Algérie

L'émeute sert le pouvoir autoritaire et les variables externes



L'émeute sert le pouvoir autoritaire et les variables externes
Des universitaires du nord et du sud de la Méditerranée se sont penchés, deux jours durant à Alger, sur les raisons des révoltes arabes plus connues sous le nom de Printemps arabe, leurs conséquences et leur inconsistance.La marée des «révoltes arabes» n'a pas tenu ses promesses. Après l'explosion, les illusions puis la désillusion. Le mouvement pré ou presque révolutionnaire a montré ses limites dans les différents terrains où il s'est exprimé. Partant de l'étincelle Bouazizi, le Printemps arabe, vite rattrapé par l'hiver dans une large partie, continue de donner matière à analyses et réflexions.Des universitaires du nord et du sud de la Méditerranée se sont penchés, deux jours durant à Alger, sur les raisons de ces moments de l'histoire, leurs conséquences et leur inconsistance lors d'un colloque intitulé «Révoltes arabes, entre délitement, contestation et réformes». Du retour des anciens des régimes déchus en Tunisie et en Egypte à la dangereuse tournure des événements en Libye et en Syrie, de l'essoufflement du mouvement du 20 Février au Maroc, le faux printemps arabe n'a pas fini de déconstruire toutes les illusions qui l'ont accompagné.Les jeunes révolutionnaires ont vite cédé la place aux récupérateurs, c'est-à-dire au duo partis islamistes-pouvoir qui, s'ils ne sont pas dans l'affrontement et la violence comme dans les cas libyen et syrien, sont au devant dans les résultats électoraux. Les résultats d'une étude sur les jeunes, qui ont été largement partie prenante de la révolution en Tunisie, sont édifiants puisqu'ils démontrent que ces jeunes ne sont plus au devant de la scène mais bien à l'écart de ce qui se déroule dans la Tunisie post-révolution. «Ces jeunes, qui ont aujourd'hui la possibilité de s'exprimer pour décider de l'avenir de la Tunisie, ne le font pas : majoritairement, ils ne votent pas?Les jeunes sont dans le rejet des institutions de l'Etat, ils ne croient plus car ils se sentent abandonnés sur le quai de la gare. Trois ans après le 14 janvier 2011, leur situation n'a pas changé, ils disent même qu'elle a empiré», indique le résultat de l'enquête de l'université de Tunis.«La génération actuelle prend le relais de la lutte radicale du passé, mais elle est aussi le moteur du reflux», explique Gérard Prévost, sociologue, anthropologue et chercheur français. Dans l'après-révolte, les catégories sociales sont dans la recherche d'un classement, d'une présence sociale, et les catégories les plus basses sont à la traîne.Le cas syrien nous enseigne que les Etats sont fragiles par le délitement de leurs structures et par l'illégitimité des pouvoirs en place, qui ne laisse à la société aucune possibilité de s'autodéterminer. «Il y a eu création de plusieurs Etats dans l'Etat syrien, on a échoué à créer une homogénéité sociale et on a continué à nourrir les divisions issues des colonisations.Un Etat druze, un Etat alaouite et autres. La religion a été le moyen de manipulation idéal», note Nour Al Chick Ougli, chercheur à l'université de Tarragona, en précisant que même s'il y a des pressions étrangères et des intérêts occidentaux derrière ce qui se passe en Syrie, il se trouve que le régime syrien a largement fait le lit des tensions et des divisions en interne.«Disparités et inégalités sociales et économiques, reflux et bâillonnement des identités, instrumentalisation de la religion, répression et gestion par la violence» sont autant de causes internes qui servent la déstabilisation. «Les variables externes ne peuvent agir que si les variables internes s'y prêtent», note Aïssa Kadri, de l'université Paris 8. Et de souligner que «les émeutes ou la violence consolident les Etats autoritaires».Aïssa Kadri estime que le vrai changement doit procéder par une prise de conscience par le bas pour favoriser un processus pacifique. Ce qui semble être la volonté des Algériens, qui se sont tenus à l'écart du changement par la rue ou par l'émeute. Mais cette situation ne fait pas de l'Algérie une exception ou un exemple de réformes réussies. L'université algérienne apporte peu de réponses sur le cas algérien. Un plaidoyer a été d'ailleurs lancé, lors du colloque, pour que la société universitaire s'éloigne des concepts médiatiques ou politico-idéologiques et se tourne vers le terrain afin de réellement tâter, quantifier, analyser et voir la réalité sociale.Il n'est pas dans le rôle de l'université de reproduire le discours politique dominant, mais d'apporter une lecture objective des événements.Même si chaque société, suivant son processus historique, apporte elle-même les réponses à son évolution ou ses soubresauts, les révoltes arabes offrent tant d'enseignements à méditer pour les Etats autoritaires s'obstinant à tourner le dos aux peuples.




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