Algérie

L'éternel chantier


Considéré comme un mal nécessaire par certains, décrié par d'autres, le commerce informel a pris une telle ampleur qu'il a fini par saper les fondements mêmes de notre économie et mettre en péril son développement. Comme chaque mois de Ramadhan, le marché informel revient en force dans les rues de la capitale. Et comme chaque année, le ministère du Commerce promet l'éradication des marchés informels.Pour cette année, le ministère du Commerce annonce avoir mis au point un programme de contrôle intense qui s'appuie sur le renforcement des outils de contrôle en termes de qualité, de prix et d'approvisionnement des marchés. Le citoyen sera-t-il sensible aux promesses du ministre ' Pas si sûr. Certes, le ministère du Commerce essaye, à coup de chiffres, de faire briller son bilan : à fin novembre 2017, 1 050 marchés informels ont été éradiqués sur les
1 453 existants.
Il faut dire que parmi les causes de ce retour de l'informel, on retrouve l'incapacité des autorités concernées de résoudre le problème à sa racine. Incapacité ou peut-être manque d'empressement à le faire, d'autant plus que l'informel, en plus de dégrossir le taux de chômage dans le pays, permet également, pour bon nombre de citoyens, d'arrondir les difficiles fin de mois. Par ailleurs, cette question des marchés informels et de la traque des petits vendeurs à la sauvette n'est que la partie émergée de l'iceberg. En effet, les deux tares qui portent atteinte à l'économie nationale sont les mêmes depuis des années, à savoir le poids suffocant de l'économie informelle et l'insoutenable marché parallèle des devises. Selon une enquête réalisée par l'ONS en 2012, l'économie informelle représenterait 45% du produit intérieur brut (PIB) de l'Algérie et employait 1,6 million de personnes en 2001 avant d'augmenter à 3,9 millions de personnes en 2012 et pour encore augmenter depuis suite à la crise économique causée par l'effondrement des cours du pétrole. Ce sont donc plus de quatre millions de personnes non déclarées, et potentiellement des milliards de dollars d'impôts non recouvrés chaque année. Les pertes pour l'Etat algérien sont énormes. Ce qui ne semble pas convaincre le Premier ministre, Ahmed Ouyahia qui, lors de la présentation de son plan d'action, avait indiqué que "l'argent qui circule sur le marché parallèle est estimé au maximum à 1 700 milliards de dinars". Ce qui était de son point de vue "insuffisant pour régler nos problèmes".
Même topo pour le marché parallèle de la devise.
Les pouvoirs publics tolèrent ce système illégal de change. Souhaitant diminuer la sortie de capitaux, ils poussent les intéressés à se tourner vers le marché parallèle. Pourtant, ce marché favorise les opérations de blanchiment d'argent sale.
Ces sommes en devises qui atterrissent sur le marché noir alimentent les transferts illicites des capitaux vers l'étranger et donc l'évasion fiscale. Malgré cela, le marché de la devise reste géré de manière énigmatique et "informelle" par le gouvernement, qui admet l'existence d'un marché parallèle sans vouloir le contrôler. Au final, l'inaction des autorités dans ces deux aspects devient de plus en plus inquiétante à mesure que la situation économique de l'Algérie continue de se dégrader.
Saïd Smati
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