Dans pratiquement
toutes mes analyses de la situation en Egypte j'étais persuadé que le HCFA
(Haut Conseil des Forces Armées) n'agissait pas en amateur dans sa gestion de l'après-révolution
égyptienne.
Il s'est avéré
que le HCFA a très bien manÅ“uvré pour contourner et prendre à son compte la
révolution des jeunes Egyptiens, soutenue alors par la majorité du peuple de
Oum Eddounia !
Au lieu de suivre
l'exemple tunisien en commençant par l'élection au suffrage universel d'une
«Assemblée constituante», le Conseil a mis la charrue avant «la mule»,
préférant commencer par des élections législatives.
CE N'ETAIT NI UNE
ERREUR NI UN HASARD
Le 11 février
2011 a vu le levé du rideau sur le premier acte de cette pièce de théâtre
dûment préparée depuis le 25 janvier, jour du déclenchement de la colère du
peuple, colère qui fait boule de neige.
Le tsunami
égyptien a fait trembler tout le monde, à commencer par les voisins, tout les
voisins!, sans oublier les grandes capitales internationales, à leur tête
Washington.
Le chef d'état
major, le général Anane, alors en visite officielle aux Etats-Unis, n'a rejoint
le Caire que quelques jours plus tard. À son retour, les laboratoires
spécialisés entament leur besogne.
Le général Omar
Slimane, chef de la puissante sécurité militaire, a été nommé comme vice
président par l'octogénaire Hosni Moubarak dans ses derniers jours au pouvoir.
Le poste était vacant depuis la mort du président Anwar Essadate le 6 octobre
1981.
Les Egyptiens,
connus pour leur humour, racontent que, pour choisir son vice président, Gamal
Abdel Nasser devait nommer quelqu'un de plus abruti que lui, il a donc choisi
Essadate.
Le nouveau «Raïs»
a appliqué la même règle en choisissant Hosni Moubarak.
Quant à Moubarak,
il n'a jamais pu trouver, pendant trente deux ans, quelqu'un qui réponde au
critère demandé.
«SE RETIRER»… ET
NON «DEMISSIONNER»
Le haut
commandement militaire a compris que Moubarak vit ses derniers jours.
L'armé s'est
présentée comme le protecteur du peuple égyptien contre la répression de la
police politique, connue pour sa férocité. Elle a ainsi forcée l'admiration du
peuple et devenue la première référence nationale
Après trois
discours aussi lamentables que les speeches de Ben Ali, Moubarak a été
contraint de s'éclipser, avec un espoir ou des promesses de retour imminent.
Exactement comme
le président tunisien, la même formule a été employée.
Le nouveau vice
président, Omar Slimane, annonce dans un discours de quarante secondes que le
président Moubarak a décidé de «se retirer» du poste de la présidence de la
république, et il a chargé le Haut Conseil Militaire de la direction des
affaires.
Le mot
«démission» n'a pas été prononcé.
La logique était
de nommer le président de la Cour constitutionnelle comme chef d'Etat, étant
donné que le président du Sénat faisait parti de l'ancien régime, dénoncé par
la foule.
Première
constatation notée pas l'élite égyptienne, c'est que Moubarak est parti mais le
«moubarkisme» y est et le restera.
Toujours avec
leur ironie les jeunes Egyptiens commentent les faits, en se référant à
l'histoire de Ali baba et les quarante voleurs : le chef de la bande est parti,
il reste les trente neuf voleurs.
C'est à partir de
ce moment que le contraste avec la Tunisie devient de plus en plus évident.
Le chef d'état
major tunisien, Rachid ammar, n'a fait que deux apparitions médiatiques,
d'ailleurs très discrètes.
Mais en Egypte,
le Conseil militaire a accaparé le devant de la scène.
Il a formé un
gouvernement très docile, au point qu'il était considéré par les jeunes, avec
un sourire peu discret, le «secrétariat» du maréchal Tantaoui.
Certains membres
du HCFA sont devenus de véritables vedettes médiatiques.
Des anciens
généraux en retraite ont monopolisé les chaînes de télévisions et inondé les
petits écrans par une diarrhée verbale qu'ils qualifiaient d' «analyses
stratégiques» !
Le contenu était,
dans la plus part des cas, une rumination «des louanges à l'armée», une armée
qui n'en avait pas vraiment besoin.
Plus grave
encore, une confusion malsaine a été entretenue entre le rôle politique du
Conseil et la mission nationale de l'institution militaire.
Aussi, chaque
critique d'une démarche politique du Conseil est rapidement considérée comme
une insulte à l'armée, voire, une trahison au pays.
L'objectif était,
d'une part, de faire taire toute critique, et d'autre part de marginaliser la
force populaire de la place Ettahrir.
A ce moment
précis, un «deal» entre le Conseil et les dirigeants du courant islamisant
s'imposait comme une nécessité tactique.
C'est exactement
ce qui explique la priorité accordée aux législatives après la dissolution
démagogique du parlement, contrairement à l'expérience tunisienne, qui avait
pour priorité la formation d'une assemblée constituante.
Commencer par la
Constitution était la logique-même, car c'est ce texte fondamental qui doit
régir toutes les institutions, délimiter les prérogatives de tous les
responsables et préciser le mécanisme à adopter dans chaque phase de l'action
politique.
