L’enseignement initiatique de Sidi Boumédiène Radya Allah ‘Anhou
I-/ Abù Madyan El Ghaouth: Le Secours par l’Amour en Dieu (1126-1197)
«Les vrais soufis sont du passé. Le soufisme est devenu charlatanerie, le soufisme est devenu une gourde à ablutions, un tapis de prières et une tunique bigarrée. Le soufisme est devenu des cris que l’on pousse, une extase simulée et un coup de folie; l’on se trompe et l’on trompe, ce comportement n’a rien de commun avec la voie qui permet d’atteindre le But.»
Ces vers de Junayd du Xème siècle sont cités par Ibn ‘Araby (1165-1240) dans Rùh el Quds (26). Il y dénonce la décadence spirituelle de son époque!... El Junayd surnommé «seyid ettà’ifa» ou Le seigneur de la Tribu spirituelle, ajoute: «Sache que tu ne parviendras pas à Lui par toi-même, mais que c’est par Lui-même que tu pourras L’atteindre!», «Agis en sorte que tu sois une miséricorde pour les autres, même si Dieu a fait de toi une épreuve pour toi-même».Ces enseignements furent développés et transmis par Sidi ‘Abdel Qàdir El Guilàny surnommé «Sultàn el awlyà», Sultan des Saints, et Sidi Abù Madyan Chou’aib surnommé «El Ghaouth», Le Grand Secours, puis par «Escheikh el Akbar, Le Grand Maître, «Ibn ‘Araby. Tous ont dénoncé les dérives faites au nom du soufisme, les usages abusifs de ce terme.
Soufi vient selon nos Maîtres de «Sàfà» ou pureté et sincèrité en l’Amour voué à Dieu, à l’instar des «gens du suff» ou gens du péristyle que cite le Coran dans la sourate II au verset 273 (27) et qui comptaient parmi eux Bilàl, Abù Hurayra , Salmàn el Fàrisy, entre autres. C’étaient des pauvres (faqyr, foqàra au pluriel, terme désignant à nos jours les disciples des taryqa), pieux, qui se réunissaient journellement à la mosquée de Médine, en cercle d’étude et commentaire du Coran, les ignorants les prenaient pour riches et fortunés tellement ils rayonnaient en apparence, ils ne sollicitaient personne pour une aide ou une aumône, n’avaient aucune arrogance dans l’attitude ou le comportement. Le Prophète aimait se joindre à eux et les considérait comme «‘awlyà Allah», Sidy Boum’diène enseigne à ses foqaras ou disciples: «El faqru faqrun mà dultsa tsesturuhu, fa idzà edhzhartsahu dzahaba nùruhu «Ton état de faqyr est pauvreté (pour Dieu) tant que tu le caches (aux yeux de tous), si tu «l’exhibes, sa lumière s’éteint!».
Mais d’autres auteurs attribuent le mot soufi au fait qu’ils s’habillaient de laine ou «souf», même El Junayd en fait une caractéristique: Le soufisme est basé sur huit vertus qui lui sont propres: la générosité d’âme ou sakhà comme Abraham, l’acceptation du décret divin ou ridà comme Ismaël, la discrétion du langage par l’allusion ou ichàra comme Zacharie (CoranIII/41 XIX/10), l’exil volontaire ou ghorba comme Jean le baptiste, l’habit de laine ou souf comme Moise, la siyàha ou pérégrination comme Jésus ‘aleyhi essalàm et la pauvreté comme Mouhammed (QSSL)...
Abù Madyan reprendra tous ces thèmes initiatiques dans ses sentences et poésies mystiques. Tout comme ses illustres prédécesseurs, il met en garde l’être humain contre «l’ontologisme», le «anà ou je», le «moi» qui préoccupe intérieurement et génère la confusion entre la recherche de soi et la quête de l’Absolu, la confusion entre psychique et spirituel, ontologisme de celui qui reste attaché à la «nature tabi’à», et comme son référent El Junayd qaddasa Allah sirrah, Sidy Boumédiène enseigne: «fa idzà nadhzartsa bi ‘ayni ‘aqlika lem tsadjid / schey’ann siwàhu ‘alà eddzawàtsi mussawiren// wa idzà talebtsa haqyqatsen min ghayrihi/ fabidzeyli djehlika là tsazàlu mu’attharen.
«Si tu regardes avec l’œil de ton intelligence, tu ne trouveras rien d’autre que Lui tracé sur les essences; Si tu cherches une autre réalité que Lui, c’est que tu n’as pas cessé de t’empêtrer dans la traîne de ton ignorance.»
Ghaouthy Hadj Eddine Sari Ali
* Conférencier dans les formations en Bioéthique et Droits de l’Homme (Fédération Européenne des Réseaux scientifiques- Ethique et Droits de l’Homme)
(Conseil de l’Europe- Strasbourg- Délégué général de La Fraternité d’Abraham- Paris)
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Note
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26-L’Esprit de Sainteté , traduit en Les Soufis d’Andalousie
27-Cf. Le Djàmi’ ahkàm el Qur’àn d’ El Qortoby -Beyrouth 1985
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Posté Le : 21/11/2006
Posté par : sofiane
Source : www.voix-oranie.com