Algérie

L'Etat de droit : fondement du développement



L'Etat de droit : fondement du développement
Avec mes étudiants en doctorat et amis pro-fesseurs d'Université, nous avons, dans un large débat productif, analysé deux déclarations de hauts responsables de l'Etat qui méritent une attention particulière car enga-geant l'avenir du pays. La première, en date du 30 mai 2011, est celle du Premier ministre, et la seconde, en date du 14 juin 2011, est celle du directeur général de la douane.
Ces deux déclarations posent la problématique de l'Etat de droit, fondement d'un développement durable et de la réussite de la réforme globale, objet de cette contribution. 1.-Le Premier ministre : « Les assemblées actuelles sont peu représentatives » Cette déclaration concernant l'APN et le Sénat, il faut le reconnaître étant un discours de vérité, ne fait d'ailleurs que confirmer les données officielles du ministère de l'Intérieur que j'ai analysées dans une contribution dans le Quotidien d'Oran en 2008 dont je rappelle brièvement les résultats. Les partis FLN/RND/MSP qui ne sont en fait que l'éclatement de l'ancien parti unique FLN des années 1980 et selonles observateurs tant nationaux qu'étrangers, le système reposant sur la rente étant sensiblement le même depuis les années 1970 ayant changé de forme mais pas de nature, pour les élections législatives du 17 mai 2007, le nombre de suffrages exprimés divisé par le nombre d'inscrits donne : 7,01% pour le parti du FLN, 3,15% pour le RND et 2,94% pour le MSP, soit un total de 13,10%. Pour les élections locales du 29 novembre 2007, qui permettent l'élection au Sénat, hormis le tiers présidentiel, par rapport aux inscrits, concernant les APC, le FLN a eu 11,40%, le RND 7,73% et le MSP 5,09%, soit un total 24, 52%. Pour les APW, le FLN représente 11,36%, le RND 8,68% et le MSP 4,56%, soit un total de 24,60%. La moyenne arithmétique, élections législatives et locales, des partis du FLN/RND et MSP donne ainsi 18,85%, soit à peine le cinquième des inscrits, traduisant une forte démobilisation populaire. Ces résultats ne sont-ils pas en contradiction avec certaines déclarations officielles selon lesquelles il n'y pas de crise politique en Algérie et donc il ne faut changer ni de système politique ni de personnel politique ' Contrairement à certains discours démagogiques, le printemps arabe avec le risque de contagion n'a-t-il pas forcé les dirigeants algériens à des consultations politiques, notamment de la commission Bensalah, qui ont pris fin dans une atmosphère, selon la majorité des observateurs nationaux et internationaux impartiaux, d'insatisfaction, autant d'ailleurs que la rencontre organisée par le Conseil économique et social sur la société civile ' Les propos du Premier ministre appellent donc plusieurs questions stratégiques. Toutes les lois votées par des assemblées sont-elles alors valides et l'Algérie a-t-elle fonctionné sur la base d'institutions crédibles ' L'action du gouvernement dont la majorité des ministres sont issues du RND-FLN MSP reflètent- elles les aspirations de la population ' L'amendement de la Constitution par ces assemblées après avoir reçu le doublement de leur rémunération est-il légitime ' Ne doit-on pas aller vers la dissolution de ces assemblées (APN/Conseil de la nation) , nommer un gouvernement de techniciens neutres, loin de toute filiation partisante, qui aura pour tâche une transition démocratique réelle et non formelle neutre jusqu'à l'échéance présidentielle de 2014 , devant donner le temps à la naissance de nouvelles organisations collant aux aspirations de la société ' Même l'écrivain Yasmina Khadra, qui représente officiellement l'Algérie en tant que directeur du Centre culturel algérien à Paris, ainsi que la sénatrice du tiers présidentiel Mme Bitat (née Drif Zohra) arrivent à la conclusion de l'impasse du système politique. N'avons-nous pas besoin en urgence d'un ré-engineering qui est une notion du BCG (Boston Consulting Group) qui préconise pour les sociétés qui n'ont pas su se transformer dans la continuité face aux changements extérieurs doivent alors faire une mue franche, totale et dans des délais limites ou disparaître ' 2-Le directeur général de la douane : « 60% des produits importés sont contrefaits » Cette déclaration est intimement liée au poids de la sphère informelle en Algérie qui est réglée par des normes et des prescriptions qui déterminent les droits et les obligations de ses agents économiques ainsi que les procédures en cas de conflits ayant sa propre logique de fonctionnement qui ne sont pas ceux de l'Etat, nous retrouvant devant un pluralisme institutionnel/juridique contredisant le droit traditionnel enseigné aux étudiants d'une vision moniste du droit. L'extension de la sphère informelle est proportionnelle au poids de la bureaucratie qui tend à fonctionner non pour l'économie et le citoyen mais en s'autonomisant en tant que pouvoir bureaucratique. Faute d'enquêtes précises, en matière d'emploi, la part qui revient à l'économie informelle, d'après certaines estimations, dépasse 50%de la population active, le même ratio dans la valeur ajoutée hors hydrocarbures, et contrôle plus de 40% de la masse monétaire en circulation, tout cela étant facilité par la dominance du cash qui dépasse les 70% pour l'importation. Cela est corroboré par l'Office national des statistiques (ONS) a par ailleurs mis en relief le 20 juillet 2010 relatif à une enquête du second semestre 2009 qui a révélé que la moitié de la population occupée n'était pas affiliée à la Sécurité sociale, soit un taux de 50,4% de l'ensemble des travailleurs occupés. Par ailleurs, 69,1% des salariés non permanents et 80,1% des travailleurs indépendants n'étaient pas affiliés à la Sécurité sociale durant la même période. Concernant l'évasion fiscale, pour l'Union générale des commerçants et artisans algériens (UGCAA), dans une déclaration du 19 mai 2009 selon l'agence officielle APS, le manque à gagner induit par l'évasion fiscale dans les transactions commerciales dépasse 200 milliards de dinars annuellement, soit au cours actuel 2,6 milliards de dollars, 80% des transactions commerciales se faisant sans aucune facturation, alors que 70 à 80% des transactions utilisent le « cash » comme moyen de paiement. Dans ce cas, plusieurs questions se posent. D'abord, où est le contrôle par les organes techniques ' Ce contrôle technique est-il suffisant, les pratiques sociales contredisant souvent les meilleures lois, et donc le véritable contrôle ne passe-t-il pas par une véritable démocratisation de la décision politique sociale et économique ' Cela n'implique-t-il pas une séparation nette des pouvoirs, une véritable indépendance de la justice, l'expérience récente du monde arabe nous montrant que l'élection de certains présidents déchus officiellement à 90% des voix n'é-taient que la conséquence du bourrage des urnes par l'administration ' Pourquoi pas une véritable régionalisation économique, voire politique, à ne pas confondre avec une déconcentration où le pouvoir central imposerait des bureaucrates qui ont la suprématie sur les élus ' Concernant justement les importations concentrées aux mains de quel-ques monopolistes, et ne prenant pour argent comptant la déclaration du DG de la douane, si nous partons de l'hypothèse que les importations se sont faites sur la base d'un transfert légal de devises au cours officiel d'un euro égal à 100 dinars, et que la marchandise déclarée a été faite sur la base de prix non contrefaits, nous aurions un transfert indirect de devises en complicité avec les fournisseurs étrangers . Et comme la devise sur le marché parallèle se cote à environ 45% de plus que la valeur officielle, il s'ensuit que la différence est restée à l'étranger ou retransférée à partir du marché parallèle en dinars. (A suivre)


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