On s?apprête, cette année, à célébrer le bicentenaire de la naissance de l?Emir Abdelkader. Si, à cette occasion, des livres ont été publiés ou sont en passe de l?être, en revanche, le monde de l?audiovisuel ne semble pas près d?être au rendez-vous de l?évènement. Sans désigner personne du doigt, un grand cinéaste algérien m?a déclaré la mort dans l?âme : « Le projet d?un film sur l?Emir, je m?en suis lavé les mains à tout jamais ! J?en ai déduit tout de même qu?on lui avait signifié quelque part qu?un tel projet ne pouvait être réalisé que par un cinéaste de l?Ouest algérien ! » Régionalisme oblige, les gens de Kabylie revendiqueraient à eux seuls le droit de réaliser un film sur le colonel Amirouche ou sur Fadhma N?soumer. Ceux de Biskra et ses environs seraient encore les seuls à détenir les droits de graver sur pellicule les différentes batailles de Okba Ibn Nafi ou de Koceila le berbère et ainsi de suite. Et voilà l?Algérie compartimentée pour de vrai par des esprits pour le moins étriqués ! L?Emir, c?est là une évidence, est une personnalité algérienne et universelle à la fois. Il appartient à l?Algérie mais, dans le monde entier, il est connu et reconnu. Plutôt donc que de lorgner en direction de la région de tel réalisateur algérien ou autre, il vaudrait mieux s?interroger sur les aspects à mettre en relief dans un film retraçant la vie de ce premier combattant pour la liberté dans le Maghreb et dans le Monde arabe. Par conséquent, faut-il relater, cinématographiquement, toute sa vie, depuis sa naissance, dans la région de Mascara, en 1808, jusqu?à sa mort à Damas en 1883 ? Ou, faut-il encore se contenter de quelques pans d?une vie faite de sang et de feu, de poésie et de prose, de soufisme et de recherche frénétique d?une modernité toujours fuyante ? Quelle réponse faut-il donner à certains de ses comportements sociopolitiques qui ne cadrent pas du tout avec son propre combat ? Pourquoi avait-il accepté, sans broncher, de passer en revue un détachement de l?armée coloniale, à la place des Invalides à Paris, en compagnie de Saint-Arnaud, de Pélissier et d?autres criminels ? Pourquoi avait-il ordonné à son fils de ne pas prendre part aux insurrections contre l?armée d?occupation en 1871 ? Autant d?interrogations qui restent sans réponse, de la part de nos historiens, encore moins de la part de ceux qui projetteraient de réaliser des films sur la vie de ce grand homme. Pour des raisons patriotiques et propagandistes à la fois, les Libyens n?ont pas lésiné sur les moyens lorsqu?il s?est agi de réaliser un film sur la vie du combattant Omar El Mokhtar. Ainsi, ils coupèrent court à toutes les spéculations en confiant la tâche à des acteurs de renom et à un grand cinéaste américain d?origine arabe. Les Moyen-Orientaux, avant eux, donnèrent l?exemple lors de la réalisation du film Errissala sur la vie du Prophète. Qui va triompher en fin de compte chez nous ? Le régionalisme qui montre son visage hideux dans certain cercles de petits calculateurs, sans foi ni loi, ou bien, cette Algérie profonde, celle de trente- cinq millions d?âmes aux yeux desquels l?Emir est une page glorieuse de leur histoire et un passage obligé vers la modernité ?
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Posté Le : 27/03/2008
Posté par : sofiane
Ecrit par : Merzac Bagtache
Source : www.elwatan.com