L'équilibriste allongé sur la ligne de crête

Pour ceux qui ne sont pas empêtrés dans les problèmes du quotidien et suivent l'actualité, il y a eu beaucoup de déplacements de cartes ces derniers jours, dans un grand jeu où valets, rois, jokers et as s'affrontent poliment avec les mains.Le chef d'état-major Gaïd Salah est aux Emirats pendant que le Qatar vient d'annoncer sa sortie de l'OPEP ; MBS, prince héritier du trône en or noir, est à Alger de retour d'Argentine pendant que le pétrole chute, et le budget algérien aussi, à cause de la surproduction saoudienne.
Sauf que le président algérien n'a pu recevoir le prince, fils du roi, «alité en raison d'une grippe aiguë»n selon l'agence officielle. Ce qui pose un problème, la visite de la chancelière allemande Merkel à Alger avait aussi été annulée à la dernière minute en raison d'«une bronchite aiguë» du président algérien, toujours selon les sources officielles.
Ce qui pose un autre problème, cette propension à être touché par des maladies aiguës au moment de visites importantes de chefs d'Etat. Ce qui pose enfin le problème crucial, le Président est-il dans une méforme aiguë qui l'empêcherait de briguer un nouveau mandat pour une présidentielle aiguë elle aussi, liée à une crise aiguë de gouvernance '
Ce qui rejoint ce constat d'un géomètre de l'Ansej, qui rappelle qu'au lieu d'une grippe ou bronchite normale, tout est aigu, comme les rapports entre les clans, ceux entre les hommes et les femmes, l'opposition et le régime ou la justice et les blogueurs, et même les montagnes, acérées ici, là où ailleurs elles peuvent former des vallons arrondis.
Au lieu de douces courbes rassurantes, il n'y a que des angles, qui font mal quand on les touche et séparent radicalement deux versants opposés sur la ligne de crête sans jointure de transition.
Pour cette raison, on ne peut que souhaiter au Président quelque chose de moins aigu, un rhume, une toux ou un simple coup de froid, et même à espérer qu'il soit assis plutôt qu'alité. Ainsi, même nous, nous pourrons aller mieux.