Algérie

L'énigme de l'attentat de Vitry-le-François de juin 1961



Cet attentat qui a fait 28 morts et 178 blessés est le secret le mieux gardé de l'histoire de France. Cet acte a visé le train Strasbourg-Paris le 18 juin 1961, durant la guerre de libération et moins de deux mois après le putsch militaire du 22 avril 1961 à Alger des généraux Salan, Challe, Zeller et Jouhaud, visant à renverser le régime du général De Gaulle et à instaurer à la place une dictature militaire favorable au maintien de l'Algérie française. On le sait, le putsch militaire a échoué.La thèse de l'attentat, bien qu'évoquée au début de l'enquête a été par la suite écartée, les enquêteurs privilégiant la thèse du déraillement causé par un excès de vitesse ! Le député communiste Jacques Duclos a bien interpellé le gouvernement de l'époque lui demandant «pourquoi les autorités ont tenu à écarter toute responsabilité de l'O.A.S». Arguant à l'appui de sa question du fait que « le chef de gare de Vitry-le-François avait reçu avant le déraillement une lettre de menaces de l'O.A.S. disant : «Nous ferons sauter la voie d'ici peu », ce qui d'ailleurs aurait dû déterminer les enquêteurs à pousser leurs investigations et à ne pas conclure hâtivement et peut-être à la légère à l'inexistence de tout acte de sabotage.» La question du responsable communiste est restée naturellement sans réponse.
Trois ans plus tard, en 1964, à la suite des protestations et démarches des parents des victimes, l'enquête a été réouverte et le groupe d'experts commis pour faire la lumière sur cette affaire a conclu à un attentat par explosif contre le train. Mais, écrit Le Monde daté du 3 février 1964, «le juge d'instruction auprès la Cour de sûreté de l'Etat qui en a été saisi a rendu une ordonnance de non-lieu le 19 décembre 1963. L'affaire paraît donc terminée au point de vue pénal.» Rideau. L'attentat n'a jamais existé !
Bien que cette affaire, qualifiée d'accident, ait été maintes fois évoquée par des journalistes, des revues spécialisées, la justice n'a jamais jugé utile de rouvrir le dossier. Pour elle, l'affaire a été classée. Et puis tout ce qui a trait à la guerre d'Algérie reste dans le confidentiel sauf quand il s'agit d'incriminer l'adversaire, à savoir le FLN/ALN !
Il n'empêche, l'attentat du Strasbourg-Paris a refait surface en décembre 2016, un mois après le triste anniversaire des attaques terroristes du 13 novembre 2015 revendiquées par Daesh, attaques qui ont fait 130 morts et 413 blessés. Dans son numéro de décembre de la même année, Pierre Abramovici, journaliste d'investigation, réalisateur du documentaire De Gaulle et l'OAS est revenu sur «cet attentat qui n'a jamais existé». Sur France-24, il revient sur le contexte ? guerre d'Algérie ? dans lequel cet attentat a eu lieu, où la France était le théâtre d'une campagne d'attentats organisée par l'OAS au rythme d'un attentat tous les trois jours. «Mais comme elle [La campagne d'attentats] était franco-française, dans le contexte particulier de la guerre d'Algérie, on l'a oubliée (...) On a oublié qu'il s'agissait de la campagne la plus meurtrière depuis la seconde guerre mondiale et à ce jour encore», et on a oublié cet «accident» pour des raisons politiques, car il était inimaginable à l'époque d'attribuer à l'OAS très présente en Algérie un attentat de cet ampleur en métropole ! Autrement dit, le pouvoir gaulliste se refusait à reconnaître qu'il était confronté à un cas de guerre civile.
En attendant, que ce soit cette affaire du train Strasbourg-Paris tout comme les attentats de l'OAS en France, ils relèvent du domaine du tabou. Certes, les crimes de l'OAS sont évoqués dans les manuels d'histoire, mais de manière sommaire et insuffisamment contextualisés.
À jeudi
H. Z.


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