Peut-on garantir le droit à la scolarité et les loisirs aux enfants africains lorsqu'ils ne trouvent même pas de nourriture, de soins et de toit ' C'est la question que des experts ont posée, hier à Alger, lors d'une rencontre-débat sur «Les droits de l'enfant africain». La situation des enfants de migrants, de réfugiés et de déplacés vivant dans les camps est plus qu'inhumaine.Quelle protection peut-on garantir aux enfants africains lorsqu'ils vivent dans les pays les plus pauvres et, de surcroît, livrés à la violence et aux conflits armés ' Peuvent-ils jouir ou exercer les droits consacrés par les conventions internationales, dans les pays, terre d'asile, après de longs périples faits de souffrance et de privation ' Deux questions auxquelles des experts ont tenté d'apporter des réponses, en prenant part à une journée d'étude sur l'enfant africain, organisée à Alger, par le Centre d'information et de documentation sur les droits de l'enfant et de la femme (Ciddef) en collaboration avec l'Unicef et l'Union européenne. Dans des situations de guerre, de famine et d'ignorance, quel poids peuvent avoir les instruments mis en place par les états membres de l'Union africaine, comme le Commissariat africain des droits de l'homme ou encore le Comité des droits de l'enfant 'La commissaire, Mme Maya Sahli, dresse une liste assez longue des situations inhumaines et violentes auxquelles sont confrontés de nombreux pays du continent. Parmi elles l'absence d'état civil qui rend impossible la scolarisation de milliers d'enfants. Même si la volonté existe, les Etats ont du mal, dit-elle, à mettre en application une résolution (africaine) les obligeant à enregistrer les naissances. «Mais comment imposer l'enseignement aux enfants lorsque l'école n'existe pas ' Comment parler du droit aux loisirs, aux sorties, aux activités culturelles lorsque l'enfant risque de perdre la vie à n'importe quel moment ' Dans de nombreux pays africains, nous ne sommes pas dans une logique de protection des droits de l'enfant, mais de survie», explique Mme Sahli. «La situation, souligne-t-elle, est très dure, alors imaginez celle de l'enfant handicapé ou encore celle de ces milliers d'enfants déplacés ou réfugiés.Les conflits armés et les crises qui minent une bonne partie des Etats sont à l'origine des grands mouvements de populations internes et externes. Les camps de réfugiés et des déplacés pullulent dans une grande partie des capitales, notamment de l'Afrique de l'Ouest, de l'Est et Centrale. Les conditions d'accueil sont hallucinantes. Dans ces camps, les enfants sont les premières victimes de la violence, du travail forcé, d'abus sexuel, et de la traite. Ils subissent le pire et leur seul souci est de trouver à manger et à boire.»Mme Sahli revient avec insistance sur la problématique de l'absence d'état civil et ses conséquences sur le droit à la scolarisation et à une nationalité : «Un peuple sans éducation est un peuple sans avenir.» Directeur d'une association malienne, Diakité Mamadou évoque lui aussi la situation de souffrance vécue par les enfants africains, précisant que ce n'est là que la partie visible, parce que «la partie invisible n'est pas du tout bonne à connaître. Des milliers d'enfants sont exploités, violentés, privés de scolarisation et même de nourriture et de soins. C'est triste de savoir que des milliers d'enfants travaillent dans les mines d'or au sud du Mali. Ils lavent la terre avec des produits contenant du cyanure.Ils sont aussi des milliers à avoir été remis à des marabouts pour apprendre à lire et qui se retrouvent exploités pendant des années et contraints à la mendicité. Ils doivent suivre le marabout là où il se déplace ; ils sillonnent des régions entières sans un minimum de vie décente, pieds nus, mal vêtus, affaiblis par la malnutrition et souvent malades. Personne ne peut les arracher aux religieux. Ils sont condamnés à vivre en errance», dit-il, ému. Et d'ajouter : «Je ne trouve pas de mot pour qualifier leur souffrance?» Diakité affirme que son pays est devenu la plaque tournante des populations migrantes, réfugiées et déplacées ; souvent, précise-t-il, «les distances parcourues sont tellement longues que les enfants arrivent dans les camps terrassés par la fatigue, exténués. L'Arabie Saoudite a d'ailleurs commencé à expulser des enfants maliens de son territoire parce qu'ils sont de plus en plus nombreux à être enrôlés dans les rangs de l'organisation Etat islamique. Cette situation n'est pas propre au Mali, mais concerne tous les pays subsahariens confrontés aux conflits armés, à la violence, à la famine, et à l'exclusion.» Lors du débat, des participants ont mis en avant les pratiques et les traditions de certains pays africains qui portent atteinte à l'intégrité physique des enfants. Le cas de l'excision des petites filles, mais aussi la chasse aux petits bossus et albinos, considérés comme des porte-malheur. «Dans ces pays, comment faire comprendre aux gouvernements qu'ils sont dans l'obligation de juger les auteurs de ces crimes et de protéger les enfants '» lance Mme Sahli, commissaire africaine aux droits de l'homme.
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Posté Le : 22/12/2014
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Salima Tlemçani
Source : www.elwatan.com