L'ensemble des
jeunes était convaincu que la démarche adoptée n'était pas appropriée. La place
«Attahrir» est redevenue l'unique symbole de la révolution, ce qui a commencé à
agacer beaucoup de monde.
Révolution sans
commandement
Les jeunes
étaient animés par une bonne volonté et un esprit remarquable de sacrifice,
mais Ils étaient pratiquement sans expérience politique et sans direction
stratégique.
La seule force
politique bien organisée était le mouvement des «Frères musulmans» qui a subi,
pendant des décennies, l'oppression du régime.
Au départ, le
mouvement a hésité à rejoindre le mouvement révolutionnaire, bien que les
jeunes adeptes aient participé d'une façon effective aux manifestations, en
ignorant les mots d'ordres de leur chef.
Les groupes de
Salafi ont pris carrément position contre les révolutionnaires des le début, en
clamant que le peuple doit l'obéissance absolue à «El haakim» quels que soient
ses crimes.
Mais les FM et
les Salafis ont fini par prendre le train en marche.
Ils étaient
accueillis à bras ouverts par le Conseil, qui a utilisé la politique de la
carotte, tendue à des lapins affamés et voraces.
L'ancien
instrument de répression était toujours à pieds d'Å“uvre et l'Egypte a vécu une
période d'insécurité, avec un mouvement quasi général de contestation sectaire,
qui a presque paralysé le pays.
L'implication de
la direction politique a été discréditée, à cause de l'impunité des policiers
et des «baltaguias» qui ont massacrés les manifestants.
Les soupçons se
sont confirmés lorsque le calme absolu s'est instauré pendant les trois
semaines des élections.
Un contraste
flagrant.
Tout le monde est
arrivé à la conclusion que le régime avait besoin d'un climat anxiogène afin de
faire regretter l'époque du Moubarak.
Cela explique
pourquoi l'Egypte, presque toute entière, avait connue un climat d'insécurité
sans précédent.
Des «salafi» ont
attaqués des églises, provoquant des conflits religieux qui ont aggravé la
situation. Le Conseil lance une compagne de dénigrement contre les jeunes, les
accusant, sans preuves, d'être à la solde des forces étrangères, qui menacent
la sécurité nationale et la stabilité de l'Egypte.
L'objectif était
simplement de dresser le peuple contre l'avant-garde qui a tant sacrifié contre
la dictature, oubliant que c'est bien les jeunes manifestants qui ont donné sa
légitimité au HCFA.
Les forces qui
ont profité de la révolution voulaient mettre fin à la «légitimité
révolutionnaire», et au rôle politique des jeunes indomptables de la place
Attahrir.
L'appétit vient
en mangeant
Le courant
islamique a, au départ, promis de se contenter de 30 à 40% au sein du
parlement, mais ils ont utilisé tout les moyens, protégés par les services de
l'Etat, pour venger leur souffrance infligée par l'ancien régime.
C'est ainsi que
les élections législatives ont données aux islamistes une majorité très
importante (60% des sièges) et l'Egypte a vécu un comportement arrogant et
insolant de leur part, et qui a fait regretter à pas mal d'Egyptiens leur choix
électoral.
Les dirigeants
islamistes n'ont pas profités de l'expérience algérienne et ils ont ignoré
totalement les expériences tunisienne et marocaine.
Après avoir
obtenu la majorité parlementaire ils ont procédé à la formation d'une Assemblée
constituante de 100 membres, en insistant à avoir une majorité confortable.
Cela avait comme
conséquence la levée du bouclier dans la place politique, et notamment au
niveau des chrétiens ; qui constitue presque 15% de la population.
Ivres de leur
succès, les dirigeants islamisants commencent à menacer Al Ganzouri, le chef du
gouvernement qui a été choisi par le conseil militaire.
Puis ils ont
décidés de présenter un candidat aux élections présidentielles, bien, qu'ils
ont déclarés auparavant qu'ils se contenteraient de leur majorité législative.
Avec les menaces
juridiques contre leur premier candidat, le fameux homme d'affaires, Kheirat El
Chatir, ils ont présenté, comme une roue de secours, un deuxième candidat, en
la personne du M. Moursi, «Le Mourchide»(chef supérieur) des «FM».
LA SITUATION
TOURNE AU VINAIGRE
En l'absence d'un
Napoléon et étant donné que le général Chazli n'est plus, le général Omar
Slimane se présente comme le sauveur de la nation de l'anarchie, de
l'insécurité et du chao socio-économique.
Certains ont
essayé de faire oublier qu'il a été un des principaux décideurs de l'ancien
régime, et les fameux spécialistes stratégiques reviennent à la charge pour
soutenir leur Général. Les mauvais esprits se souviennent de la déclaration de
Mostapha El Fiki, disant que le futur président de l'Egypte doit avoir la
bénédiction de Washington et l'accord d'Israël.
Mais les malins
se rappellent de «Ion Iliescu», adjoint intime de «Nicolae Ceausescu» qui a
volé la révolution roumaine en 1989 et a enterré, une deuxième fois, les
victimes de Timisoara.
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Posté Le : 12/04/2012
Posté par : sofiane
Ecrit par : Docteur Mohieddine Amimour
Source : www.lequotidien-oran.com