Algérie

L'ère de la congélation est déjà là: Pénuries et spéculation changent les habitudes de consommation



Désormais, la question de la consommation est devenue cruciale pour la majorité des Algériens. Que consommer et à quel prix deviennent la préoccupation journalière de la ménagère. L'ingéniosité déployée par les unes et les autres pour s'acquitter d'une telle mission, génère les prémisses d'un nouveau modèle de consommation, le plus souvent dicté par la loi de la nécessité. Ainsi, à peine éteint le débat sur la question de la consommation ou pas de la viande bovine importée de l'Inde, un autre surgit, celui du risque de la pénurie du lait durant le mois de carême. A son tour, cette question a été bousculée pour céder sa place à celle de l'explosion des prix des fruits et légumes. Au lendemain de l'Aïd, toutes ces questions se sont aggravées par la rareté et le manque de disponibilités. La baguette de pain a été cédée à 30 DA, à la rue de la Bastille. La pomme de terre a atteint les 80 DA au lendemain de l'Aïd. Même l'eau minérale n'a pas échappé à cette spirale des hausses des prix, puisqu'elle a été commercialisée dans plusieurs quartiers de la ville à 30 DA au lieu de 25. On peut multiplier à souhaits les exemples. D'un autre côté, les Oranais ont redécouvert la chaîne devant les quelques rares boulangeries ouvertes, ce qui n'a pas manqué d'éveiller chez eux le souvenir de l'ère des pénuries. Ce qui a ravivé davantage ce souvenir c'est la vente du pain aux premières heures de la matinée. Dans certains quartiers, des pères de famille ont acquis cette denrée sur la voie publique dès la sortie de la mosquée après la prière du «fedjr». Pris par l'angoisse du manque, certains ont acheté en quantité pour les stocker dans le congélateur. D'ailleurs, au même titre que la «clim», devenue nécessité dans tous les foyers à cause des grandes chaleurs, le «congélo» est de plus en plus sollicité dans les cuisines. A ce titre, l'explosion des ventes de ce matériel de cuisine est à prévoir dans les mois à venir. Bien avant le mois de carême, décidément devenu un baromètre de la consommation chez nous, des ménagères qui disposent d'un «congélo» chez elles ont stocké un certain nombre d'aliments de saison ou d'hors saison. On peut citer le poivron et les tomates indispensables sur la table du « ftour » ou les petits pois et les pois chiches dans le rayon des légumes. Pour gagner du temps et surtout pour se soustraire à toute hausse imprévisible des prix des légumes, hantise de toute ménagère, on prépare des légumes qu'on range dans son «congélo». Et la liste s'allonge d'année en année. Certaines ont essayé même les betteraves, elles aussi très prisées durant le mois du jeûne. Cette avancée rampante de l'ère de la congélation est perceptible dans n'importe quelle épicerie de quartier. On commercialise depuis quelque temps le paquet des bourses dites de congélation. Donc, d'un modèle de consommation réputé basé sur le frais on glisse doucement vers celui de la congélation. Parce qu'il est domestique, il se réalise sans grande maîtrise de toute la chaîne du froid. Par ailleurs, nombreuses familles, pour parer aux problèmes de pénurie des aliments, au lendemain de l'Aïd, se sont rabattues sur le préparé. Certains épiciers ont relevé la hausse notable de la demande sur les purées déshydratées par exemple. «Après les spaghettis et le couscous, de quels choix dispose la ménagère pour nourrir ses enfants ?», nous balance un épicier.

 Notre interlocuteur ajoutera que même la demande des soupes préparées a sensiblement avancé lors du mois de carême. L'économie du temps et surtout d'argent qu'offre cette gamme de produits explique ce soudain engouement qu'elle a suscité. Le manque de diversité dans les étals des marchés a obligé les consommateurs à s'orienter et découvrir ce genre de produits, ajoute notre interlocuteur qui se réfère aux doléances de sa clientèle, notamment féminine. Produits demandés uniquement par les personnes vivant seules, le sachet de soupe préparée fait, petit à petit, son entrée sur la liste du menu familial, conclut notre épicier très observateur de la consommation de sa clientèle. Tâche prise en charge par de véritables instituts de recherche sous d'autres cieux…




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