite d'autant plus «inquiète» que Al Mahdaoui «doit faire face à un deuxième procès» pour «atteinte à la sûreté de l'Etat». «La cour qui dispose de vidéos, a en sa possession des preuves tangibles de son innocence», a affirmé RSF, appelant la justice marocaine «à abandonner les charges et à libérer au plus vite un journaliste qui, en se trouvant au c?ur des événements, n'a fait que son métier».
Le 25 juillet, Al Mahdaoui a été condamné en première instance à trois mois de prison ferme et à une amende de 20 000 dirhams (1800 euros). Il a été arrêté le 20 juillet à Al-Hoceïma, dans le Rif, puis jugé pour avoir appelé à prendre part à une manifestation interdite dans cette ville, épicentre d'un mouvement de contestation qui secoue depuis octobre cette région du nord du royaume. Il est poursuivi également pour «non-dénonciation d'un crime portant atteinte à la sûreté de l'Etat», avec un procès prévu le 2 octobre. «Pour ce chef d'accusation, il encourt une peine allant de deux à cinq ans de prison ferme», a indiqué RSF. Très actif sur les réseaux sociaux, Al Mahdaoui est connu pour ses prises de position contre le pouvoir marocain et ses vidéos diffusées sur Youtube dans lesquelles il commente l'actualité. Il a déjà fait l'objet d'une dizaine de plaintes, notamment pour diffamation.
« Lignes rouges»
En mai dernier, l'ONG Human Rights Watch a estimé que le nouveau code de la presse conçu par le Maroc restreint la liberté d'expression à travers le code pénal et appelé ainsi le gouvernement ainsi que le parlement, à dépénaliser tous les délits relevant de l'expression non violente. Le nouveau code de la presse ne prévoit plus de peines de prison, le code pénal révisé en prévoit toujours, notamment pour les écrits ou discours publics «portant atteinte» à la monarchie, à la personne du roi, à l'islam et à l'«intégrité territoriale» du Maroc, des sujets sensibles, connus au Maroc sous l'expression «lignes rouges». Elle recommande, entre autres, la révision du code pénal et du code de la presse de manière à éliminer tous les délits d'expression pacifique qui contredisent les engagements du Maroc à respecter la liberté d'expression selon le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP).
Ces délits sont notamment définis par des articles sur les atteintes au régime monarchique et à la religion islamique, les offenses, insultes ou atteintes à la vie privée commises envers le roi, l'héritier du trône ou les membres de la famille royale, et le manque au respect et à la révérence dus à la personne du roi ainsi que l'outrage envers les corps constitués. Au minimum, le Parlement devrait supprimer les peines de prison prévues par le code pénal comme sanction possible de ces délits. Pour les délits définis dans le Code pénal et le Code de la presse qui sont effectivement basés sur des critères reconnus par les articles 19 et 20 du PIDCP, le Parlement devrait restreindre et clarifier la définition de chaque délit de façon à ce qu'il soit formulé de façon assez précise pour que les citoyens puissent se comporter en conséquence.


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