Algérie

L'éditeur dénonce une "censure politique"



"Confrontés à plusieurs aléas durant les années Bouteflika, entravant leur développement, les deux sites le resteront dans l'Algérie nouvelle", ironise El-Kadi Ihsane, directeur pôle éditorial à Interfaces médias, société éditrice des deux sites.Temps durs pour la presse. Quelques jours seulement après l'incarcération d'une figure émergente du journalisme algérien, en l'occurrence, Khaled Drareni, et la condamnation ou le placement sous contrôle judiciaire d'autres journalistes, voilà que deux sites d'information en ligne, Maghrebemergent.info et Radiom.info se voient bloqués par les autorités. Depuis jeudi, en fin d'après-midi, ces deux sites, en effet, dont le premier, leader de l'information économique en Algérie, lancé en 2010, et le second lié à la première web-radio lancée en 2013, sont accessibles uniquement par VPN.
Si aucune source officielle ne s'est encore exprimée sur la question, l'éditeur, en revanche, dénonce une "censure politique". "Les vérifications d'usage avec l'hébergeur et les tests locaux sont convergents. Il s'agit d'une censure politique comme celle qu'ont subies nos confrères de TSA en 2017, en 2019 et 2020", dénonce l'éditeur dans un communiqué rendu public. "Leur blocage, aujourd'hui, correspond à la pire séquence de répression de la liberté de la presse qu'aura connue l'Algérie depuis les assassinats de journalistes dans les années 90", s'insurge-t-il.
"Confrontés à plusieurs aléas durant les années Bouteflika, entravant leur développement (non reconnaissance de statut, interdiction de carte de presse et de publicité, répression), les deux sites le resteront dans "l'Algérie nouvelle", ironise El-Kadi Ihsane, directeur pôle éditorial à Interfaces médias, société éditrice des deux sites, dans une allusion à la nouvelle gouvernance post-élections de décembre dernier. Mais, malgré cette "censure", il promet qu'ils ne vont pas abdiquer.
"La tentative de les réduire au silence est vaine. Nous continuerons à pratiquer notre métier : informer en toute indépendance. Nous continuerons à le faire en particulier dans ce contexte de lutte contre la pandémie de Covid-19 où nous avons déployé des efforts supplémentaires pour rendre plus lisible et plus intelligible l'évolution de la crise sanitaire. Radio M est déjà au c?ur d'un réseau de solidarité citoyenne et participe à sa coordination par l'ouverture de son antenne aux auditeurs et acteurs civiques de notre pays. La censure n'aura pas raison de notre engagement professionnel et citoyen par ce temps de doute", assure l'éditeur.
Il appelle, dans ce cadre, les autorités à "revoir leur copie". "Une autre voie que celle, anachronique, de combattre les médias électroniques doit s'ouvrir rapidement. Nous exhortons le gouvernement algérien à l'examiner. Le ministre de la Communication s'est publiquement félicité, il y a quelques semaines du sens de la raison d'un éditorialiste reconnu de Radiom.info appelant à la suspension du hirak pour cause d'urgence sanitaire.
Ce sens de la raison est exactement le même qui appelle aujourd'hui à suspendre l'offensive répressive contre le journalisme indépendant, la presse et les médias électroniques en particulier", estime le texte. L'éditeur se dit enfin disposé à participer à l'élaboration des solutions pour le développement d'une presse de qualité.
"Ce sont (les deux sites, ndlr) des partenaires sérieux à des gouvernances sérieuses. La décision aventureuse de les bloquer ne peut rien enfanter de bon pour personne. Nous serons là demain et après-demain pour en témoigner", conclut le texte.
Ce blocage, après d'autres sites dans un passé assez récent, intervient quelques semaines seulement après l'appel du Premier ministre Abdelaziz Djerad au ministre de la communication, Amar Belhimer, l'exhortant à engager les procédures et modalités pratiques et réglementaires en vue de concrétiser "dans les meilleurs délais" la décision du président de la République relative à la régularisation de la situation juridique des journaux électroniques domiciliés en Algérie.
Etant parmi les rares à couvrir le hirak, les deux sites où exerce également Khaled Drareni, se sont distingués dans le paysage médiatique national par leur ouverture aux voix de l'opposition et à nombre de figures émergentes du mouvement populaire. La radio web a même traité des sujets tabous, comme la question des disparus, et ouvert son antenne à des voix très critiques envers le régime.

Karim K.


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